C’est à l’ère Meiji, à partir de 1868, que le Japon s’ouvre aux techniques et aux savoirs venus d’Europe et des États-Unis. Dès lors, la façon dont les Japonais se représentent leur place parmi les nations ne cesse d’évoluer, de même que leur vision des peuples soumis à leur autorité et celle des minorités de la société nippone. Ce qui vacille, c’est la perception de l’autre et de soi-même.
Ainsi, les manuels scolaires de géographie de l’ère Meiji montrent une construction progressive de l’idée de race, importée d’Occident, où les Japonais s’attribuent peu à peu la première place au sein des peuples d’Asie. Quant à l’histoire des Burakumin, minorité urbaine issue des classes les plus défavorisées, elle fait alors l’objet d’une nouvelle lecture, biologique et racialisante. À la fin du XIXe siècle, l’Asie toute entière, en partie soumise à la colonisation européenne, entre dans un processus d’évaluation de ses propres cultures face aux cultures occidentales. Entre 1880 et 1919, des intellectuels japonais et indiens forgent une idée de l’universalisme rivale de celle que propage l’Occident, jugée trop favorable aux intérêts économiques et coloniaux de ce dernier. Parallèlement, le droit des étrangers, en particulier le droit des mariages mixtes, ne cessent d’évoluer jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, reflétant un durcissement de ce que l’État japonais considère comme l’identité nationale et les droits qui lui sont attachés.
À travers cinq textes écrits par des chercheurs japonais, l’atelier « Race et civilisation au Japon » apporte des éclairages complémentaires sur la question de la race, de l’universalisme et de la perception de l’autre dans le Japon moderne.
Atelier coordonné par Yasuko Takezawa et
Jean-Frédéric Schaub