Le débat de l’ONU sur la « question algérienne » (1955–1960). Une approche lyotardienne
Doctorante en philosophie

(EHESS - Laboratoire interdisciplinaire d’études sur les réflexivités - Fonds Yan Thomas [LIER-FYT])

« Ain't gonna let the administration turn me around

Turn me around, turn me around

Ain't gonna let the administration turn me around

Keep on a-walkin', keep on a-talkin'

Gonna build a brand new world »

Chanson pour les droits civiques américains

À la suite de la crise humanitaire, morale et politique de la Seconde Guerre mondiale, plusieurs traités ont été conclus en 1945, précisant les principes d’un nouvel ordre politique international. Parmi ceux-ci, la Charte du forum politique suprême de ce nouvel ordre, l’Organisation des nations unies (ONU), fut ratifiée par plusieurs États. Or, dès 1955, un débat sur les principes de la légitimité du pouvoir contemporain eut lieu au sein de l’ONU, ayant pour nom la « question algérienne ». Il portait sur qui pouvait réclamer la souveraineté sur l’Algérie, dans une période que l’on connaît aujourd’hui comme celle de la « guerre d’Algérie ». Deux parties s’opposaient : l’une représentée par la France et d’autres États coloniaux défendant la souveraineté territoriale de l’État français sur un fondement juridique ; l’autre, soutenue par les États africains et asiatiques au passé colonial, militait pour le droit du peuple algérien à l’autodétermination, en évoquant les droits de l’Homme. Après cinq années de débat, en 1960, les discussions débouchèrent sur l’adoption d’une résolution reconnaissant « le droit du peuple algérien à la libre détermination et à l’indépendance1 », sans consensus sur la question de la souveraineté en général.

Pourquoi les principes de la légitimité du pouvoir contemporain, qui avaient été récemment édictés et acceptés par chaque État membre, ont ainsi été explicitement remis en cause ? Et, comment comprendre que deux positions théoriques antagonistes se soient formées ? Une fois ces deux pôles théoriques consolidés, comment l’adoption d’une résolution a-t-elle finalement pu aboutir ? En bref, il s’agit pour nous de déterminer les conditions conceptuelles qui ont permis à ce débat sur les principes de la légitimité du pouvoir contemporain d’être formulé et de perdurer pendant des années, et enfin d’adopter une résolution finale sans que les positions théoriques des deux parties ne se rapprochent.

En présentant les principaux résultats d’une recherche archivistique sur les procès-verbaux des réunions des organisations politiques de l’ONU2 portant sur la « question algérienne », nous essaierons de comprendre les enjeux de la transformation engagée dans la conception de la souveraineté. Cette transformation, qui s’est jouée dans le contexte de la décolonisation, consiste en la décomposition du modèle « souverainiste » de l’État-nation occidental par la mobilisation d’un modèle alternatif ou « postcolonial ». À ce titre, l’analyse portera davantage sur l’évolution du débat que sur la condition conceptuelle et historique de la formation du débat lui-même. En d’autres termes, dans notre analyse, nous n’adopterons pas une approche historique externe sur les modalités d’un tel débat ; nous privilégierons la dimension interne du débat, en nous demandant comment l’adoption d’une telle résolution s’est révélée possible malgré l’antagonisme des deux positions théoriques.

Afin de comprendre la façon dont cette transformation s’est déroulée, nous nous appuierons sur la philosophie du différend de Jean-François Lyotard3. La réflexion proposée par Étienne Balibar4 nous sera également utile. L’adoption de la philosophie du différend semble d’autant plus adéquate que Lyotard lui-même propose son adaptation aux contextes coloniaux. De plus, c’est lui qui renvoie rétrospectivement, dans la préface d’un ouvrage paru en 1989 recueillant ses écrits sur le conflit5, à ce qui, en Algérie, relevait du différend : « Le différend s’y exposait avec un tel tranchant, écrit-il, que les consolations alors communes à mes semblables – réformisme vague, stalinisme pieux, gauchisme futile – m’avaient été refusées6». Cette allusion de Lyotard a par ailleurs conduit certains érudits à faire remonter la genèse de cette philosophie à la question algérienne7.

Pour autant, nous ne visons pas à nous engager dans ce débat académique qui essaie de contextualiser historiquement la pensée lyotardienne. L’apport de notre travail se trouve, d’une part, dans la présentation des principaux résultats d’une recherche historique originale qui étudie le débat sur la « question algérienne » au sein de l’ONU, depuis 1955, date à laquelle la question a été posée, jusqu’en 1960, quand l’Organisation est enfin arrivée à prendre une position définitive à cet égard. D’autre part, nous proposons un prisme lyotardien pour appréhender les conditions conceptuelles de la transformation de la notion de souveraineté. Cette transformation s’opère, nous le verrons, à deux niveaux : celui de l’émergence d’une nouvelle pratique politique de type révolutionnaire – qui consiste à imposer sa propre interprétation de la souveraineté contre le modèle dominant de l’État-nation – ; et, conjointement, celui de la formation d’un nouveau sujet politique – qui correspond aux sociétés postcoloniales.

The United Nations General Assembly Building

Le bâtiment de l'Assemblée générale des Nations unies, 1952

Méthode de recherche et approche philosophique

Nous avons étudié les procès-verbaux, représentant environ un millier de pages, dont le contenu était essentiellement concentré sur un double dilemme, politique et juridique : sur quelles bases peut-on légitimement réclamer la souveraineté sur l’Algérie ? L’ONU est-elle compétente dans cette affaire ? Ayant posé ces questions, nous avons estimé qu’une enquête juridique rigoureuse était incontournable pour cerner les enjeux du débat. Or, il nous est apparu que la question de la transformation de la souveraineté, à laquelle nous nous intéressions, ne cessait d’échapper au regard juridique. La « question algérienne » concernait les conditions de la dissolution d’une République et la formation d’un État (respectivement la IVe République et l’Algérie), et faisait ainsi partie de la « zone grise » du droit qui ne peut essentiellement qu’approuver le processus a posteriori. De la même façon, ce dilemme bilatéral n’était pas du tout « résolu » sur le terrain juridique. Grâce, notamment, aux efforts de la majorité quantitative des États pro-algériens pour maintenir cette question à l’ordre du jour pendant des années, la compétence de l’ONU dans l’affaire est simplement devenue un fait accompli8. Concernant la question de la légitimité du pouvoir, le débat s’est déplacé du niveau théorique des principes pour aller vers un niveau pragmatique, celui du maintien de l’ordre. Ce glissement relève de ce que nous pouvons appeler l’« efficacité minimale » de tout pouvoir légitime.

Il nous a donc semblé nécessaire d’abandonner l’approche juridique, et avec elle, la volonté d’écrire l’histoire du débat, et d’essayer de penser en termes philosophiques ce qui s’était passé à l’ONU. Or, une telle entreprise demandait naturellement une synthèse radicale du débat. La reconstruction de sa dynamique – qui correspond toujours à la pratique historiographique de construction – m’obligeait à mettre en scène deux positions plus ou moins cohérentes qui n’ont en réalité jamais existé en tant que telles. Dans ce qui suit, nous allons ainsi évoquer, d’une part, les arguments le plus fréquemment énoncés par les délégués ; et d’autre part, présenter les métaphores, récits et analogies historiques qui ont été mobilisés pour fonder la légitimité de la cause algérienne. Parmi ces récits et ces analogies, on trouve la « tendance inexorable de l’histoire9 », évoquée fréquemment par les États pro-algériens, censés exiger la libération des colonies, ou encore l’analogie historique entre la France libre et le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).

Le but de ces métaphores et de ces analogies dépassait la simple coloration de l’argument : il s’agissait de rendre possible une discussion entre les deux parties. Le groupe des colonisés manquait de moyens pour exprimer et présenter le tort subi par le peuple algérien (lui-même absent du débat), ce tort ne trouvait d’ailleurs aucun écho dans la langue du colon. À l’ONU, en l’absence d’une règle de jugement reconnue par les deux parties, un différend s’est dès lors produit entre le colon et le colonisé. Dans les termes employés par Lyotard :

« Le plaignant porte sa plainte devant le tribunal, le prévenu argumente de façon à montrer l’inanité de l’accusation. Il y a litige. J’aimerais appeler différend le cas où le plaignant est dépouillé des moyens d’argumenter et devient de ce fait une victime. Si le destinateur, le destinataire et le sens du témoignage sont neutralisés, tout est comme s’il n’y avait pas de dommage. Un cas de différend entre deux parties a lieu quand le “règlement” du conflit qui les oppose se fait dans l’idiome de l’une d’elles alors que le tort dont l’autre souffre ne se signifie pas dans cet idiome10 ».

La mise en question de la compétence de l’ONU dans ce débat atteste précisément d’un tel effort pour neutraliser le destinateur (le parti du colonisé), le destinataire (l’ONU), et le sens du témoignage (l’injustice inhérente à la présence française en Algérie). Cet effort n’est pas resté sans effet : dans ce que l’on peut appeler la première étape du débat, en 1955, le différend a été étouffé, car le groupe représentant le colonisé a, officiellement, « dans un esprit de conciliation », retiré son cas. Ainsi, le tort subi par les Algériens est demeuré « intraitable ».

Or, à la session de l’année suivante, la « question algérienne » fut à nouveau posée par des États anciennement colonisés. À partir de là, le différend put être formulé de façon définitive. Alors même que la compétence de l’ONU restait farouchement contestée par les États pro-français, l’Assemblée générale adopta enfin deux résolutions qui exprimaient en termes généraux sa préoccupation pour ce qui se passait en Algérie et son espoir qu’une solution soit trouvée, sans pour autant que cette assemblée ne prenne de position politique11. Le tort fait au peuple algérien était donc formulé, même si cette énonciation demeurait évasive. Dans le même temps, deux positions théoriques se consolidaient : d’une part, celle adoptée par les États pro-français, exprimée en termes juridiques et renvoyant, avant tout, à l’idée de la souveraineté territoriale ; et d’autre part, la position des États pro-algériens, formulée dans le langage des principes politiques, évoquant notamment les droits de l’Homme. Ces deux arguments ont mutuellement exclu la légitimité de l’autre et n’ont donc offert aucune possibilité de consensus au niveau théorique.

L’opposition vigoureuse entre les deux parties a changé à partir de 1958. Ce changement fait sans doute suite, pour une part, à la chute de la IVe République, après le coup d’État mené par des officiers de l’armée française, ou en d’autres termes, à l’échec apparent de l’État-nation occidental d’imposer sa souveraineté, même sur ses propres combattants ; et pour une autre part, à la formation du GPRA, qui a peut-être fait évoluer le débat. Avec le GPRA émergeait en effet un « interlocuteur valable » au sein du peuple colonisé – cet interlocuteur qui avait si longtemps fait défaut selon les Français libéraux indépendantistes, tel que Raymond Aron12. À partir de ce moment, le différend est devenu litige et s’est concentré essentiellement autour de la question du maintien de l’ordre.

Les questions qui ont dès lors guidé le débat peuvent être traduites en termes philosophiques et énoncées comme suit : d’abord, l’État-nation français pouvait-il assurer l’intégrité de la République, en garantissant la sûreté de son peuple, en s’assurant que ses ordonnances soient respectées et que son territoire demeure indivisible ? Ensuite, les insurgés étaient-ils mieux placés que le gouvernement français pour parler au nom des algériens, sachant que les insurgés ont profité visiblement de l’appui de la société algérienne ? De plus, les insurgés étaient-ils davantage en capacité d’assurer le maintien de l’ordre, si l’on prend en compte le fait que l’armée française, contre qui ils résistaient, avait éliminé la IVe République ? En outre, faudrait-il les reconnaître comme les représentants légitimes du peuple algérien ? Faudrait-il les traiter comme souverains, ou bien avaient-ils déjà ce statut ?

Ces changements de réalité politique (comme la chute de la IVe République et la formation du GRPA) ont sans aucun doute influencé la dynamique et la direction du débat. Pourtant il semble difficile d’expliquer le fait que, pendant le débat, ces réalités politiques aient été prises en compte de manière définitive, certaines réalités politiques n’arrivant jamais à influencer véritablement les discours officiels dont ils font l’objet. La simple présentation de ces éléments n’aurait sûrement pas été suffisante pour gagner le débat et il a fallu que le groupe pro-algérien les investisse d’un sens symbolique, par un langage métaphorique. C’est ce que Lyotard appelle l’établissement de la « réalité » du débat. C’est à cette « réalité » que les arguments du groupe pro-algérien renvoient et dans laquelle ils prennent sens, pour que le tort puisse être formulé. La réalité qu’il lui fallait établir était celle de la souffrance du peuple algérien causé par la présence française. Cependant, celle-ci était inscrite dans la Constitution française de 1848 et était donc tout à fait légale.

Afin de contourner l’argument juridique dans lequel ce tort ne pouvait pas être exprimé (parce que l’Algérie n’était pas une colonie et ne pouvait donc pas s’affranchir d’une répression coloniale), il fallait traduire la réalité politique en métaphore pour qu’elle ait un sens politique et que le tort puisse se dire, permettant le surgissement d’un langage commun qui portait sur la question du maintien de l’ordre. En d’autres termes, il fallait exposer la cause des insurgés comme un récit légitime, alternatif à celui de la République française, pour que le débat puisse se reformuler et s’articuler dans le langage du maintien de l’ordre.

Nous devons souligner que, concernant le langage et l’objet du débat, il s’agissait davantage de remettre l’accent sur la question du maintien de l’ordre que de rompre définitivement avec la question de la légitimité. La question de la compétence de l’ONU et les arguments théoriques ont accompagné jusqu’au bout ce débat. Un premier temps déterminante, l’importance accordée à ces questions a cependant progressivement diminué. En complément à cet affaiblissement, les interrogations concernant le maintien de l’ordre étaient d’emblée très présentes, avec une accentuation à partir de 1956. En effet, cette problématique a été élevée peu à peu au point focal du débat. L’invention et l’insertion de nouveaux idiomes métaphoriques ont rendu possible la discussion et ont enfin permis d’aborder l’« intraitable » dans le langage du maintien de l’ordre. Dans les termes d’Étienne Balibar qui interprète la philosophie du différend du point de vue postcolonial, c’est la traduction de l’« intraduisible » en un langage commun qui permet que le différend puisse « devenir l’objet d’une politique et faire surgir les sujets de cette politique13 ».

C’est de cette façon que, malgré le dissensus total sur la question de la souveraineté d’un point de vu théorique, l’adoption d’une résolution concernant la « question algérienne » est devenue possible, avec l’appui de la majorité des États pro-algériens et l’abstention de la minorité pro-française14. De nouveaux sujets politiques et de nouvelles pratiques politiques ont ainsi pu émerger, rendant possible l’établissement de nouvelles règles de jugements, toujours plurielles. Avant de les énoncer, il convient de résumer brièvement le résultat de la recherche archivistique.

New Man

New Man, Lazar Lissitzky, 1923

source: Wikipedia

Les étapes du différend

Le différend étouffé

En 1955, quatorze États au passé colonial ont adressé un courrier officiel au secrétaire général de l’ONU ; ils sollicitaient l’intégration de la « question algérienne » à l’ordre du jour de l’Assemblée générale15. Conformément aux règles de procédure, c’est le Bureau qui devait accepter, ou non, une telle inclusion ; celle-ci a finalement été refusée16. À la suite de cette décision, un très vif débat portant sur cette demande fut engagé à l’Assemblée générale17. Ce débat s’est articulé autour d’une double question qui l’a accompagné pendant chaque session. Elle se composait, d’une part, du dilemme « essentiel » de philosophie politique, à savoir « sur quelle base peut-on légitimement réclamer la souveraineté sur l’Algérie ? » ; et, d’autre part, de la question « procédurale » relevant du droit international, à savoir « est-ce que l’ONU est compétente dans cette affaire ou non ? ».

La question de compétence s’imposait dans un premier temps, sur laquelle deux positions antagonistes s’esquissaient. L’une, assumée notamment par la France, la Belgique, le Danemark, la Norvège, la Grande Bretagne, les États-Unis, la Nouvelle-Zélande, la Colombie, le Chili, le Cuba, l’Équateur, Haïti et le Pérou, était essentiellement une position juridique, remettant en question la compétence de l’ONU dans la discussion de l’affaire algérienne. Selon la Constitution française, l’Algérie faisait partie intégrante de la France depuis plus de cent-vingt ans, ces États soulignaient donc que la « question algérienne » était essentiellement une question française, et que le principe de non-intervention de la Charte interdisait à l’ONU d’intervenir « dans des affaires qui relèvent essentiellement de la compétence nationale d'un État » (article 2 paragraphe 7). Même si l’Algérie était colonisée, soutenait-ils, cet état des choses était légalisé par sa constitutionnalisation et sa persistance pendant plus de 120 ans. Par ailleurs, quand la France avait été admise à l’ONU, il était clairement explicité dans la Constitution française que l’Algérie en faisait partie intégrante, et personne n’avait alors soulevé d’objection. Il n’était donc pas possible de critiquer la France après l’avoir intégrée dans l’ONU parce que cela aurait signifié que l’ONU s’était transformée en un tribunal, et ce n’était absolument pas la définition établie dans sa Charte. La Charte, affirmaient les États précités, pouvait faire l’objet de changements mais elle ne pouvait pas être ignorée. Ne pas tenir compte de la Charte, en intervenant dans les affaires internes d’un État membre, aurait constitué une violation délibérée du texte et aurait rendu impossible pour les États concernés de rester membres de l’ONU. En d’autres termes, l’idée mise en avant était que la discussion de la « question algérienne » mènerait à court terme à la dissolution de l’ONU et celle de l’ordre international contemporain général. La France a même indiqué que dans le cas où l’on déciderait de mettre la « questionne algérienne » à l’ordre du jour, elle se retirerait de l’ONU ainsi que de l’OTAN.

L’autre position était représentée notamment par l’Égypte, l’Irak, la Syrie, le Yémen, l’Arabie saoudite, l’Afghanistan, le Pakistan, la Thaïlande, l’Indonésie, l’Inde, l’URSS, la Bolivie, la Tchécoslovaquie, la Liberia. Ces États insistaient sur la nécessité, pour l’ONU, de s’emparer de la « question algérienne » parce qu’elle exposait un problème colonial, c’est-à-dire, un problème résultant d’une situation imposée par l’emploi unilatéral de la force, autrement dit, une pratique désormais révolue pour ces États. Échanger sur ces questions ne signifiait pas intervenir dans des affaires internes, mais au contraire faire vivre l’ONU conformément à ses principes. Alors que la France semblait préférer recourir à la force pour trancher cette question, on citait l’article 14 de la Charte selon lequel « l’Assemblée générale peut recommander les mesures propres à assurer l'ajustement pacifique de toute situation, quelle qu'en soit l'origine ». La France, incitaient les représentants des États défendant la question algérienne, menait une véritable guerre en Algérie, réprimant la demande légitime des colonisés, provoquant une catastrophe humanitaire et troublant la paix internationale, sujets de grande préoccupation de l’ONU. Les États au passé colonial montraient qu’à défaut de mettre la « question algérienne » à l’ordre du jour, la Charte de l’ONU deviendraient lettre morte, et le prestige, la fonction et le sens même de cette institution seraient caducs. En outre, la raison d’être des États membres ayant récemment obtenu leur indépendance face à la colonisation serait aussi ébranlée.

À la suite de ce débat, l’Assemblée générale a finalement décidé d’inclure la « question algérienne » à l’ordre du jour18, débouchant sur le retrait non officiel mais de facto de la France de l’Assemblée générale19. Cependant, la discussion n’a pas continué sur ce sujet. En effet, les États pro-Algériens ont décidé, « dans l’esprit de conciliation », de retirer cette question au cours de la session de 195520. Ce qui conduisit au retour de la France à l’Assemblée21.

Le différend est formulé

Pendant les sessions de 1956 et de 1957, le tort a été exprimé, et par cela, le différend a été officiellement formulé, avec la participation de la France à l’Assemblée générale, pour répondre aux « accusations diffamatoires22 ». Cela a abouti à la consolidation des positions théoriques des deux parties. L’une, que l’on peut nommer « souverainiste », exprimée en langage juridique, renvoyait à la loi des États coloniaux. L’autre, que l’on peut appeler « postcoloniale », remettant en question le modèle souverainiste, était articulée dans le langage de l’éthique politique et renvoyait aux principes politiques sur lesquels les États postcoloniaux avaient récemment été fondés. Les deux modèles pouvaient se construire sur les fondements de la Charte qui, vers la fin de cette étape, cessait peu à peu d’être la référence du débat.

Le modèle souverainiste, mobilisé par les États pro-français, était constitué principalement de propositions juridiques. Selon ce point de vue, la légitimité de la demande française reposait, outre la Constitution française, sur la reconnaissance historique et actuelle – par d’autres États souverains et par certaines organisations internationales – de l’Algérie comme « partie intégrante de la République française ». Aussi, cette légitimité était soutenue par le principe du droit international d’uti possidetis juris, c’est-à-dire, de l’intangibilité des frontières. Il était d’ailleurs souligné que les principes d’aujourd’hui ne s’appliquaient pas rétroactivement, et qu’en colonisant l’Algérie, la France s’était comportée conformément aux normes contemporaines. Afin d’interpréter la Charte, ce modèle invoquait les travaux de Hans Kelsen pour expliquer le principe d’autodétermination de la Charte. La Charte s’appliquait exclusivement aux États membres et non à chaque « peuple » du monde. Ainsi, le concept d’autodétermination signifiait qu’un peuple était libre d’élire son propre gouvernement, mais que tous les peuples n’étaient pas concernés. Les États pro-français insistait aussi sur le fait que la souveraineté territoriale ne pouvait pas être annulée par un groupe d’États membres insatisfaits de la géographie politique actuelle. Les souverainistes évoquaient qu’il y avait une voie légale et démocratique pour trancher le problème algérien, car le gouvernement français avait proposé une loi cadre consistant en trois étapes : d’abord un cessez-le-feu, suivi d’élections législatives, débouchant sur des négociations politiques avec les députés23. À ces propositions juridiques, on ajoutait qu’un État algérien n’avait jamais existé, et que seuls les Français pouvaient assurer l’ordre en Algérie et empêcher le surgissement d’une guerre civile, de l’anarchie, de la pauvreté ou d’un régime communiste.

En contraste avec cette position juridique, le modèle proposé par les États pro-algériens était fondé sur les principes politiques provenant de la Révolution française. Ces États exposaient régulièrement la « guerre algérienne » comme l’étape suivante de la grande marche historique inexorable vers la liberté de l’Homme, réalisant les principes de la Révolution. Il était souligné que l’existence de la pluralité des régimes juridiques en Algérie ne permettait pas l’égalité devant la loi, et que la disparité dans la représentation à l’Assemblée nationale française des résidents « européens » et « musulmans » de l’Algérie donnait lieu à une inégalité politique. De plus, on affirmait que les réformes sociales et économiques promises sous l’égide de la « mission civilisatrice » accusaient un retard de plus de cent ans. Contrairement à l’idée que « l’Algérie, c’est la France », les États postcoloniaux affirmaient que l’Algérie n’avait jamais fait partie intégrante de la France et citaient régulièrement quelques intellectuels français défendant ces propos. Selon ces États, la colonisation ne conférant pas de droit et la colonisation de l’Algérie n’avait pas transféré de souveraineté vers les Français ; en conséquence, le peuple algérien avait toujours détenu sa souveraineté et ne souhaitait pas vivre sous domination française. Cette volonté d’indépendance s’exprimait de plus en plus clairement avec la résistance sociale à l’armée française. L’intégration de l’Algérie dans la République française, malgré les Algériens, était donc une idée irréelle. La résistance collective défiant les méthodes de l’armée française – que les États pro-algériens comparaient à celles employées par les nazis pendant l’Occupation – autorisait les insurgés à parler au nom du peuple algérien. Ce qui fondait le droit des Algériens à l’autodétermination, selon ce point de vue, était que l’Algérie était « différente » de la France en termes géographiques, raciaux, religieux, langagiers, culturels, voire civilisationnels, et que l’appartenance de l’Algérie à la France n’était qu’une « fiction légale ». La légitimité de l’idée de l’autodétermination algérienne, empêchée par la loi cadre, reposait donc sur une volonté démocratique, sur les droits de l’Homme et sur les différences supposées entre les deux peuples.

Pendant cette étape, deux résolutions ont été adoptées, exprimant ainsi la préoccupation de l’Assemblée générale pour la « situation algérienne » et l’espoir qu’une solution serait trouvée, en conformité avec les principes de la Charte onusienne24. En d’autres termes, l’Organisation ne prenait pas de position politique à cet égard, mais elle exprimait le dilemme politique qui retenait son attention et dont il était question.

Traduction de l’« intraduisible »

Avec la consolidation de deux modèles de la souveraineté qui s’autolégitiment en s’excluant mutuellement, il devenait évident que le différend ne pouvait se résoudre au plan théorique. Or, dès 1958, après la chute de la IVe République et la formation du GPRA, le débat s’est ouvert sur de nouvelles perspectives où un langage commun pouvait se produire. Peu à peu, ce débat a glissé de la question des principes (qui réclame la souveraineté sur des bases légitimes ?) vers une problématique pragmatique (qui peut maintenir l’ordre ?). Deux nouvelles positions ont ainsi été produites avec la traduction de deux différents modèles de la souveraineté.

L’argument pro-français s’est essentiellement transformé en une position attentiste. Ses alliés ont affirmé que, pour résoudre ce problème, il ne fallait compter que sur la France, sur sa prudence et son amour pour la justice. Ces États soulignaient d’ailleurs que le Président du Conseil des ministres, Charles de Gaulle, se disait favorable à l’idée de négociations avec les leaders des insurgés, leur proposant d’aller à Paris afin de conclure la « paix des braves » en octobre 1958. Les États pro-français montraient aussi que la France continuait à faire des efforts féconds, notamment avec le référendum sur la nouvelle Constitution (en septembre 1958) ou avec les élections législatives de novembre 1958 auxquelles les Musulmans d’Algérie ont participé. À partir de la reconnaissance par de Gaulle du droit des Algériens à l’autodétermination (prononcé en septembre 1959), le débat au sein de l’ONU perdait tout son sens. C’était donc aux insurgés d’accepter la proposition offerte par la France et d’ainsi mettre fin aux hostilités. En outre, ces États mentionnaient que l’ONU n’était pas autorisée à orienter le conflit vers une fin imposée préalablement, puisqu’elle n’était pas en mesure de conférer la souveraineté. À ces raisons s’ajoutaient des arguments théoriques (déconnectés du niveau pragmatique), l’affaire étant essentiellement française et donc hors des compétences de l’ONU. De plus, le GPRA, formé sans élections en Tunisie, ne pouvait pas être considéré comme un gouvernement légitime. Le groupe pro-français arguait qu’en reconnaissant les demandes des insurgés algériens, l’ONU encouragerait les groupes sécessionnistes du monde à recourir à la force pour atteindre leur but. En bref, ces États affirmaient qu’une attitude modérée était la plus adéquate à la résolution du problème, et qu’il ne restait donc qu’à attendre.

Par contraste, la position pro-algérienne était construite sur l’idée d’une illégitimité croissante et sur l’incompétence apparente de l’État français dans l’affaire algérienne. Elle soutenait que la France ne pouvait pas contrôler la situation en Algérie sans violer les fondements du droit ; en attestaient notamment le bombardement aérien du village tunisien de Sakiet Sidi Youssef (en février 1958) ou la violation régulière de l’espace aérien de la Libye. Les États pro-algériens rappelaient que l’armée française, de quelque 800 000 combattants, assistait en Algérie à l’organisation des élections législatives prétendues libres freinant ainsi les libertés fondamentales. La France semblait remplacer les régimes libéraux par une variante de l’autoritarisme. Face à l’illégitimité et l’incompétence de la France, les États pro-algériens désignaient le FLN, et plus précisément le GPRA, comme l’organisation de facto dirigeante de l’Algérie, disposant d’une légitimité non-juridique mais politique et historique. Avec l’appui apparent de la société algérienne, affirmaient-ils, le FLN avait réussi à résister pendant des années à l’une des armées les plus modernes du monde, malgré les conditions qui lui étaient extrêmement défavorables. Ces États affirmaient aussi que le GPRA et les Algériens en général étaient à juste titre méfiants vis-à-vis des propositions du gouvernement et du président français. L’idée de faire la « paix des braves » à Paris, par exemple, semblait douteuse puisque des leaders algériens étaient encore emprisonnés dans la capitale. De même, l’idée d’une « autodétermination » des Algériens ne semblait pas incontestable car sa réalisation n’était pas fixée préalablement ; elle pouvait possiblement déboucher sur le partage territorial et social de l’Algérie entre l’Algérie indépendante et l’Algérie française ; et surtout, elle devait être encore confirmée par les Français de la métropole. Le GPRA, prêt à négocier, était, dans une certaine mesure, analogue au gouvernement de la France libre pendant l’Occupation, et plusieurs États le regardaient comme le représentant légitime du peuple algérien. La responsabilité du blocage dans le conflit et de la catastrophe humanitaire pouvait être imputée à la France, puisque cette dernière s’opposait à la tendance inexorable de l’histoire vers la liberté.

C’est à travers des métaphores et des analogies historiques que le langage commun du maintien de l’ordre a pu se déployer. Cette « traduction » de positions de principes en arguments pragmatiques a permis d’établir une position définitive par rapport à la question algérienne, notamment avec l’appui majoritaire des États pro-algériens et l’abstention de la minorité pro-française25, sans pour autant que leur position théorique ne change concernant la souveraineté en général.

La transformation de la souveraineté mise en évidence à travers le différend

À partir de cette présentation lyotardienne du débat, il semble que l’on puisse, de façon analytique, identifier deux moments clairs de transformation du concept de souveraineté. Le premier est celui où la souveraineté de l’État-nation occidental est explicitement remise en question avec la formulation du différend. Le second se dessine quand, malgré un dissensus total par rapport à la question de souveraineté en général, l’ONU prend une position politique concernant la question algérienne – décision qui ne remplace toutefois pas entièrement le modèle souverainiste.

La formulation du différend atteste de l’absence d’une « règle de jugement » unique concernant les fondations du pouvoir légitime contemporain. À partir du moment où les États pro-algériens ont réussi à affirmer la compétence de l’ONU dans la question algérienne, ils ont remis explicitement en cause le modèle souverainiste. En termes lyotardiens, ces États ont pu formuler le tort dont souffrait le peuple algérien (dépouillé ici de sa propre voix), ce tort étant la performance ordinaire de la souveraineté de l’État-nation occidental. De plus, ce qui est peut-être plus important, ils l’ont fait en mobilisant un modèle alternatif que l’on peut nommer postcolonial. Ils ont ainsi mis en œuvre, semble-t-il, une pratique politique de type révolutionnaire consistant à imposer sa propre interprétation de la souveraineté contre l’interprétation dominante de l’État-nation. Cette pratique témoigne du surgissement d’un nouveau sujet politique correspondant aux sociétés postcoloniales qui contestent le monopole des sociétés occidentales dans la question de l’interprétation de la souveraineté.

Le moment où cette contestation du modèle souverainiste s’est accomplie correspond à celui où – selon les termes d’Étienne Balibar – les deux langues différentes se sont traduites en un langage commun et où un accord est devenu possible, avec l’adoption d’une résolution concernant la question algérienne. Cependant, si l’on prend en compte les conditions de son adoption par une majorité simple, cette résolution ne témoignait pas du tout du surgissement d’une nouvelle certitude concernant les fondations du pouvoir légitime. Bien au contraire, elle démontrait plutôt qu’une telle certitude n’existait plus. Elle mettait en évidence « l’incrédulité à l’égard d[u] métarécit » de la souveraineté de l’État-nation occidental26, ou en d’autres termes, l’échec du récit émancipateur universel du citoyen. On n’observait pas l’émergence d’un nouveau modèle de monopole remplaçant le modèle colonial. La perspective s’ouvrait plutôt sur la possibilité de reformuler le concept de souveraineté dans chaque configuration historico-politique.

À cet égard, il apparaît nécessaire, pour finir, de porter notre attention sur le concept de différence, qui constituait un autre fondement sur lequel le parti pro-algérien réclamait la souveraineté pour le peuple algérien. Cette différence était entendue en termes de langue, de culture, de race, de géographie et de civilisation, donnant un contenu plus concret et certain à la forme abstraite et indéterminée de la citoyenneté politique, dont le concept fut introduit par la Révolution française. Le fait que le groupe représentant le colonisé militait pour l’application de certains principes à la fois en raison de leur universalisme supposé et en raison de la présence d’une différence « naturelle » supposée, pose bien des questions. Celles-ci concernent le lien précis entre le modèle postcolonial et les principes de la Révolution sur lesquels ce modèle dit s’appuyer, à savoir : dans quelle mesure ce modèle postcolonial est-il encore conforme aux principes de la Révolution ? Peut-on regarder ce modèle comme une reconfiguration de ces principes indéterminés dans un contexte historico-politique précis, accomplissant le but de la Révolution, ou s’en démarque-t-il radicalement ? S’il s’agit d’un écart, marque-t-il un retour conceptuel au « paradigme » prémoderne, fondé sur les croyances religieuses et les structures sociales ethnicisées, ou propose-t-il une perspective sur une nouvelle configuration politique jamais vue auparavant ?

Nous proposons ici de formuler ces questions conceptuelles sans essayer d’y répondre, car ce modèle postcolonial, comme nous l’avons indiqué, n’a jamais été présenté dans la forme d’un paradigme théorique développé, et est donc resté, au moins dans ce débat, assez « sous-théorisé ». Or, les arguments évasifs et parfois contradictoires qui ont été esquissés pendant ce débat semblent avoir trouvé écho hors de l’ONU, notamment chez les intellectuels français contemporains. Par exemple, Lyotard a fait la critique de la « gauche » française, toujours entre guillemets, parce qu’elle n’avait pas vu dans l’insurrection algérienne le potentiel anti-capitaliste d’abord, et ensuite, parce qu’elle avait défendu sans critique le FLN malgré son nationalisme et son conservatisme social. Or, Lyotard lui-même n’échappait pas au dilemme qui se produisait pour lui entre le « diagnostic » et la « pratique ». Il s’en confessait ainsi en 1989 :

« Il m’est arrivé comme à beaucoup ... de “soutenir” pratiquement des militants du FLN en France alors même que je faisais la critique théorique de leur organisation dans la revue [Socialisme ou barbarie]. Je n’éprouvais pas le besoin d’ajuster le diagnostic à ma pratique, ni l’envie de renoncer à celle-ci à cause de celui-là. Il est juste, nous disions-nous, que les Algériens imposent au monde que leur nom soit proclamé ; il est indispensable de critiquer la nature de classe de la société indépendante que leur combat prépare. Ce différend intime devait rester irrésolu... 27 »

Ce différend était, en quelque sorte, partagé par d’autres intellectuels français de l’époque. La question de l’analyse de ce qui se passait en Algérie, et la pratique qu’une telle interprétation impliquait, incitait une pluralité de réponses de la part des intellectuels. Pour ne mentionner que quelques exemples, Jacques Derrida et Albert Camus ont décidé de rester silencieux sur cette question. Frantz Fanon et Jean-Paul Sartre ont, quant à eux, farouchement milité pour l’indépendance algérienne et ont théorisé l’importance historique du FLN dans la lutte anticapitaliste. Raymond Aron, de son côté, a défendu la cause de l’indépendance sur des bases de calculs économiques et démographiques, tandis que Pierre Vidal-Naquet a mis l’accent, en dreyfusard, sur la lutte contre la torture dans la République, contournant, pour sa part, tout le différend.

Dans le même temps, l’insurrection hongroise et sa répression soviétique en 1956 ont encore compliqué le tableau, ouvrant sur ce que Vidal-Naquet a appelé « une crise idéologique28 ». Les prismes d’interprétation proposés par certains intellectuels, notamment ceux qui sont cités ci-dessus, ont alors offert des concepts, des théories et des approches bien plus élaborées que le modèle postcolonial présenté au sein de l’ONU. En s’appuyant sur ces prismes, on peut sans doute mieux aborder la transformation conceptuelle que la pensée a subie concernant les principes fondateurs du pouvoir légitime. Pour ce faire, il faudrait toutefois esquisser le paysage des réponses que les intellectuels français contemporains ont apportées à la question algérienne. Ceci peut faire l’objet d’une autre recherche.

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1

Résolution 1573 (XV), adoptée pendant la séance 956 de l’Assemblée générale, le 19 décembre 1960.

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2

Il s’agit de l’Assemblée générale (séances 518, 521–523, 525–533, 548 en 1955 ; séances 578, 581, 589, 590, 597–603, 610, 611, 654, 655 en 1956–1957 ; séances 681–683, 687, 688, 690–692, 694, 697–703, 726 en 1957 ; séances 750–752, 755–757, 759–764, 766, 769, 771, 772, 774, 792 en 1958 ; séances 797, 798, 804–812, 814–818, 820, 821, 823, 852, 854–856 en 1959 ; séances 868, 869, 871–873, 876-880, 882, 883, 885–888, 890, 892, 896, 897, 901, 904, 906, 956 en 1960), du Bureau (séance 103 en 1955 ; séances 107, 108 en 1956 ; séance 111 en 1957 ; séance 117 en 1958 ; séance 121 en 1959 ; séance 127 en 1960), et de la Première commission (séances 794, 795, 802 en 1955 ; séances 830–846 en 1957 ; séances 913–926 encore en 1957 ; séances 1014–1023 en 1958 ; séances 1067–1078 en 1959 ; séances 1121–1133 en 1960).

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3

Jean-François Lyotard, Le différend, Paris, Éditions de Minuit, 1983.

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4

Étienne Balibar, « Politique et traduction : réflexions à partir de Lyotard, Derrida, Said », REVUE Asylon(s), 7, 2009-2010, Que veut dire traduire ?.

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5

Jean-François Lyotard, La Guerre des Algériens. Écrits 1956–1963, Paris, Éditions Galilée, 1989.

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6

Jean-François Lyotard, La Guerre des Algériens. Écrits 1956–1963, Paris, Éditions Galilée, 1989, p. 39.

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7

Voir par exemple : Georges Van Den Abbeele, « “Algérie intraitable” : Lyotard’s National Front », L'Esprit Créateur, t. 31, no 1, 1991, p. 144–157. James Williams, Lyotard and the Political, Londres, Routledge, 2000, particulièrement p. 9-13. Jane Hiddleston, « Lyotard's Algeria: Experiments in Theory », Paragraph, t. 33, no 1, 2010, p. 52–69.

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8

Les termes de la chanson que j’ai choisis en épigraphe, « Keep on a-walkin’ / keep on a-talkin’ / Gonna build a brand new world », décrivent une telle opération à la fois réthorique et politique.

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9

L’idée évoqué par l’ambassadeur syrien (séance 525 de l’Assemblée générale, le 27 septembre 1955), l’ambassadeur afghan (séance 530 de l’Assemblée générale, 30 September 1955), l’ambassadeur syrien (séance 831 de la Première commission, le 4 février 1957), l’ambassadeur roumain (séance 841 de la Première commission, le 11 février 1957), l’ambassadeur tchécoslovaque (séance 920 de la Première commission, 4 décembre 1957), l’ambassadeur soudanais (séance 921 de la Première commission, 4 décembre 1957), l’ambassadeur tunisien (séance 760 de l’Assmeblée générale, le 25 septembre 1958), l’ambassadeur marocain (séance 772 de l’Assmeblée générale, le 6 octobre 1958), l’ambassadeur tunisien (séance 1067 de la Première commission, le 30 novembre 1959), l’ambassadeur cubain (séance 1071 de la Première commission, le 3 décembre 1959), l’ambassadeur irakien  (séance 1072 de la Première commission, le 3 décembre 1959), l’ambassadeur vénézuélien (séance 1074 de la Première commission, le 4 décembre 1959), l’ambassadeur éthiopien (séance 1076 de la Première commission, le 5 décembre 1959).

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10

Jean-François Lyotard, Le Différend, Paris, Éditions de Minuit, 1983, p. 24.

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11

Résolution 1012 (XI), séance 654 de l’Assemblée générale, le 15 février 1957 et Résolution 1184 (XII), séance 726 de l’Assemblée générale, le 10 décembre 1957.

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12

Voir Raymond Aron, La Tragédie algérienne, Paris, Plon, 1957.

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13

Étienne Balibar, « Politique et traduction : réflexions à partir de Lyotard, Derrida, Said », REVUE Asylon(s), no 7, 2009–2010, Que veut dire traduire ?

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14

Séance 956 de l’Assemblée générale, le 19 décembre 1960, par 63 voix, contre 8, avec 27 abstentions.

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15

A/2924, le 29 juillet 1955. Lybie a rejoint l’initiative avec un mois de retard : A/2924/Add.1, le 9 août 1955.

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16

Séance 103 du Bureau, le 22 septembre 1955, par 8 voix, contre 5, avec 2 abstentions.

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17

Entre la séance 518 de l’Assemblée générale, le 22 septembre et la séance 530 de l’Assemblée générale, le 30 septembre 1955.

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18

Séance 530 de l’Assemblée générale, le 30 septembre 1955, par 28 voix, contre 27, avec 5 abstentions.

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19

Séance 531 de l’Assemblée générale, le 3 octobre 1955.

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20

Cette proposition avait été faite par le délégué de l’Inde, Vengalil Krishna Menon lors de la séance 795 de la Première commission le 25 novembre 1955, gagnant la soutenance des délégués d’autres États pro-algériens. Il est probable que l’idée sous-jacente visait à attendre le retour de la France dont la manque paralysait effectivement les mécanismes de décision au sein de l’ONU, tandis qu’une volonté d’appeler une conférence pour revoir la Charte s’articulait de la part des États au passé colonial (voir les séances 542–547 de l’Assemblée générale).

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21

Séance 549 de l’Assemblée générale, le 29 novembre 1955.

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22

Séance 111 du Bureau, le 18 septembre 1957. Pendant la session de 1956, la stratégie française semblait s’appuyer plutôt sur l’idée double de « contre-attaque » et de « défense ». Le délégué français, Christian Pineau a accusé certains États, notamment l’Égypte, l’URSS, la Libye, le Maroc et la Tunisie, d’être intervenus dans l’affaire algérienne (c’est-à-dire, dans une affaire française interne) par la diffusion des armes et l’entraînement des insurgés ; en même temps, il a répondu aux charges contre la France (voir notamment la séance 589 de l’Assemblée générale le 22 novembre 1956, et les séances 830 et 831 de la Première commission, le 4 février 1957). Sa contre-attaque n’a vraiment pas pris un écho considérable, mais ses arguments à la défense de la France ont été repris et répétés par d’autres États pro-français.

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23

Le gouvernement Mollet, le 9 janvier 1957.

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24

Résolution 1012 (XI), séance 654 de l’Assemblée générale, le 15 février 1957 et Résolution 1184 (XII), séance 726 de l’Assemblée générale, le 10 décembre 1957.

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25

Résolution 1573 (XV), séance 956 de l’Assemblée générale, le 19 décembre 1960, par 63 voix, contre 8, avec 27 abstentions. Avec l’exception de l’Union sud-africaine et Portugal, les États contre, qui n’ont joint l’ONU qu’en 1960 (Haute-Volta, Cameroun, Tchad, Gabon, Côte-d'Ivoire, Madagascar), ont voté ainsi parce qu’ils ont proposé une autre résolution soutenant l’autodétermination algérienne, qui pourtant n’a pas profité de la soutenance des autres États qui ont plus longtemps milité pour la cause algérienne.

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26

Jean-Francois Lyotard, La Condition postmoderne : Rapport sur le savoir, Paris, Éditions de Minuit, 1979, p. 7.

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27

Jean-François Lyotard, La Guerre des Algériens. Écrits 1956–1963, Paris, Éditions Galilée, 1989, p. 36. Italique dans la version originale.

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28

Pierre Vidal-Naquet, Face à la raison d’État. Un historien dans la guerre d’Algérie, Paris, La Découverte, 1989, p. 12.