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L’enseignement de l’histoire du communisme à l’Est
Postdoctorante

(Institut de Recherches de l’Université Bucarest (ICUB))

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La Classe morte de Tadeusz Kantor.

Romano Martinis, La Classe morte de Tadeusz Kantor (1975)

L’enseignement de l’histoire a subi des transformations majeures depuis 1989 et la chute du communisme dans l’ensemble de la région. Liées surtout à la nécessité de désidéologiser cette discipline, elles répondent aussi à une redéfinition des objectifs éducatifs en accord avec les nouveaux désidératas politiques1. Parmi ceux-ci, l’entrée dans l’Union européenne (UE) reste le plus important faisant consensus chez des acteurs ne partageant pas les mêmes vues sur les fonctions de l’histoire. Quelques dates constituent des points de repères utiles. En 1995, puis en 2002, plusieurs manifestations éclatent à Chişinău, au sujet de l’enseignement de l’histoire contemporaine. L’intensité des mobilisations est telle que le gouvernement moldave appelle à l’intervention du Conseil de l’Europe pour mettre un terme à la crise politique2. En 2008, le premier manuel scolaire d’Europe Centrale de l’Est à être dédié exclusivement à l’histoire du communisme est publié en Roumanie3. Le 17 janvier 2018, un an avant les élections européennes, la Bulgarie adopte un nouveau programme d’histoire contemporaine4. Son objectif est d’offrir aux élèves de secondaire un enseignement qui mette en lumière la nature foncièrement « totalitaire » de l’ancien régime5.

Outil clé pour former les jeunes générations dans un nouvel « esprit démocratique » ou pour redéfinir l’identité nationale, l’enseignement de l’histoire du communisme navigue depuis trente ans entre des finalités qui plus d’une fois se sont avérées irréconciliables. Cet article revient sur cette trajectoire mouvementée dans trois pays : la Bulgarie, la Roumanie et la République de Moldavie. Moins étudiés que d’autres États d’Europe qui ont connu des régimes socialistes, ces trois pays offrent un terrain riche pour analyser dans une perspective comparative la transformation des politiques éducatives aux confins de l’UE. Contrairement aux études qui se concentrent sur des cas nationaux et les transferts Ouest-Est en matière de politiques éducatives6, cet article se propose d’étendre l’analyse aux influences et échanges régionaux. Quel est le rôle des réseaux transnationaux dans l’élaboration des programmes d’enseignement de l’histoire similaires dans ces trois pays ? S’agit-il seulement d’une histoire similaire ou d’une stratégie commune pour marquer son appartenance à l’Europe ? Quelles relations entretiennent les réseaux est-européens avec les acteurs et les organisations de l’Ouest du continent ?

« Nous ne pensons pas ! »

« Nous ne pensons pas ! », illustration réalisée par l’élève Alexandru Steleac

pour le concours d’arts plastiques « Élève durant le communisme »,

organisé par l’IICCMER en 2009.

Changement de régime et décommunisation des politiques éducatives

Le système d’éducation est l’un des premiers domaines où la transformation postcommuniste se fait sentir. Commune à l’ensemble de la région, la réforme repose sur le passage d’un « modèle soviétique d’éducation communiste » à un « modèle d’éducation démocratique » ; ses temporalités et modes d’accomplissement sont néanmoins distincts et débouchent sur des « multiples modèles éducatifs nationaux historiquement constitués au travers de rapports de force et de conflits d’intérêts, idéologiques et politiques »7. Les changements qui affectent le système éducatif dans son ensemble ont une incidence toute particulière sur l’enseignement de l’histoire, de par sa place centrale dans l’ancien système de propagande communiste.

Soumis à une forte politique de révision après 1989, la réécriture des manuels scolaires traverse quant à elle trois phases8. La première est celle de la « désidéologisation », du remplacement d’une grille de lecture marxiste et ethnocentrique par une perspective plus comparative et relativiste. C’est un moment de ré-enchantement de la nation et de « retour à l’Europe » après la période d’« occupation soviétique » et, selon certains chercheurs, de « ré-idéologisation inversée de l’histoire »9. Cette tendance se manifeste par des représentations de la nation dans les manuels scolaires comme un groupe ethnique homogène sans égards pour la diversité des minorités nationales pourtant nombreuses dans les trois pays10.

La question est particulièrement épineuse en République de Moldavie qui se trouve dans un moment de construction nationale après avoir accédé à l’indépendance en 199111. Participant à cette entreprise de clarification identitaire, l’historiographie, appelée à trancher entre « un héritage culturel roumain et une longue expérience historique russe »12, est très politisée. Dans un contexte de renaissance du Parti communiste (PCRM)13 proche de Moscou, le champ historien est divisé entre un courant « roumaniste » majoritaire – qui considère les Moldaves comme des Roumains à part entière et se positionne en faveur de l’union avec la Roumanie – et un courant « moldovéniste » plaidant pour l’indépendance du peuple moldave, regardé comme le produit d’une histoire spécifique14. L’évaluation de la période communiste et des relations avec la Russie et la Roumanie est au cœur des conflits d’interprétation. Opposant les professeurs et étudiants favorables au courant « roumaniste » au gouvernement loyal à la cause « moldovéniste », les manifestations qui éclatent en 1995, puis en 2002-2003, à propos de la réforme de l’enseignement de l’histoire, polarisent les débats. L’appel à des instances extérieures, comme le Conseil de l’Europe et l’Institut « Georg Eckert », pour apaiser les tensions témoigne de la difficulté à trouver un consensus au niveau national15.

La deuxième étape de transformation de l’enseignement de l’histoire après 1989 s’ouvre avec la libéralisation du marché des manuels scolaires. L’enseignement de l’histoire devient l’affaire d’acteurs extérieurs à l’État et au champ académique, telles les maisons d’édition ou les experts en pédagogie, qui se joignent aux équipes d’auteurs formées traditionnellement par les professeurs universitaires16. Avec l’apparition des premières chaînes de télévision privées et la multiplication des journaux, l’histoire devient un sujet de débat public.

En Roumanie, un scandale éclate lors de l’apparition des premiers manuels alternatifs en 199917, qui « détruit le monopole de la narration nationale unique » sur ce passé contrôlé par l’État18. Ce moment de forte publicisation des thématiques concernant la période communiste encourage, selon Monica Ciobanu, l’émergence d’une « pensée critique parmi les étudiants » et les universitaires19. En même temps ce scandale permet aux revendications mémorielles des anciens détenus politiques de devenir audibles et, le temps venu, d’être incorporées aux nouveaux manuels. Des débats similaires se développent en Bulgarie en 2019, après la révision des manuels suite à l’adoption d’un nouveau programme d’histoire par le Parti des Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (GERB) de centre-droit, en 2018. Ils mettent aux prises les militants pour une histoire anticommuniste de l’ancien régime, proches du gouvernement en place, qui s’expriment en faveur de l’intervention de l’État pour orienter les contenus des manuels, aux auteurs revendiquant, au-delà du paradigme totalitaire, leur liberté académique et le pluralisme des approches dans l’étude de la période communiste20.

L’enseignement de l’histoire fonctionne ainsi pour certains acteurs comme un substitut à une « justice de transition » qui a échoué à produire toujours les résultats escomptés (renouvellement de la classe politique au sommet de l’État21, restitution des biens confisqués, etc.)22. En effet, après 1989, les trois pays expérimentent souvent sans succès plusieurs dispositifs de gestion du passé allant des procès contre les anciens tortionnaires staliniens et les responsables d’abus et des crimes23 aux lois de lustration24, de l’accès aux archives des anciennes polices politiques25 aux déclarations symboliques de condamnation de l’ancien régime par les autorités26. Lors de l’adoption de ces mesures, les historiens sont des partenaires essentiels pour les acteurs politiques comme pour les victimes du communisme ; leurs travaux sont mobilisés par les magistrats. Leur magistère sur la scène publique s’en trouve renforcé, ce qui confère à l’histoire et à son enseignement le pouvoir non seulement d’interpréter mais de trancher sur les enjeux liés au passé. Dans un contexte de perpétuation des anciens communistes au pouvoir – comme c’est le cas dans les trois pays de la région –, porter un discours de vérité sur le passé c’est être au cœur des enjeux politiques du présent. Les questions liées à la légitimité du personnel politique, à la corruption des élites (dont le système communiste et ses acolytes sont tenus pour les principaux responsables) et à la réforme de l’État postcommuniste27 deviennent des problèmes qui demandent leur expertise.

La troisième étape qui caractérise l’évolution des politiques éducatives après 1989 est marquée par le souci d’enseigner le passé communiste autant que par la contribution de l’histoire et de son enseignement à la légitimation du nouveau régime « démocratique ». Candidates à l’intégration, la Bulgarie et la Roumanie font des efforts particuliers pour répondre aux exigences de l’UE concernant la transmission des valeurs communautaires et la formation d’un « citoyen européen »28. Dans l’ensemble de la région, les experts en éducation insistent désormais sur le rôle formateur des valeurs comme le « respect des droits de l’Homme », l’« inclusion » et la « non-discrimination sur des critères d’appartenance ethnique, raciale, sexuelle, politique ou religieuse »29. Cette étape correspond aussi à l’intégration de nouvelles méthodologies comme la multiperspectivité30, l’interactivité, l’appel aux illustrations. L’ouverture des archives et les progrès réalisés par l’historiographie mènent à une diversification des interprétations31 exposées dans les manuels à travers la présentation d’une variété de sources. Pour ce qui est du traitement de la période communiste, ces transformations débouchent sur un double mouvement : d’un côté, elles conduisent au déplacement de l’attention des crimes du communisme vers d’autres groupes (les femmes, les minorités nationales) et aspects de l’ancien régime (la vie quotidienne et culturelle, les rapport entre économie et idéologie)32 ; d’un autre côté, l’admission de la Roumanie et de la Bulgarie dans l’UE (2007) débouche sur l’investissement des réseaux interrégionaux constitués autour de la reconnaissance de la mémoire des victimes du communisme qui prennent leur essor à partir de 2008-200933. Pendant cette étape, les organisations internationales (le Conseil de l’Europe, EuroClio, etc.) deviennent des leviers d’action essentiels pour les experts locaux et les institutions locales – dont l’Institut d’investigation des crimes du communisme et la mémoire de l’exil roumain (IICCMER) ou l’ONG bulgare Sofia Platform.

Les rénovateurs de l’enseignement de l’histoire. Stratégies d’internationalisation et ancrages locaux

En général œuvre du gouvernement, la rénovation des politiques d’enseignement de l’histoire peut émaner, après 1989, de différents groupes extérieurs aux autorités politiques : historiens, intellectuels et experts dans le domaine de l’éducation, associations de professeurs ou de pédagogues, ONG, fondations, maisons d’édition. En fonction des ressources qu’ils possèdent – expertise, contacts politiques et dans la presse, prestige –, ces acteurs développent différentes stratégies pour influencer les politiques éducatives. Certains visent une réforme de l’enseignement « par le haut », via le renouvellement des curricula et l’écriture de nouveaux manuels scolaires. Ceux qui agissent avec succès dans ce sens, le font par l’intermédiaire de solides ancrages locaux, aussi bien politiques que médiatiques. L’État représente un levier important afin d’inscrire le changement dans la durée. Une autre stratégie pour rénover les politiques éducatives est l’action « par le bas », qui se traduit par la mise en œuvre de projets et de méthodes « alternatives » : visites mémorielles, concours, expositions, cours auxiliaires pour les élèves et pour les professeurs de secondaire, écoles d’été. Elle repose pour l’essentiel sur la relation aux professionnels et acteurs de terrain – professeurs de secondaire, élèves, autorités locales –, même si le consentement du ministère de l’Éducation reste une condition sine qua non pour la réussite de ces projets. Ce second mode d’action trouve le plus souvent son inspiration en dehors des frontières nationales, dans les modèles éducatifs expérimentés ailleurs en Europe, et elle est liée à la recherche de financements, de conseils et d’expertise dans le domaine éducatif auprès des organisations étrangères.

Les initiatives concernant la rénovation de l’enseignement de l’histoire du communisme émanent surtout de trois groupes d’acteurs. Un premier groupe est constitué des anciens dissidents du régime communiste qui militent après 1989 dans les nouveaux partis démocratiques ou dans différentes ONG de la « société civile », et échouent à se convertir à la politique. Ils continuent néanmoins à se mobiliser pour la condamnation pénale ou symbolique du régime communiste et, sous cet angle, l’enseignement de l’histoire représente une dimension parmi d’autres du travail militant. Ce sont eux qui font le plus souvent appel à la première stratégie d’intervention dans le domaine éducatif, en mettant à profit une notoriété acquise avant la chute du régime, des contacts et des relations dans les milieux politiques et journalistiques, ou des rapports de proximité avec le gouvernement. La trajectoire biographique de l’historienne bulgare Evelyna Kelbetcheva est représentative de ce premier ensemble d’acteurs.

Evelyna Kelbetcheva, de la dissidence au militantisme historique34

 

Née dans une famille d’intellectuels qui refusent l’enrôlement dans le Parti communiste bulgare (KPB), Kelbetcheva commence à fréquenter les cercles dissidents de Sofia dans les années 1980, après qu’on lui ait interdit de poursuivre une carrière universitaire. Membre de l’Union des forces démocratiques (SDS), formation anticommuniste qui milite en faveur du passage à l’économie de marché, Evelyna Kelbetcheva émigre aux États-Unis suite à son échec aux premières élections libres. Après avoir enseigné l’histoire culturelle de l’Europe de l’Est à l’Université Irvine, en Californie, elle revient en Bulgarie vers 1996. Professeure à l’Université Américaine de Bulgarie, elle s’engage pour l’étude du « régime totalitaire » communiste dans l’enseignement secondaire et lance en 2014 une pétition qui bénéficie du soutien de plusieurs hommes politiques et personnalités publiques bulgares35. Il faut cependant attendre 2018 pour que le gouvernement donne satisfaction à ses revendications. La clef de ce succès consiste dans les relations nouées par Kelbetcheva au sein du GERB et des médias bulgares. En 2016, avec le journaliste d’investigation Hristo Hristov, spécialisé dans le dévoilement des « secrets » bien gardés de l’ancien régime comme les liens que certains hommes politiques ont entretenu avec la police politique communiste36, Kelbetcheva crée la Fondation « Vérité et Mémoire »37. La Fondation est impliquée dans l’adoption d’un nouveau programme d’histoire pour le secondaire par le ministère de l’Éducation en janvier 2018, qui prévoit une étude extensive du régime communiste au cours de la 10e année d’enseignement et la réécriture des manuels scolaires.

Un deuxième groupe est formé par de jeunes experts en début de carrière, en provenance de l’histoire contemporaine et des disciplines connexes (sciences politiques, relations internationales, histoire du Moyen Âge, muséographie). Très souvent, les membres de ce groupe ont obtenu des diplômes universitaires à l’étranger (Allemagne, France, Hongrie, États-Unis) et ont des parcours plus internationalisés que ceux du premier groupe. Maîtrisant plusieurs langues, ils sont familiers des normes et standards internationaux en matière de recherche et d’enseignement, mais aussi des « formation à la démocratie », grâce à leur expérience dans le secteur associatif ou au sein des ONG spécialisées dans les politiques publiques (éducation civique, relations internationales et affaires étrangères, protection des Droits de l’homme).

Tel est le cas de Louisa Slavkova, co-fondatrice et directrice de Sofia Platform qui après des études à l’Université de Köln et une expérience de travail de trois ans au sein de l’Agence fédérale allemande pour l’éducation civique (BPB) de Bonn (2008-2011), revient en Bulgarie pour devenir conseillère du ministre des Affaires étrangères, Nickolay Mladenov du GERB38. À ce poste jusqu’en 2013, Slavkova fonde Sofia Platform, une ONG qui œuvre pour la « démocratisation de la société bulgare » et promeut « la mémoire de la période communiste à travers l’éducation et le dialogue »39. Développant des programmes éducatifs partout en Bulgarie, l’organisation est bien insérée dans les réseaux allemands et américains de promotion de l’éducation civique (BPB, KAS, Hanns Seidel, The American University, The Balkan Trust for Democracy) et collabore avec le Conseil européen des relations internationales au sein duquel Slavkova est directrice de programmes entre 2013 et 2017.

Un troisième groupe réunit les professeurs d’université et du secondaire qui participent à l’élaboration des programmes comme à l’écriture et à l’évaluation des manuels scolaires. Avec des trajectoires moins internationalisées que les membres du deuxième groupe, ils adoptent une stratégie de rénovation qui se concentre sur les aspects pédagogiques dont s’accompagne l’actualisation des contenus : organisation du récit, présentation des thématiques, accessibilité de la narration. En République de Moldavie, l’un de ses représentants les plus importants est Sergiu Musteață, professeur d’histoire à l’Université Ion Creangă de Chişinău, docteur de l’Université de Iaşi (Roumanie), boursier à de nombreuses reprises aux États-Unis et en Europe, au point de devenir un « habitué » de l’Institut « Georg Eckert »40.

Assigner des fonctions à l’enseignement de l’histoire du communisme et réseaux transnationaux

Les acteurs des politiques éducatives attribuent diverses fonctions à l’enseignement de l’histoire du communisme en Europe de l’Est. Il peut être conçu comme un discours au service de la construction nationale, un instrument de condamnation d’un passé autoritaire, et/ou un outil de formation d’un « citoyen européen »41. Plus rarement, les acteurs interviewés se réfèrent à l’histoire du communisme comme à un discours scientifique objectif orienté vers la connaissance du passé, sine ira et studio42 : cette approche strictement savante est en général évoquée pour contester d’autres versions sur l’ancien régime, souvent subordonnées à des objectifs extra-académiques. Le tiraillement de l’histoire du communisme entre ces fonctions montre combien l’interprétation de cette période n’est ni consensuelle ni stabilisée dans ces trois pays. C’est justement parce qu’il s’agit d’un objet très disputé que les acteurs qui s’y intéressent font appel à une large gamme de ressources pour emporter le débat. Parmi celles-ci, les contacts et les réseaux transnationaux s’avèrent d’une importance cruciale.

La conception de l’enseignement de l’histoire contemporaine comme instrument de (re)construction identitaire n’est nulle part plus visible qu’en République de Moldavie. Les historiens définissent leur mission sociale par leur responsabilité dans la construction nationale43 :

« Nous, on est resté en retard. L’instruction historique on la fait à présent, à cause du tsarisme et du communisme. On souhaite donner une base nationale à la conscience étatique. […] Un support national roumain. […] Sain. La politique de scission de la Russie est une “tête de pont” de la politique anti-roumaine. […] On doit former une élite qui ait une identité nationale puisque la compréhension des choses émane de leur connaissance. »44

Quoique le discours national soit lui-même objet de différentes versions en Moldavie, la tendance à la « roumanisation » de la nation domine le champ historien. S’inscrivant dans le contexte de la proclamation d’indépendance de la Moldavie par rapport à Moscou, la mise en avant de cette appartenance culturelle a de nettes visées politiques : il s’agit tant d’endiguer l’influence de la Russie sur les affaires internes que de limiter celle du PCRM, pro-russe, sur la vie politique locale. Comme le rappelle l’historien Stefan Ihrig, le résultat de ces actions reste mitigé et ne pèse pas sur l’issue des élections45. En revanche, les vastes mobilisations en faveur de l’enseignement de l’histoire des Roumains (et non de la Moldavie) fonctionnent comme un moyen de pression efficace sur le gouvernement, permettant de régler certaines revendications syndicales concernant le statut des professeurs d’histoire et les conditions matérielles d’exercice de leur métier46.

Le cours d’histoire des Roumains enseigné séparément de l’histoire universelle, reste la norme jusqu’en 2003, dans l’enseignement secondaire comme dans le supérieur. À partir de cette date, la donne change et le gouvernement introduit un cours d’« histoire intégrée » à titre expérimental dans les écoles47. Les manuels d’histoire sont réécrits dans l’esprit de la légitimation d’une nation moldave distincte de celle  roumaine, avant qu’un nouveau paradigme émerge autour de la multiethnicité de l’État moldave48. En 2010, suite aux mobilisations des historiens et aux rapports dissuasifs des experts internationaux49, les deux cours antérieurs sont réunis dans un tronc commun, l’« Histoire des Roumains et universelle »50. L’enseignement de l’histoire du communisme est particulièrement vulnérable à ces fluctuations puisqu’il touche à la question de l’appartenance de la Moldavie à l’Union soviétique ou à la Roumanie, aux effets de cette appartenance sur l’avenir politique des citoyens moldaves et à la manière dont le pays se place sur la scène internationale.

L’Histoire des Roumains et universelle. Manuel pour la XIIe classe, Chişinău, Cartier, 2013

 

Comme le titre l’indique, ce nouveau manuel approuvé en 2013 par le Ministère de l’Éducation, construit une narration historique qui réfère l’histoire de la Moldavie d’un côté à l’histoire de la Roumanie et d’un autre côté, à l’histoire universelle51. Cette histoire « mixée » est intitulée « histoire des Roumains » pour signifier que son sujet est l’ensemble du peuple roumain auquel appartient la population majoritaire vivant entre les frontières de la République de Moldavie. Trois chapitres sont consacrés à la période communiste : « Répressions politiques en République Socialiste Soviétique Moldave (RSSM) et en Roumanie communiste », « Société et économie en RSSM », « Société et économie dans la Roumanie socialiste »52.

Chaque chapitre se compose d’une courte narration historique (2-3 pages), d’une suite de plusieurs documents (discours politiques, études d’histoire, extraits de journaux), d’une « Étude de cas » (par exemple : « Les méthodes de tortures dans la Roumanie communiste », « Les privilèges de la nomenklatura », « L’économie durant le régime de Nicolae Ceauşescu »53) et d’une « Évaluation » composée de 4-5 questions. Pour la période communiste, celles-ci concernent les caractéristiques du régime socialiste (le mode de vie, les processus qui définissent l’organisation politique et économique de la société) ainsi que la distinction entre les régimes totalitaires, autoritaires et les démocraties.

Les auteurs du manuel accordent un espace généreux aux processus d’élimination des adversaires du régime soviétique et roumain (acteurs politiques, paysans, commerçants, fonctionnaires, intellectuels) et aux méthodes d’exercice de la violence (déportations, famine, emprisonnement, censure). La distinction entre la répression politique exercée par le PCUS contre les ennemis du régime (bourgeoisie, paysannerie) et la répression ethnique contre les Roumains de Bessarabie54 soumis à un processus d’assimilation forcée n’est pas toujours explicitée. Le manuel montre comment les inégalités sociales qui se creusent entre les paysans, les ouvriers et les élites du PCUS se superposent aux différences ethniques entre une majorité roumaine rurale et paysanne et une minorité russe et ukrainienne, citadine, employée dans l’industrie. Le devenir ce celle-ci n’est pas intégrée à la narration historique. L’analyse du développement économique en Roumanie et en RSSM sous le régime communiste se concentre sur trois phénomènes : la collectivisation de l’agriculture, l’industrialisation et la nationalisation des moyens de production. Si les effets de ces mesures conduisent à la modernisation de la société, avec la hausse du niveau de vie, l’accès à la santé et à l’éducation, en revanche, l’exploitation des paysans, la perpétuation des inégalités sociales (avec l’émergence d’une nouvelle classe privilégiée – la nomenklatura), la russification des élites sociales55, la pénurie, le contrôle brutal de la population, invitent à inclure le régime communiste dans la catégorie des régimes « totalitaires »56.

En fonction des réponses apportées à ces questions, les historiens moldaves s’orientent vers différents partenaires extérieurs. L’un des plus constants est la Roumanie : au début des années 1990, l’idée d’adopter un programme et un manuel d’histoire contemporaine communs aux deux pays est évoquée, sans que le projet aboutisse57. En dépit de cet échec, les liens entre les professionnels se consolident. De nombreux historiens moldaves se forment en Roumanie et y séjournent régulièrement, tandis que les historiens russes quittent la Moldavie. Dans le domaine de l’histoire du communisme, ces coopérations reposent sur une perspective commune concernant la condamnation de l’« occupant » soviétique et de la période communiste dans son ensemble. Dans d’autres cas, les collaborations se situent au niveau institutionnel. Créé en 2010 grâce au soutien financier du département « Les Roumains de partout » du ministère des Affaires étrangères roumain58, l’Institut d’Histoire Sociale « Pro Memoria » (IIS) de l’Université d’État de Chişinău, développe des programmes de recherche et de collecte de témoignages sur les déportations en Sibérie durant les années 195059. L’Institut organise des écoles d’été itinérantes auxquelles sont conviés les étudiants et les doctorants moldaves, roumains ou en provenance d’autres pays ex-socialistes – comme la Lituanie par exemple avec laquelle il entretient des relations privilégiées. Des événements sont aussi co-organisés avec le Mémorial des victimes du communisme et de la résistance de Sighet ou avec l’Association des anciens prisonniers politiques « Negru-Vodă » de Făgăraş (Roumanie).

La cellule de Iuliu Maniu à Sighet

La cellule de Iuliu Maniu à Sighet, Musée des victimes du communisme et de la résistance (Roumanie).

Source : memorialsighet.ro

L’enseignement de l’histoire du communisme joue également un rôle de ferment de l’identité nationale dans les deux autres pays de la région60. En Roumanie, une première « école » souligne l’action destructrice du régime communiste sur l’ethos national notamment à travers la propagande internationaliste et la persécution des figures historiques qui ont contribué à la construction nationale. Il en va ainsi du leader des nationaux-paysans Iuliu Maniu, qui a joué un rôle essentiel dans l’union de la Transylvanie avec la Roumanie en 1918, mort dans la prison communiste de Sighet en 195361.

Une deuxième « école » considère qu’une manière plus à même de contribuer à l’entretien de l’épopée nationale, serait de ne pas céder aux appels du paradigme totalitaire en mettant en évidence aussi bien les « aspects positifs »62 du régime communiste que son rôle néfaste dans la destruction des « traditions nationales authentiques » à travers la standardisation, la « russification » et la « mystification de l’histoire nationale »63 :

« Les transformations radicales expérimentées par la famille (en tant que fonction et structure) sous l’impact de l’industrialisation et de l’urbanisation se sont reflétées dans l’augmentation de la durée de la scolarisation et de l’instruction en général, de la participation de la femme aux activités économiques non-agricoles, du développement du système d’assurances sociales (retraites, allocations), la croissance de la mobilité sociale, la baisse de la mortalité infantile, la hausse des standards de vie et des coûts alloués à élever et à éduquer les enfants. »64

« La collectivisation a détruit la propriété paysanne traditionnelle, a altéré le visage du village roumain. […]. La destruction des villages s’est opérée pour la première fois au niveau de leur “âme”, étant altérées les traditions, les coutumes, la foi et le respect vis-à-vis du travail et de la propriété »65.

La conception de l’enseignement de l’histoire du communisme comme instrument de condamnation symbolique du passé est fréquente parmi les acteurs qui, anciens dissidents pour la plupart, entendent rendre justice aux victimes du communisme en mettant en avant les crimes politiques de l’ancien régime et de leurs responsables. L’enseignement de la période communiste apparaît ainsi comme un dernier recours après l’échec d’autres dispositifs de gestion du passé à empêcher la reproduction des élites communistes après 1989. Une telle visée n’échappe pas aux instrumentalisations politiques. Le cas bulgare est parlant à cet égard puisque l’adoption d’un nouveau programme d’histoire contemporaine en 2018 par le GERB intervient dans un moment de montée dans les sondages de son principal concurrent aux élections européennes de 2019, le Parti socialiste bulgare (BPC), héritier du KPB66 : le nouveau programme accorde plus d’heures à l’enseignement de la période communiste67 et utilise des termes forts pour la caractériser68.

Liste de nouveaux thèmes introduits dans le programme d’histoire pour la 10e classe de lycée

 

► Съветизация / soviétisation

► диктатура на пролетариата / dictature du prolétariat

► Народен съд / Tribunal du Peuple

► репресивен апарат / appareils répressifs

► трудововъзпитателни общежития (лагери) / camps de travail

► горяни / goryani (membres de la résistance armée, actifs entre 1945 et 1956)

► Възродителен процес / le processus d’assimilation forcé des Turcs (en anglais « Revival Process »)

► експроприация / expropriation

► социалистическа индустриализация / industrialisation socialiste

► насилствено коопериране / coopération forcée

► изселване / déplacement de population

Evelyna Kelbetcheva, qui compte parmi les auteurs, se rappelle :

« Chaque terme a changé... il a fait l’objet de formidables négociations. Nous avions toujours ce débat en cours. Par exemple, “la collectivisation de la terre”... personne n’explique aux enfants qu’elle était dévastatrice, avec beaucoup de sang, de prisons, des paysans mis dans les camps, dont beaucoup sont morts, dont beaucoup ont quitté le pays. Ils ne croyaient pas au système soviétique, aux kolkhozes, etc. “Collectivisation de l’agriculture” ne signifie rien. Mais quand vous dites : “imposition agressive du modèle soviétique de collectivisation de la terre et d’expropriation des paysans”, alors là vous avez la vérité »69.

En Roumanie, l’enseignement de l’histoire comme instrument de condamnation du passé se précise surtout après la constitution de la Commission présidentielle pour l’analyse de la dictature communiste en Roumanie (CPADCR) en 2006, mandatée par le président, Traian Băsescu, pour démontrer le caractère « illégitime et criminel » de l’ancien régime70. Parmi les recommandations du Rapport final de la CPADCR, déposé six mois plus tard, figure l’introduction dans les écoles d’un cours optionnel d’histoire du communisme et d’un manuel consacré exclusivement à ce thème71. Cette recommandation est mise en pratique par l’IICCMER, en 2008. Fondé en 2005 par le Premier ministre libéral, Călin Popescu Tăriceanu, l’Institut assume à partir de la fin des années 2000 une mission éducative ; la réalisation du manuel Une histoire du communisme en Roumanie en 2008 par une équipe formée par ses experts, des membres de la CPADCR et des professeurs d’histoire de secondaire, constitue un premier pas dans ce sens. Sa réalisation est le fruit d’une collaboration entre l’IICCMER, le Centre l’Éducation 2000+, ancienne branche de la Fondation Soros et les ambassades des Pays-Bas et de l’Allemagne à Bucarest.

Une histoire du communisme de Roumanie, 2008

Le manuel Une histoire du communisme de Roumanie (2008, IICCMER, coordination du projet : Raluca Grosescu), le premier manuel dédié exclusivement à l’histoire du communisme en Europe de l’Est.

Une histoire du communisme en Roumanie. Manuel pour le lycée, Iaşi, Polirom, 200972

 

Publié en 2008, le manuel Une histoire du communisme en Roumanie, co-écrit par une équipe mixte formée d’experts de l’IICCMER, d’ancien membres de la CPADCR et de professeurs d’histoire du secondaire se veut une introduction « équilibrée »73 au passé communiste. L’attention des auteurs à la pluralité des représentations de cette période est visible au niveau du choix des sources qui combinent documents d’archives, articles de presse de l’époque, mémoires, témoignages et photographies personnelles. Le manuel se compose de 12 chapitres.

La plupart reprennent les grandes thématiques du Rapport final de la CPADCR : « Les institutions de l’État (le Parti communiste et les institutions répressives) » (Ch. 4), « La destruction de la société civile et la répression politique » (Ch. 6), « Le monopole idéologique » (Ch. 7), « La résistance et la dissidence durant le régime communiste » (Ch. 11). D’autres sont consacrés à des thématiques nouvelles comme « La vie quotidienne » (Ch. 9) ou « “L’Autre” pendant le régime communiste » (Ch. 5).

Chaque chapitre propose des exercices et les annexes comprennent une « Chronologie comparative – 1945-1989 » présentant les grands événements de la période communiste en Roumanie et dans quatre autres régions : l’Europe Orientale, l’Europe Occidentale, les États-Unis et le « Reste du monde ». La chronologie se présente ainsi comme une invitation à contextualiser certains événements et, à l’évidence, à relativiser ce qui apparaît à présent comme une transgression du régime communiste à l’idéologie des Droits de l’homme. Critique de l’idéologie marxiste-léniniste (Ch. 1), mettant l’accent sur les méthodes coercitives par lesquelles le PCR exerce le pouvoir, le livre n’élude pas totalement, comme d’autres manuels, les aspects « positifs » de l’ancien régime tels les campagnes d’alphabétisation et la modernisation de l’économie. Sous cet angle, il se distingue du Rapport final de la CPADCR.

Cherchant, avant tout, à ne pas en faire « un produit de propagande »74, les auteurs gardent une tonalité neutre pour rendre le contenu « attractif » pour les élèves, aussi bien au niveau informationnel que visuel. Le manuel est accompagné par un DVD intitulé « Une journée à la Télévision Nationale en 1988 ».

Le manuel témoigne du fait que l’enseignement de l’histoire du communisme est matière à échanges et collaborations avec des experts régionaux de Serbie, de Bosnie-Herzégovine et d’Allemagne75. Des relations serrées sont établies avec le Centre Hannah Arendt76 de Bulgarie, fondé en 2008 pour assurer la présence de ce pays au sein de la Plateforme pour la mémoire et la conscience européenne77, projet qui a pour vocation de conférer à la mémoire des victimes du communisme une dimension continentale78. Plusieurs conférences internationales sont organisées par l’IICCMER et le Centre Hannah Arendt entre 2012 et 2013 à Sofia et à Bucarest avec des invités d’Allemagne, de République Tchèque, de Hongrie, de Moldavie, des Pays Baltes et un compendium de « bonnes pratiques pédagogiques » dans ce domaine est publié79.

Le document fait une large place aux visites mémorielles au sein des musées du communisme et aux lieux de la répression – Sighet (Roumanie), Belene (Bulgarie), etc. –, signe que cette collaboration est tournée vers la transmission des expériences de la répression politique exercée par les partis communistes. À étudier ce document, la dernière fonction saillante attribuée à l’enseignement de l’histoire du communisme apparaît : son rôle dans la formation des élèves à la démocratie et à l’acquis communautaire à travers l’éducation civique. Sofia Platform et l’IICCMER comptent parmi les organisations les plus inventives lorsqu’il s’agit de la création des projets éducatifs conçus dans l’esprit du respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales, de l’inclusion des minorités et de l’égalité des genres. L’une des explications de cette convergence des principes est sans doute l’existence de partenariats communs. Ce sont ainsi les grands bailleurs de fonds comme les fondations allemandes et américaines qui participent à cette standardisation des projets éducatifs à travers les critères inscrits dans leur grille de sélection. L’Institut « Georg Eckert », le Conseil de l’Europe et l’association EuroClio prennent part à leur tour à l’universalisation de modèles éducatifs basés sur la promotion de la « démocratie » et de la tolérance. La Banque Mondiale, très présente dans la région au début des années 1990, finance la nouvelle génération des manuels scolaires80.

À la différence des réseaux régionaux bâtis autour de la transmission d’une histoire du communisme axée sur la répression politique, les liens avec les institutions occidentales relèvent le plus souvent de relations asymétriques81 – les experts Est-européens se pliant le plus souvent aux exigences des bailleurs de fonds occidentaux au détriment des besoins locaux82. Les programmes développés par Sofia Platform croisent par exemple histoire du communisme et histoire de la « transition » avec l’intention évidente de contribuer à l’éducation civique et politique des jeunes Bulgares83, encouragés à réfléchir à la faillite d’un communisme rendu responsable des échecs du présent : corruption, problèmes économiques, absentéisme, euroscepticisme, déficit de démocratie locale84.

Le manuel Lessons from the past/What happened before 1989 ?, réalisé par Sofia Platform85

 

Le projet éducatif de la fondation Sofia Platform, « Leçons du passé : que s’est-il passé avant 1989 ? », s’organise sous la forme d’un recueil d’analyses sur le régime communiste de Bulgarie à l’intention des élèves et professeurs de secondaire. Composé de 11 chapitres écrits par différents historiens, il accompagne chaque « leçon » d’une suite d’exercices.

Intitulé « Trois faillites et une bouteille de coca-cola », le chapitre consacré à l’économie (1944-1989) s’ouvre par exemple sur une citation de Ludwig von Mises, où le penseur du libéralisme décrit le socialisme comme un régime qui « détruit la société » et la « culture de la coopération » sur laquelle « l’Europe s’est bâtie durant des millénaires ». Ce chapitre souligne que le socialisme a laissé « la Bulgarie en ruine économique totale » et que pour la « surmonter », il lui aurait fallu « une décennie ». « C’est pourquoi la leçon dont il est bon de se souvenir », peut-on lire, « c’est que les socialismes […] aboutissent toujours à un effondrement économique. Ce qui est arrivé au XXe siècle continue de se produire aujourd’hui et continuera de se produire à l’avenir ».

En même temps, certains chapitres font une large place aux voix qui entretiennent des rapports différents au passé communiste ainsi qu’à la « nostalgie », considérée comme légitime durant une transition que certains auteurs n’hésitent pas à qualifier de « ratée »86. Mais si toutes les voix ont droit de cité après 1989, il reste que celles qui n’ont pas déchanté du socialisme se font coupables de « myopie » puisque « l’héritage le plus problématique du socialisme » est représenté justement par les nostalgiques de l’ancien régime, qui ont failli à comprendre « les leçons du passé » pour la transmission desquelles Sofia Platform milite.

L’intérêt pour l’éducation civique n’est pas propre à cette organisation mais représente une tendance manifeste même au sein des structures mandatées plus spécifiquement pour mettre en place des projets concernant l’histoire du communisme, comme l’IICCMER. Ainsi, plus qu’un objet de connaissance en soi, la période communiste est présentée par certains projets comme un contre-exemple pour une société démocratique87. Reposant sur des innovations pédagogiques conçues dans le but de transformer l’élève, de récipiendaire passif, en acteur de l’enseignement par la stimulation de la participation (comportement conseillé lorsqu’il s’agit de l’implication dans les affaires de la cité), les programmes d’éducation civique ont souvent une dimension interactive (jeux de rôle, stimulation de la créativité et de l’analyse critique, incitation à l’appropriation des récits sur le passé). Ces nouvelles méthodes pédagogiques ne vont pas pourtant sans des transformations au niveau des contenus. La narration sur la période communiste insiste ainsi tout particulièrement sur la suppression des libertés (d’expression, de mouvement, d’action) et la censure, l’enrégimentement forcé, la pénurie et l’absence de biens de consommation, la généralisation de la peur. Les illustrations produites par les participants aux concours d’arts plastiques et d’essais lancés par l’IICCMER en 2009, « Être élève durant le communisme », sont parlantes à cet égard.

« Être élève durant le communisme »
« Être élève durant le communisme »

Illustrations des participants au concours d’arts plastiques « Être élève durant le communisme », IICCMER, 2009, coordination du projet : Luciana Jinga.

Une autre originalité de ces programmes éducatifs tient à qu’ils s’efforcent de prendre en compte la multiplicité et la diversité des rapports au communisme et encourage leur public à faire de même. Ainsi, à côté des responsables politiques et des dissidents, d’autres groupes accèdent au statut d’acteurs de l’histoire (comme les minorités nationales et religieuses, les femmes, les enfants nés après l’interdiction de l’IVG). La répression acquiert une dimension ethnique et genrée. Cette spécification du rapport au passé va encore plus loin lorsque les élèves sont invités à découvrir le communisme à travers la mobilisation de l’histoire locale et familiale ou à se projeter eux-mêmes dans le passé88.

Cette inclusion de nouvelles catégories sociales, professionnelles, ethniques et religieuses dans le récit sur le passé n’est pas dépourvue d’une dimension idéologique : à la personnalisation du récit correspond la valorisation de l’individu et de sa liberté. La satisfaction de ses intérêts et de ses aspirations apparaît comme la fin souhaitable de toute action politique. Les formes d’organisation collective propres aux États socialistes et la notion de « bien général » sont dépeintes comme le résultat de la propagande, de la contrainte, d’un « conformisme » sans aucune vertu sociale89. Invitant à la déconstruction des soi-disant « mythes » de la période communiste (sécurité de l’emploi, gratuité de l’école publique, couverture médicale universelle, écologie)90, l’« éducation civique » est tournée vers la disqualification du marxisme-léninisme et du socialisme, moins comme régime et davantage comme doctrine politique.

Trente ans après la chute des régimes communistes, l’enseignement de leur histoire est tout sauf une question close en Europe de l’Est. Prises entre des intérêts divergents, les politiques éducatives répondent, selon les contextes nationaux et régionaux, à des objectifs souvent opposés. Tantôt dispositif de formation civique des futurs citoyens européens, tantôt instrument de révélation et de condamnation des crimes du communisme, tantôt moyen de conservation de l’identité nationale, l’enseignement de l’histoire du communisme remplit plus souvent qu’on ne le pense des fonctions idéologiques visant la promotion de valeurs démocratiques et libérales comme la délégitimation du marxisme-léninisme et du collectivisme. Ces fonctions sont communes, comme on a pu le voir, à plusieurs pays de la région. Mais à l’encontre des recherches qui considèrent cette similarité comme relevant d’une histoire partagée, cet article démontre qu’elle est plutôt le résultat de l’action des acteurs qui se saisissant de cette histoire, construisent des réseaux transnationaux adaptés à leurs objectifs. Ainsi, l’émergence d’une éducation civique européenne aux confins du continent doit moins à une politique d’expansion culturelle communautaire pilotée par l’UE qu’à des luttes domestiques autour d’une histoire du communisme non-réglée.

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    1

    Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 22.

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    2

    Sergiu Musteaţă, Educaţia istorică între discursul politic şi identitar în Republica Moldova, Chişinău, Pontos, 2010, p. 34-36, 38 et 68-70.

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    3

    Mihai Stamatescu, Raluca Grosescu, Andrei Muraru, Dorin Dobrincu, Liviu Pleşa, Sorin Andreescu, O istorie a comunismului din România, Iaşi, Polirom, 2009 (2008).

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    4

    Tatiana Vaksberg, « Bulgarie : l’histoire du communisme fait (enfin) son entrée dans les manuels scolaires », Courrier des Balkans, 19 janvier 2018.

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    5

    Entretien avec Evelyna Kelbetcheva, Sofia, le 25 novembre 2018.

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    6

    Par exemple : Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V& R unipress, 2009.

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    7

    Elena Satchkova, « L’éducation bulgare, du communisme à la démocratie : l’expérience d’une transition achevée », Carrefours de l’éducation, no 15, 2003, p. 139-140.

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    8

    Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 23.

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    9

    Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 23.

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    10

    Les minorités représentent 15 % de la population en Bulgarie, 11 % en Roumanie et 35,5 % en Moldavie. Pour le cas de la Roumanie, voir : Mirela-Luminiţa Murgescu, « The history of minorities in the Romanian school system Curricula and textbooks in the late 1990s », Internationale Schulbuchforschung, vol. 23, no 2, 2001, p. 225-242.

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    11

    Partie de l’empire russe entre 1812 et 1918, l’actuelle République de Moldavie a été à la Roumanie entre 1918 et 1940, quand est cédée à l’URSS suite à un ultimatum. Récupérée en 1941 par l’armée roumaine, en 1944 la région est occupée par l’Armée Rouge et finit par devenir république soviétique à la fin de la Deuxième Guerre mondiale. En 1991, elle déclare son indépendance au moment du démantèlement de l’URSS.

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    12

    Maria Neagu, « Istorie, memorie, identitate în Moldova postsovietică. Consideraţii asupra evoluţiei istoriografiei şcolare din Republica Moldova (1991-2005) », Cugetul, no 1, 2006, p. 10.

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    13

    Fondé en 1994, il est sans interruption au pouvoir entre 1998 et 2009 quand il passe en opposition. À partir de 2015 son influence baisse.

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    14

    Stefan Ihrig, « Moldovan nightmares or ‘historiographic deadlock at birth’ – History, identity and history teaching in the Republic of Moldova 1991-2008 », in Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 373-374.

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    15

    Maria Neagu, « Istorie, memorie, identitate în Moldova postsovietică. Consideraţii asupra evoluţiei istoriografiei şcolare din Republica Moldova (1991-2005) », Cugetul, no 1, 2006, p. 15.

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    16

    Pour le cas de la Roumanie par exemple, voir Gabriel Marin, « Comment construire en Roumanie une identité nationale et européenne ? Les nouveaux manuels d’histoire des Roumains », Revue d’études comparatives Est-Ouest, vol. 35, no 3, 2004, p. 19.

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    17

    Gabriel Marin, « Comment construire en Roumanie une identité nationale et européenne ? Les nouveaux manuels d’histoire des Roumains », Revue d’études comparatives Est-Ouest, vol. 35, no 3, 2004, p. 8-12. Voir aussi le dossier coordonné par Armand Goşu et Florin Ţurcanu, « Manualele opţionale de istorie », 22, 28 juin 2005.

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    18

    Georgi Medarov, « The contradictory images of totalitarianism in contemporary Bulgarian historiographies issues », Psihologie socială, no 46 (II), 2020, p. 36.

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    19

    Monica Ciobanu, « Rewriting and remembering Romanian communism: some controversial issues », Nationalities Papers, vol. 39, no 2, 2011, p. 211.

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    20

    Georgi Medarov, « The contradictory images of totalitarianism in contemporary Bulgarian historiographies issues », Psihologie socială, no 46 (II), 2020, p. 39-40.

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    21

    Voir par exemple : Raluca Grosescu, Trajectoires de conversion politique de la nomenklatura roumaine après 1989, Paris, Michel Houdiard, 2011.

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    22

    Lavinia Stan, Transitional Justice in Post-Communist Romania, New-York, Cambridge University Press, 2013, p. 205.

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    23

    Raluca Grosescu, « Judging communist crimes in Romania : transnational and global influences », International Journal of Transitional Justice, no 11 (3), p. 505-524. Sur l’échec du procès à l’encontre des responsables du processus d’assimilation forcé des membres de la minorité musulmane de Bulgarie (Revival process) entre 1984 et 1989, voir Raluca Grosescu, « Criminal justice and historical master narratives in post-1989 Bulgaria and Germany », European Politics and Society, vol. 18, 2017, p. 69-75.

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    24

    En Bulgarie, une loi de lustration adoptée en 1992 avait été abrogée dès 1995. Sur la Loi no 187/1999 concernant l’accès au dossier personnel et la dé-conspiration de la Securitate en tant que police politique voir : Raluca Ursachi, La justice de transition en Roumanie postcommuniste. Usages politiques du passé, Thèse pour le doctorat en science politique, Université Paris I – Panthéon Sorbonne, 2012, p. 264-271.

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    25

    Loi sur l’accès et la divulgation des documents et déclarant l’affiliation des citoyens bulgares à la sûreté de l’État et aux services de renseignement de l’armée nationale bulgare, Journal officiel, 102, 19 décembre 2006.

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    26

    Le 18 décembre 2006, le président roumain Traian Băsescu condamne le régime communiste de Roumanie comme « illégitime et criminel » devant le Parlement ; en 2010, le Parlement bulgare adopte une loi-déclaration sur la nature criminelle du régime communiste.

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    27

    Nadège Ragaru, « Les dossiers de la Sûreté d’État bulgare : le communisme dans les pliures du temps », Revue des études slaves, 2010, vol. 81 (2-3), p. 213-217 et 223.

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    28

    Daniela Heimpel, « Former le citoyen européen ? Réflexions sur le concept d’éducation civique dans le cadre de l’intégration politique transnationale de l’Europe », Eurostudia, vol. 12, no 1, 2017, p. 10-14.

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    29

    Sergiu Musteaţă, Educaţia istorică între discursul politic şi identitar în Republica Moldova, Chişinău, Pontos, 2010, p. 129.

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    30

    La multiperspectiveté en histoire désigne l’« intégration du point de vue de « l’autre » dans sa propre vision du monde, le développement par le dialogue d’interprétations des événements historiques, […] et l’engagement à offrir aux étudiants une multiplicité d’interprétations possibles et ouvertes des événements » présentés [en ligne]. 

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    31

    Ivan Elenkov, Daniela Koleva, « Historiography in Bulgaria after the fall of Communism: did “the change” happen? », Historein, vol. 4, 2003, p.  184-193.

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    32

    Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 32-33.

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    33

    Laure Neumayer, The Criminalisation of Communism in the European Space after the Cold War, Londres-New-York, Routledge, 2019, p. 115-116.

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    34

    Les données présentées ont été obtenues lors d’un entretien biographique avec Evelyna Kelbetcheva, réalisé à Sofia, 25 novembre 2018.

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    35

    Entretien avec Evelyna Kelbetcheva réalisé par Stoyko Stoianov, faktor.bg, 21 novembre 2017. Parmi les signataires de la pétition, se trouvent plusieurs ex-présidents de la Bulgarie (Jeliou Jelev, Petar Stoyanov et Rossen Plevneliev) [en ligne]. 

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    37

    Entretien avec Hristo Hristov par l’historien Bogdan Iacob, Sofia, le 25 octobre 2018 (transmis à l’auteure par correspondance électronique).

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    38

    Entretien avec Louisa Slavkova, Sofia, 28 novembre 2018.

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    40

    Entretien avec Sergiu Musteaţă, Chişinău, 30 octobre 2019. Voir également son CV [en ligne].

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    41

    Cf. la Recommandation 15 (2001) « L’enseignement de l’histoire en Europe au XXIe siècle » du Comité des ministres du Conseil de l’Europe, adoptée le 31 octobre 2001, Cugetul, no 3-4, 2002, p. 64-69. Pour une analyse plus ample de cette question : Simona Szakács, Europe in the Classroom. World Culture and Nation-Building in Post-Socialist Romania, Springer, 2017.

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    42

    Entretien avec Mia Jinga, coordinatrice des programmes éducatifs à l’IICCMER, Bucarest, 24 novembre 2009.

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    43

    Cf. l’appel « Pour la défense de la dignité nationale, pour arrêter la campagne de roumano-phobie et de dénigrement de l’histoire des Roumains » du Congrès des historiens de République de Moldavie, Cugetul, no 2, 2001, p. 58-60.

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    44

    Entretien avec l’historien Ion Negrei, auteur de manuels scolaires, vice-président de l’association des historiens de République de Moldavie, Chişinău, 31 octobre 2019.

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    45

    Le PCRM, d’orientation moldovéniste est élu sans interruption au Parlement entre 1998 et 2019 et détient la majorité entre 2001 et 2009. Il y a donc une divergence claire entre l’orientation roumaniste de l’historiographie et le vote de la population. Voir : Stefan Ihrig, « Moldovan nightmares or ‘historiographic deadlock at birth’ – History, identity and history teaching in the Republic of Moldova 1991-2008 », in Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 369.

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    46

    Les historiens se mobilisent en 1995 pour la hausse des salaires et l’amélioration des conditions d’enseignement dans les classes (chauffage, etc.) ainsi que pour conserver leurs postes, cf. entretien avec Anatol Petrencu, professeur d’histoire à l’Université d’État de Chişinău, président de l’Association des historiens moldaves (1998-2006), Chişinău, 29 octobre 2019. Voir aussi « Greva », Viața Satului, no 14, 11 avril 1995.

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    47

    Un cours expérimental d’histoire intégrée est introduit à l’automne 2003 dans 66 écoles malgré l’opposition des historiens, cf. Flux, 5 septembre 2003.

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    48

    Stefan Ihrig, « Moldovan nightmares or ‘historiographic deadlock at birth’ – History, identity and history teaching in the Republic of Moldova 1991-2008 », in Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 374.

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    49

    Voir les rapports de l’Institut « Georg Eckert » dans Sergiu Musteaţă, Educaţia istorică între discursul politic şi identitar în Republica Moldova, Chişinău, Pontos, 2010, p. 211-309.

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    51

    Cette discussion, a également lieu en Roumanie et fait l’objet d’un grand débat au début des années 1990. La question a été explorée par Mirela-Luminița Murgescu, Istoria din ghiozdan. Memorie şi manuale şcolare în România anilor 1990, Bucureşti, DoMinor, 2004, p. 20-22.

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    52

    Igor Caşu, Igor Şarov (dir.), Virgil Pâslariuc, Flavius Solomon, Pavel Cerbuşcă, Istoria românilor şi universală, Manual pentru clasa a XII-a, Chişinău, Cartier, 2013, p. 32-38, 49-58.

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    53

    Igor Caşu et al., Istoria românilor şi universală, Chişinău, Cartier, 2013, p. 36, 53, 58.

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    54

    Nom historique de l’actuel territoire de la République de Moldavie.

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    55

    Igor Caşu et al., Istoria românilor şi universală, Chişinău, Cartier, 2013, p. 83.

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    56

    Igor Caşu et al., Istoria românilor şi universală, Chişinău, Cartier, 2013, p. 36.

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    57

    Entretien avec Ion Negrei, Chişinău, 31 octobre 2019.

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    58

    Entretien avec Ludmila Cojocaru, chercheuse au sein de l’Institut d’histoire sociale « Pro Memoria », Chişinău, 29 octobre 2019.

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    60

    Ovidiu Pecican, « Bătălii ideologice în era postideologică: România anilor 1990 », Observator cultural, no 99, 15 janvier 2002.

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    61

    Valentin Băluţoiu, Maria Grecu, Istorie. Manual pentru clasa a XII-a, Bucureşti, Editura didactică şi pedagogică, 2008, p. 118-119.

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    62

    Entretien avec Ioan Scurtu, historien et auteur de manuels scolaires, Bucureşti, 19 novembre 2009.

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    63

    Ioan Scurtu, Marian Curculescu, Constantin Dincă, Aurel Constantin Soare, Istoria Românilor. Manual pentru clasa a XII-a, Bucureşti, Petrion, 1999, p. 143.

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    64

    Ioan Scurtu et al., Istoria Românilor, Bucureşti, Petrion, 1999, p. 133.

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    65

    Ioan Scurtu et al., Istoria Românilor, Bucureşti, Petrion, 1999, p. 140.

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    67

    Entretien avec Evelyna Kelbetcheva réalisé par Stoyko Stoyanov, 21 novembre 2017 [en ligne]. 

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    68

    Entretien avec Dimiter Dimov, chercheur en histoire au Centre d’études avancées, Sofia, 21 novembre 2018.

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    69

    Entretien avec Evelyna Kelbetcheva, Sofia, 25 novembre 2018.

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    70

    Cf. Communiqué de presse de la Présidence roumaine, 20 avril 2006 [en ligne].

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    71

    CPADCR, Raport final, p. 640 [en ligne].

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    72

    Mihai Stamatescu, Raluca Grosescu, Dorin Dobrincu, Andrei Muraru, Liviu Pleşa, Sorin Andreescu, O istorie a comunismului din România, Iaşi, Polirom, 2009 (2008), 192 p.

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    73

    Entretien avec Raluca Grosescu, Bucarest, 22 octobre 2020.

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    74

    Entretien avec Raluca Grosescu, Bucarest, 22 octobre 2020.

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    75

    Une équipe de la Commission Gauck visite l’IICCMER en mai 2009.

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    76

    Destiné à la « conservation de la mémoire des régimes totalitaires » et à la « dissémination de l’héritage de Hannah Arendt » [en ligne]. 

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    77

    Entretien avec Vasil Kadrinov, fondateur du Centre Hannah Arendt, ancien prisonnier politique (1985-1986) et militant pour une politique de condamnation du régime communiste en Bulgarie, Sofia, 20 novembre 2018.

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    79

    Raluca Grosescu (dir.), Teaching the History of Communism in Eastern Europe. Compedium of Good Practices, Bucarest, Respiro Human Rights Copyright, 2013.

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    80

    Sergiu Musteaţă, Educaţia istorică între discursul politic şi identitar în Republica Moldova, Chişinău, Pontos, 2010, p. 40 ; Lavinia Stan, Transitional Justice in Post-Communist Romania, New-York, Cambridge University Press, 2013, p. 191.

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    81

    Sara Jones, « Memory relations : cross-border collaboration between mnemonic actors in Germany, Central Eastern Europe, and the MENA region », Revue comparative d’études Est-Ouest, no 2-3, 2020, p. 225-259.

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    82

    Augusta Dimou (dir.), Transition and the Politics of History Education in Southern Europe, Göttingen, V & R unipress, 2009, p. 35-38.

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    83

    Une observation similaire fait Georgi Medarov à partir de l’activité du Centre Hannah Arendt qui, à travers ses programmes, souhaite prémunir les élèves contre « les dangers de l’extrémisme de gauche » et à les aider à cultiver le « désir de contribuer à l’ordre démocratique ». Georgi Medarov, « The contradictory images of totalitarianism in contemporary Bulgarian historiographies issues », Psihologie socială, no 46 (II), 2020, p. 42.

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    84

    Voir les projets développés par Sofia Platform [en ligne]. 

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    87

    Voir le projet Le portefeuille des Droits de l’Homme, déroulé par l’IICCMER en 2011, p. 20-21, [en ligne].

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    88

    Luciana Marioara Jinga (dir.), Elev în comunism. Student during the Communist Regime, Bucureşti, Curtea Veche, p. 6.

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    89

    Mihai Stamatescu, Raluca Grosescu, Dorin Dobrincu, Andrei Muraru, Liviu Pleşa, Sorin Andreescu, O istorie a comunismului din România, Iaşi, Polirom, 2009 (2008), p. 66-67, 100.

    Pour citer cette publication

    Constantin, Anemona (dir.), « L’enseignement de l’histoire du communisme à l’Est », Politika, mis en ligne le 14/06/2021, consulté le 25/10/2022 ;

    URL : https://www.politika.io/index.php/fr/article/lenseignement-lhistoire-du-communisme-a-lest