L’acte alimentaire est sorti d’un certain « allant de soi ». Autrefois encadré par la morale religieuse, l’institution familiale et les règles diététiques, cet acte intime et quotidien, d’apparence ordinaire et longuement perçu comme futile aux yeux des sciences sociales, devient éminemment politique : il est désormais nourri d’attentes et de revendications aussi diverses que celles de manger à sa faim, d’optimiser sa santé, de protéger l’environnement, de court-circuiter l’industrie agro-alimentaire ou de réduire la souffrance animale. Se dessinent ainsi des choix de société hétéroclites où les innovations techno-scientifiques côtoient l’appel à la tradition, où des politiques publiques se déploient en même temps qu’émergent de nouveaux mouvements sociaux. L’alimentation peut-elle réintégrer les communs ?
Cet atelier vise à documenter des réflexions ou des expérimentations qui envisagent d’autres possibles, de la fourche à la fourchette, et qui seront ici saisies par des enquêtes de sciences sociales. L’objectif est de mieux comprendre en quoi produire, consommer et manger constituent des actes politiques qui peuvent mettre en germe des utopies concrètes. Partant de la formule lévi-straussienne classique selon laquelle une nourriture, pour être bonne à manger doit d’abord être bonne à penser, il s’agira dans une démarche critique et réflexive d’extraire l’alimentation d’une posture essentialiste pour se concentrer sur ses aspects politiques, pour mettre en regard les dimensions nourricières qui restent à son fondement et les multiples enjeux dont elle est désormais porteuse.
Atelier coordonné par Tristan Fournier