Introduction. Les grands, les chefs et les charismatiques aux XIXe et XXe siècles
Directeur d'études

(EHESS - CRH : Centre de recherches historiques et CERCEC : Centre d'études des mondes russe, caucasien et centre européen)

Cet atelier dessine la trajectoire historique de plusieurs formes d'autorité qui se succèdent ou cohabitent et qui se répondent les unes aux autres, les grands, les chefs, les charismatiques et les images porteuses de messages de commandement1. Toutes les formes (humaines, matérielles et combinées) de l’autorité n’y figurent assurément pas, mais celles qui sont abordées sont sans doute parmi les plus significatives d’une époque2. Il se trace de la sorte un arc de moyenne durée, un peu plus d’un siècle, d’avant 1850 à au-delà de 1950, où se détachent ces avatars de l’autorité.

L'atelier ne parvient pas jusqu’au présent. Ce présent (un peu étendu3) comporte des changements si profonds depuis les années 1970 et 1980 qu’il aurait fallu bien d’autres recherches et de patients échanges pour les identifier et les peser. Et ce volume est déjà issu de plusieurs années de rencontres depuis les années 2010. Ses contributions ont lentement mûri sur la base des préférences de recherche de chacune et de chacun de leurs auteurs.

Le chef est certainement une interrogation lancinante du moment actuel, pour l’esprit public tout comme pour les sciences sociales. La presse et les conversations ne cessent d’évoquer la prolifération de chefs autoritaires et populistes, sinon dictatoriaux. D’un autre côté, le refus des chefs n’a jamais été si fort dans l’histoire de la modernité. Il se manifeste dans le monde tout aussi bien dans des mouvements sociaux qui occupent et réinventent la place publique que dans le pullulement plus ou moins connecté d’activités collectives du quotidien délibérément égalitaires4. Le XXIe siècle est-il sur ces plans la continuation du XXe ? Cette question n’est qu’un horizon pour un atelier qui ne traite ni du désir ni du refus des chefs aujourd'hui.

L'atelier s’aventure dans un espace difficile. Il fraye son chemin entre des disciplines encore trop étroitement compartimentées, histoire, histoire de l’art, droit, anthropologie, sinon philosophie, et entre des domaines d’intérêt encore trop habituellement séparés, économie, littérature, art, guerre, société, politique, personne et les sciences sociales elles-mêmes.

Chaque auteur se livre à un exercice très spécifique. Et l'ensemble n’en a pas moins une cohérence, celle de dessiner la trajectoire d’un effort énorme pour se faire obéir par des artifices quand la nature, si l'on peut dire, celle de l'aristocratie, des rois et des dieux incontestés, n'y suffit plus. Les artifices, pour leur part, sont et humains et matériels. Le XIXe voit se composer la figure du grand et celle du héros. Celle du chef leur succède sans les remplacer vraiment. Des objets matériels, images, annonces, affiches sont ciselés pour leur part comme dépôts d’autorité. Il leur est confié la mission de commander à des gestes d’achat, de vote, d’adhésion, de prière, d’étude, etc. Acteurs sociaux, artistes, écrivains, penseurs, chercheurs en sciences humaines et sociales, médecins… participent chacun à leur manière à cette œuvre collective où leurs propositions et contributions se mêlent et où leurs réalisations s’engrènent les unes dans les autres. Les temps de cet atelier sont ceux où l’aristocratie, la monarchie et la religion perdent progressivement l’immense capacité d’action qu’elles possédaient depuis des siècles en Europe – qui est le territoire le plus concerné par les études présentées, même lorsque l’anthropologie s’y intéresse à d’autres continents. Faisons l’hypothèse qu’une expression comme celle de « moment industriel » serait apte à caractériser ces temps5. Les formes que nous abordons parcourent le monde industriel qui est aussi celui de la société de masse, celle où se déploient des guerres de masse depuis la Guerre civile américaine, l’industrie de masse avec ses « grandes usines »6, la politique de masse des grands partis et des grands rassemblements mis en scène, la culture de masse avec l’expansion de la presse et l’arrivée du cinématographe et de la radio et bientôt de la télévision, la consommation de masse avec ses produits spécifiques, sa publicité, son marketing, ses organes de vente. Les années 1917 et suivantes voient un pays immense se débarrasser brutalement de son tsar et de sa noblesse. Ce pays, qui prend la forme originale d’un espace continu de prescription où toutes les autorités sont requises de se centraliser sous une autorité unique7, constitue à lui seul une autorité qui ne cessera de s’affirmer sur les mouvements sociaux du monde, sinon sur le capitalisme lui-même, jusqu’à sa perte à la fin du XXe siècle8. Le communisme se présente comme l’une des formes du moment industriel, sous un jour hostile à la consommation, concentré sur la production et surtout sur la protection d’une élite gardienne de la loi. Ce moment qui était encore vu comme éternel dans les années 1970 – et qui avait été celui d’entreprises génocidaires de très large échelle où le chef n’a pas manqué de rôle – s’est progressivement délité en une époque que les sciences sociales peinent à caractériser.

Six textes. Le premier nous introduit à la plus puissante élaboration, par l’écrivain britannique Carlyle, de la grandeur et de l’héroïsme comme valeurs aptes à étayer la société. Le second montre la grandeur bousculée par l’expérience écrasante des tranchées de la Guerre de 1914-1918. Le troisième est un récit archéologique qui expose la construction par Max Weber de la signification contemporaine du charisme. Le quatrième nous déplace vers les images comme objets chargés d’enjoindre des actes, ceux du consommateur et ceux du citoyen. Le cinquième suit pas à pas la formation de la figure du chef, une invention du XXe siècle que connaissent de nombreux pays. Le dernier enfin nous montre l’anthropologie aux prises avec la tâche d’élaborer des figures de pouvoir propres aux peuples qu’elle étudie.

Sabina Loriga nous montre comment la grandeur et l'héroïsme, que Thomas Carlyle tient ensemble dans la majeure partie de son œuvre, sont érigés par cet auteur longtemps adulé comme l’horizon indépassable des destins personnels. On ne trouve parmi ses grands et ses héros ni ecclésiastiques ni aristocrates. Au moment où Carlyle écrit, à partir des années 1820, ce sont déjà des figures de l'ancien monde. Engels le loue d’être contre l’aristocratie héréditaire. L'effort de Carlyle est celui d'inventer la valeur capable de se substituer au sang et au rang, à l’autorité naturalisée par des siècles de christianisme et de prééminence de la naissance. Presque tous les auteurs qui s’emploient à partir de la fin du XIXe siècle à charger le chef et le leader de l’avenir du monde se réfèrent à Carlyle, même si la posture raciste qu’il a prise dans ses dernières années l’ont aussi conduit à être l’une des références du fascisme et du nazisme.

Emmanuel Saint-Fuscien montre à la suite comment la grandeur cède aux effrois du feu et aux côtoiements de première ligne de la Première Guerre mondiale. Il en résulte une sorte de scandale quant à la manière de penser l’autorité puisqu’elle relève dès lors, sur place, d’une culture partagée et d’une déhiérarchisation qui va, lorsque la guerre a déjà trois ans, jusqu’à une « maternalisation » de ces relations de proximité. Au moins 700 000 officiers et sous-officiers ont l’autorité en partage durant cette période. Ainsi, quand les grands et les héros ne pouvaient être qu’au-dessus de tous les autres et comme leur tête, le mot de chef, comme au-delà de l’Atlantique celui de leader, est conforté dans la désignation de qui porte la moindre part d’autorité le long des lignes hiérarchiques et jusqu’à ceux qui dirigent les subordonnés de dernier rang.

La remarque de deux spécialistes du management, datée de 1919, atteste de la profonde blessure reçue par la grandeur du fait de la guerre puisqu’ils peuvent se permettre d’écrire que, l’état de chef étant un bien commun, « à cet égard, le plus petit chef de poste du Maroc et César sont de la même essence 9». Le grand unique, solitaire et sommital ne serait plus seul en ce monde où le chef s’installe à tous les étages.

Pourtant, si le grand et le héros sont mis à mal, ils survivent. Walter Benjamin n’écrit-il pas que « le héros est le vrai sujet de la modernité10» ? Du côté du communisme, qui n’est pas en reste en fait de culte du chef, Pavel Kortchaguine est un héros, pas un chef, dans le roman soviétique le plus populaire de l’avant-guerre, Et l’acier fut trempé11. On trouve aisément des actes de reconnaissance de la grandeur entre grands. Un peu plus avant, de Gaulle, un chef parmi les grands (et vice versa), admirateur de Gustave Le Bon et dont un des premiers articles a pour titre « L’action de guerre et le chef »12, est sous pression pour arrêter Sartre qui avait signé en septembre 1960 le « Manifeste des 121 » appelant à l’insoumission pendant la Guerre d’Algérie : « On n’arrête pas Voltaire », s’était-il récrié13.

Les meilleurs spécialistes américains de la culture du leadership en essor prennent soin de trouver comment distinguer grands et chefs.

Professeur de science politique et futur président des États-Unis, Woodrow Wilson écrit en 1890 que « l’art de guider est différent de celui d’écrire des romans14 ». Pour Floyd Allport, l’un des trois ou quatre principaux psychologues sociaux américains de l’entre-deux-guerres, « les personnes de grande sagesse sociale et de pouvoir créatif manquent souvent de la capacité d’avoir une maîtrise (control) sur les autres pour l’exécution de leurs plans. C’est pour cette raison que nous devons faire une distinction entre l’éminence intellectuelle et le leadership 15». Moins percutant, un autre célèbre psychologue social demande à l’unisson : « Est-ce que toute personne qui réussit remarquablement est un leader 16 ? » L’éminence ne mène pas forcément à la conduction des hommes et réciproquement – même si les spécialistes des chefs et des leaders spéculent sur ce qui différencie le chef du grand chef et le leader du great leader17. Entre grandeur et leadership, des registres d’autorité différents sont concernés. Ceci nous invite à considérer l’intérêt phénoménal que le XXe siècle a concentré sur l’autorité de commandement18.

Cette autorité spécifique qui consiste à l’exercer dans le commandement n’est que très secondairement une composante de la notion de grand, tout aussi peu que de celle de héros. Le surhomme ne commande à personne. Cependant les grandes références du XXe siècle sur la pensée de l’autorité, Max Weber et Hannah Arendt, ne traitent que de l’autorité de commandement, de la capacité pour un ordre d’être suivi d’une docilité, comme l’écrit Weber, sans recourir ni à la violence ni à la persuasion, complète Arendt. Il est possible cependant d’aborder l’autorité autrement, comme le fait Alexandre Kojève dans le manuscrit d’un ouvrage écrit en France sous l’Occupation mais qui ne sera publié qu’en 2004, La Notion de l’autorité19. Pour Kojève, les formes de l’autorité sont quatre : le Père, le Juge, le Maître et le Chef. Elle est un acte qui a la particularité de ne pas rencontrer d’opposition, écrit-il dans une formule proche de celle d’Arendt20, et surtout son mode d’exercice n’est que très partiellement la prescription par des ordres.

Une grande différence entre le grand et le héros d’un côté, le chef et le leader de l’autre, consiste en ce que ces derniers sont orientés vers les autres et vers leur connaissance pour mieux les diriger. Les premiers suivent un destin qui les dépasse : « Le héros n’a rien de personnel », il « est unique ». Carlyle n’envisage pas la société de masse : il ne relie pas le grand à la mobilisation de foules ou encore des masses.

Désormais, c’est-à-dire à partir de la fin du XIXe siècle et surtout de celle de la Première Guerre mondiale, il faut aux chefs de la formation. La naissance ni même l’argent n’y suffisent plus. Ils doivent avoir souci du lien aux autres sur le terrain, tout en se mêlant de leurs affaires. Ils sont formés et ils éduquent, toutes activités si éloignées de l’être du grand et du héros. Apprendre à parler en public, s’initier aux techniques de persuasion, se familiariser avec les manières de devenir chef deviennent l’un des grands motifs de la croissance de la formation professionnelle en cours d’emploi. La psychologie affecte aux chefs et aux leaders des qualités : elle mobilise à leur endroit tout son art des tests mis au point à partir du début du siècle. La Suggestibilité d’Alfred Binet, parue en 1900, en a été l’un des principaux événements fondateurs. Le psychologue français recherche dans les groupes d’élèves les voies de l’affirmation des leaders (en anglais dans le texte)21. De ces recherches, qui circulent rapidement aux États-Unis, va procéder le QI utilisé encore aujourd’hui – une mesure de la supériorité.

Parmi ces chefs, jamais de femmes. La question ne se pose pas. La masculinité du commandement, et il en est de même incidemment de la grandeur et de l’héroïsme, est une évidence qui ne suscite aucune réserve, aucune objection. Ceci n’est pas moins valable en France que dans tous les pays étudiés. Les exceptions pratiques ne suscitent pas de commentaire des théoriciens, qu’ils soient professionnels ou relèvent des sciences humaines et sociales. On pense aux contredames du textile du XIXe siècle et aux surintendantes d’usine de Grande-Bretagne et de France appelées à partir de la Grande guerre à diriger le personnel affecté au social, principalement sinon uniquement des femmes. On a la publication isolée de Clara Espey aux États-Unis en 1915 qui vise à aider les guides de jeunes filles ou de rares allusions au fait que les femmes pourraient être des cheffes ou des leaders 22. Peut-être le seul développement problématique qu’on puisse trouver avant-guerre chez les penseurs américains du leadership, soit dans leurs professions, soit dans les sciences humaines et sociales, est celui d’Ordway Tead dans son Art of Leadership de 1935 (ce qui est loin de signifier qu’il soit féministe)23. Aujourd'hui, les femmes ont gagné de l'espace au sein du leadership.

On a vu que les grands se reconnaissent entre eux, même à travers leurs écarts politiques, aussi profonds soient-ils, et en tout cas dans un monde démocratique. Les chefs se reconnaissent entre eux aussi. Le responsable communiste d’origine ouvrière Georges Marrane dit après la guerre au résistant Claude Bourdet, à propos d’Henri Frenay, fondateur du réseau Combat et l’un des principaux dirigeants de la résistance non communiste : « Ce que j’aime bien avec votre ami, c’est que c’est un chef 24».

La ligne de la grandeur à la chefferie se poursuit vers le charisme. Le chef et le leader, dont la figure se forme par mille voies, reçoivent à la fin des années 1910, de la part d’un sociologue, une dotation extraordinaire et un viatique infiniment précieux : le charisme. Le charisme était une notion religieuse antique désignant la grâce divine répartie entre les membres de l’église : il n’était pas lié à l’autorité. Il est pour Weber l’une des trois sources de la domination et de l’autorité, les deux autres étant la rationalité bureaucratique et la tradition. Cette notion de chef charismatique se propage dès l’entre-deux-guerres en Allemagne et après la Seconde Guerre mondiale dans le reste du monde et constitue, pour les chefs, un équipement de grande puissance, tout autant d’ailleurs dans les jeux du réel que dans ceux des sciences sociales qui ne manquent pas, à ce titre, d’avoir un certain rôle dans les premiers.

Il existait déjà le prestige, tel que Gustave Le Bon l’avait développé à propos du meneur dans son bestseller mondial Psychologie des foules, publié pour la première fois en 1895 et rapidement dans de multiples traductions à travers le monde. Max Weber l’a lu mais le charisme qu’il construit est beaucoup plus élaboré. Dans son entreprise de définition d’une sociologie de la domination qui ne soit pas seulement une interprétation du monde mais un instrument d’action politique sur l’Allemagne en piteux état à la fin de la guerre et ensuite, Weber fait une opération historique et théorique de maître : il noue le charisme à l’autorité et au Führertum25. Cette conjonction est pour beaucoup dans la force que le « charisme » a acquise au XXe siècle.

Exactement comme Carlyle le fait à propos des grands26, Weber va chercher dans l’histoire ses modèles de chefs charismatiques pour mieux en fonder la notion : « L'histoire nous montre que l'on rencontre des chefs charismatiques dans tous les domaines et à toutes les époques historiques. Ils ont cependant surgi sous l'aspect de deux figures essentielles, celle du magicien et du prophète d'une part et celle du chef de guerre élu, du chef de bande et du condottiere de l'autre. Mais ce qui est propre à l'Occident – et cela nous intéresse plus spécialement – c'est la figure du libre « démagogue. (…) De nos jours ce même type se présente sous l'aspect du “ chef d'un parti parlementaire ”27. »

L’exploration généalogique que nous livre ici Paulo Napoli identifie les sources de l’opération à laquelle Weber se livre pour montrer que le charisme des chefs est le véritable créateur de l’histoire. Ainsi, Weber recourt-il aux travaux des années 1890 de Rudolf Sohm, historien du droit de l’église, qui, lisant Saint-Paul, voit le charisme répandu dans l’assemblée chrétienne du premier siècle. Cependant, plutôt que la conception de Sohm d’une grâce égalitaire et pré-institutionnelle également répartie et distribuée en diverses fonctions dans l’Ekklesia première, il résulte d’un forçage opéré par Weber un charisme marqué par la supériorité et l’institutionnalisation du hiérarchique. Il n’est pas de groupement chez lui qui soit sans Führer. Le « Verband », groupe ou association, est marqué pour lui par la présence d’un chef ou d’une direction, et l’ordre collectif n’est pas imaginable sans cette situation apicale28. Le charisme wébérien offre à tous ceux, nombreux, qui affirment en ce début du XXe siècle une nécessité de chefs, une onction proche du divin plus lumineuse encore que l’humaine, trop humaine grandeur.

En fait d’équipement, l’autorité ne réside pas seulement dans les humains ni le commandement dans les chefs. Abordant la publicité qui incite à l’achat, Eric Michaud nous entraîne dans le monde des images. Il s’agit en effet de confectionner plus que des images « suggestives », des « images motrices »29. Un disciple de Charcot, Charles Féré, formule le principe de « l’induction psychomotrice » – la pensée du mouvement entraînant celui-ci – qui a un succès mondial immédiat30. Émile Zola, que son parcours a fait passer par la publicité (comme d’ailleurs Paul Valéry, nous rappelle E. Michaud dans cet atelier), soutient avec d’autres que la publicité succède à la religion. En grande partie par la force de ses images, la première se fait « l’art officiel du capitalisme 31». Après la consolation, la consommation. L’autorité, dotée d’assurances scientifiques par le XXe siècle, est soigneusement déposée dans les images où elle gagne alors en assurance esthétique.

Suivant la publicité, passons par les États-Unis. Un psychologue y occupe une place importante dans l’institutionnalisation de cette activité. Formé chez le grand psychologue allemand Wilhelm Wundt, il devient président de l’association américaine de psychologie en 1919. En 1903, Walter Dill Scott offre à la publicité plus que les services de la psychologie : il propose de faire de celle-ci la théorie de la publicité, et il est très entendu par les professionnels32. Sa pensée ne saurait être plus claire : « L’humanité dans son ensemble est plus influencée par les ordres que par les processus logiques de la pensée car […] nous sommes suggestibles plutôt que raisonnables. » Et le premier instrument de la suggestion, c’est l’ordre, le commandement. La publicité en est un champ d’opération rêvé : « La fonction d’un ordre direct en publicité est double : attirer l’attention et susciter une action immédiate », écrit Scott, qui ne manque pas de se référer à Féré33. Dans un article, il recommande de pratiquer dans les annonces le commandement direct : « Use Pears’ Soap » (« Utilisez le savon Pears »), par exemple. Ou bien : « Asseyez-vous sur le champ et réclamez votre échantillon de Wheatlet ». Le « Il ne reste plus qu’un seul exemplaire » que nous voyons si souvent aujourd’hui est bien moins direct que ne l’étaient ces mises en demeure. Il est préférable toutefois qu’un ordre n’en paraisse pas un, car personne ne reconnaîtrait avoir obéi à une injonction. Le choix des mots est ici décisif. Un ordre, en tout cas, « est une suggestion directe. […] C'est la forme de langage la plus courte, la plus simple, et la plus facile à comprendre. Il emporte autorité et poids en exprimant explicitement et distinctement l'action34 ».

Tout autant que de textes, il peut s’agir d’« injonctions imagées », selon la formule de Scott35. L’Oncle Sam au doigt pointé vers l’observateur en 1917 pour appeler le citoyen américain à s’engager est-il autre chose qu’un ordre ? L’Union soviétique le reprend sans complexe durant la Guerre civile en affichant la figure d’un partisan pointant le citoyen soviétique : « T’es-tu inscrit comme volontaire ? ».

I want you for US army

I want you for U.S. Army, 1917, James Montgomery Flagg.

La publicité n’est pas le seul domaine où un objet est investi d’autorité. Le plan est au XXe un instrument d’action managériale et gouvernementale largement utilisé en tous contextes et par toutes les orientations politiques. Comme le dit un important penseur français de l’organisation, « le programme d’action est bien l’ordre le plus impérieux qui soit36 ». Les graphiques servent aussi à transmettre l’autorité à distance, une (longue) citation le montre : « Établis sur papiers transparents et transmis en copies aux différents directeurs et chefs de service, ils constituent, sans travail bureaucratique, le plus précieux moyen d’émulation dont le chef d’entreprise dispose. C’est aussi un moyen de dire ce que l’on a à dire tout en ménageant toutes les susceptibilités. Un directeur d’usine se sentira nettement blessé et finalement démoralisé si, à plusieurs reprises, son chef lui écrit : « Votre rendement est le plus mauvais de toutes les usines ». Par contre, il ne pourra se fâcher contre la petite ligne noire qui lui indiquera inexorablement qu’il est « le dernier de la classe »37. La petite ligne noire a bien des équivalents aujourd’hui… et le nudge ou « coup de pouce » ne date pas d’hier, même si le nom de cette technique d’influence n’était pas trouvé avant ces dernières années, en en permettant un développement démultiplié38.

Les machines ne manquent certes pas non plus à ce service. L’autorité qui y est instillée en cette époque industrielle est réfléchie à la fin du XIXe siècle. Un ingénieur disciple de Frédéric Le Play, ce polytechnicien économiste créateur de la « science sociale » au milieu du XIXe siècle, Émile Cheysson, propose une formule délicate pour penser cette relation. Il dit de l’ouvrier, qui « n’est qu’une portion de l’homme, parce qu’il ne met en jeu que son intelligence et ses bras », que « sa tâche est définie avec précision par la machine qu’il conduit ». En d’autres termes, la machine prescrit à l’ouvrier les actes qui la dirigent39. En 1874, Engels déjà ne disait, magnifiquement, pas autre chose de la vapeur qui ordonne les mouvements de l’usine moderne : « L’autorité de la vapeur n’a cure de l’autonomie des individus ». Il étendait aux armes sa pensée, dont il est difficile de prendre toute la mesure de qui l’a partagée (et la partage encore) : « Une révolution est certainement la chose la plus autoritaire qui soit, c'est l'acte par lequel une fraction de la population impose sa volonté à l'autre au moyen de fusils, de baïonnettes et de canons, moyens autoritaires s'il en est ». Autre matérialité, récente, de la technique investie par l’autorité, celle de l’algorithme. Depuis peu, des auteurs américains parlent de l’algorithmic boss qui gouverne et juge les actes des praticien·ne·s des réseaux comme les chauffeur·e·s d’Uber, les livreuses et livreurs des plateformes, les influenceuses et les influenceurs40.

C’est donc en toute conscience qu’écrits, images, plans, graphiques, machines, installations industrielles et numériques, armes sont littéralement et concrètement, matériellement, chargés d’autorité afin d’agir tout autant à distance qu’au contact, un peu comme l’architecture qui se fait la maîtresse de nombre de gestes de la vie. L’action sociale des objets de toute sorte, orientée par des techniques elles-mêmes opérées par des humains, est une actrice incontestable et délibérée de l’autorité (laissant de côté la considération des choses dans la disposition desquelles les humains ne sont pas intervenus). Certes, il n’y a rien là de nouveau. L’église catholique, pour se consolider même dans les lieux les plus reculés, envoyait des reliques lestées d’une « autorité indiscutée41 ». Ce qui fait scansion historique pour constituer notre période est le recours réglé et articulé d’un côté à la science, de l’autre à l’art.

Allant jusqu’à aujourd’hui, nous devrions tenter de mesurer l’effet d’autorité de ces objets incroyablement intenses en technique que nous ne laissons quitter notre main et nos yeux qu’avec difficulté tant ils se sont imposés dans nos activités, anciennes ou créées par ces engins-mêmes. Nul hasard que leur action sur nous puisse être nommée autoritaire, ou d’autorité. Charger d’autorité l’écran, les réseaux et les « applis » fait partie des tâches premières des professions concernées : paraphrasant Cheysson, nous dirons que nos occupations sont définies avec précision par le portable que nous activons. Ces occupations sont notre vie même, non plus seulement sa part de travail. Comme pour les machines, d’immenses organisations de techniciens, d’ingénieurs, de concepteurs, d’ouvriers, de financeurs, de gestionnaires, procèdent à cette « définition » de nos actes jusqu’en leurs aspects les plus matériels, et non pas pour autant moins impératifs.

Ce qui n’est pas dire que la destruction des usines et la dissolution des armées de masse en finiraient avec l’engagement des humains. La prise en charge croissante, par les machines, du travail physique et mental et aussi de l’activité guerrière (du moins dans les pays les plus puissants) désertifie les lieux traditionnels de l’autorité de commandement. D’autres espaces, liés à la personne et connectés, où capter de la valeur, se constituent, qui ne sont plus ceux de la dépense de la force de travail, mais de la dépense de la force vitale. Influenceuses et influenceurs y incarnent à merveille la capacité de suggérer naguère déposée dans des textes et autres images ou réalisations graphiques... Une activité, un métier, une profession, un gagne-pain est en pleine croissance, en pleine prolifération et en pleine définition. Les significations que trouvent les termes d’influenceur et influenceuse sont des plus variées, depuis la jeune youtubeuse qui vante des produits cosmétiques jusqu’au journaliste et au politique42. L’influencisme s’affirme comme une substitution avantageuse de l’affiche, de l’annonce et de l’autorité qu’ils portent en quelque domaine que ce soit. Dès lors, après que le terme d’influence se fut lentement substitué à celui de suggestion, celui d’influenceuse et d’influenceur est-il en passe de remplacer même celui de leader qui paraissait jusqu’à présent indépassable ?

Le leader politique d’aujourd’hui, notamment dans sa déclinaison démagogique et populiste, prétend suivre les masses plutôt que les conduire. La phrase de Poutine (« Je suis ce que le peuple veut que je sois ») est symptomatique de cette dérive qui renverse les rôles du « qui suit qui ». Il reprend à sa manière le « Je suis leur chef, donc je les suis » qui est une antienne bien connue utilisée depuis le XIXe siècle et renforcée par la vague populiste. L’influenceur et l’influenceuse, en revanche, semblent vouloir réaffirmer un ordre causal plus classique dans la détermination de l’action d’autrui, à l’aide toutefois d’instruments nouveaux, de scènes de représentations inédites et d’autres modes d’engagement de soi. Mais même ces chefs qui annoncent qu’ils suivent n’en abandonnent pas pour autant, par d’autres voies, l’affirmation directe de ce qu'ils veulent qu'il soit fait.

La figure du chef se construit au XXe siècle. Elle est liée au monde industriel et à la mobilisation des masses pour la production, la guerre et la révolution, et à toutes les réflexions qui concourent à leur essor et à leur justification.

Yves Cohen montre que la figure du chef n’est pas une abstraction qui serait reconstruite a posteriori par les historiens mais une fabrication des acteurs eux-mêmes. Les composantes en sont multiples et de diverses espèces. Le nom est stabilisé, au moins ceux de chef, de leader, de Führer ou en russe de vojd’, de rukovoditel’ et de nachal’nik. Ledit chef est doté de qualités, de caractères, de traits. Il est présenté en de multiples récits. Il est pourvu d’attributs matériels, épaulettes, blouse, sifflet, carnets, téléphone, etc., de titres, sans parler d’avantages et de pouvoirs spécifiques. Les formations l’équipent de savoir-faire, de la parole en public, de la connaissance de l’autre… Mais plus : la figure est réflexive et la « personnalité du chef » est un thème de formation. Destinée à produire le social, elle est élaborée par les penseurs immanents, chefs eux-mêmes souvent, en même temps que par les sciences humaines et sociales, psychologie sociale, sociologie, histoire, anthropologie.

De ces sciences, Caroline Hervé traite ici l’anthropologie. L'article montre comment cette discipline se saisit progressivement, à partir du milieu du XIXe siècle, en France, en Grande-Bretagne et aux États-Unis, de la thématique des figures de pouvoir parmi les peuples colonisés. Les réticences sont grandes à reconnaître la politique quand il n’y a pas d’État ou à voir en quoi les chamanes sont des acteurs politiques. Tandis que les travaux anglophones sur les chieftainships se développent assez tôt, ils restent rares en France avant 1940. Sur place, les enquêtes conduisent à maintes reprises la curiosité pour les « chefs » à des conséquences qui consistent, de la part des populations, à les dissimuler ou à les créer faussement ou encore à entraîner la création d’intermédiaires chargés d’en tenir lieu. La prégnance de la figure du chef dans les cultures modernistes est telle que l’anthropologie universalise le chef en le produisant là où il n’existe pas.

Volontaire

« Tu t’es inscrit comme volontaire ? » Affiche de la Guerre civile en Union soviétique, 1920.

Les grands, les charismatiques, les images, les chefs : tous donc à un titre ou à un autre sont porteurs d’autorité : qu’elle soit celle de qui, par la grandeur, surplombe les personnes ordinaires ; celle de qui, chef ou leader, se charge de commander ou de guider ; celle de qui, charismatique, est doté d’une aura d’exception ou d’un surcroit de qualités uniques qui lui sont attachées ou attribuées ; ou encore celle d’images, le plus souvent associées à du texte, spécialement conçues et configurées à cet effet.

De façon surprenante, on perçoit que ces formes, du grand, du chef et du charismatique, ne sont pas seulement des idéaux pour comprendre le présent et y agir. Elles se prêtent à imaginer le futur. Il y a là assurément un certain millénarisme. Carlyle ne pense-t-il pas à « l’avènement d’un monde qui sera tout entier peuplé de héros » ? Car « (s)i héros signifie homme sincère, pourquoi serait-il exclu que nous devenions tous des héros ? »43. Mary Follett, spécialiste américaine de la formation des cadres n’écrit-elle pas en 1919 qu’« aussitôt que nous seront données les occasions de lâcher l’énergie que nous avons en nous, héros et chefs vont survenir parmi nous (heroes and leaders will arise among us) » 44 ? Weber n’offre pas une telle anticipation. Toutefois, en retraversant à rebours les lectures du rapport de Weber à Sohm, Paulo Napoli nous réintroduit à la perspective oblitérée par Weber, celle de la première assemblée chrétienne aux charismes distribués sans aucun souci hiérarchique. Ne serions-nous pas invités par là à lire à ce prisme les expérimentations démocratiques dont ces dix dernières années nous donnent à voir le si riche spectacle des assemblées horizontales des places, des ronds-points et des cours d’immeuble (comme en Biélorussie), où toutes et tous, chacune et chacun seraient des grands, des chefs et des charismatiques45 ? Non plus donc au futur, mais au présent ? La philosophe féministe américaine Grace Lee Boggs, interrogée à 95 ans, en 2011, sur la montée de l’« activisme durable » et la multiplication des groupes qui réinventent une vie locale, se voit demander si elle connaît des leaders qui prônent un tel changement. Elle répond : « Non, je ne vois aucun leader. Je pense que nous devons repenser le concept de leader. Leader suppose pouvoir. (…) Je pense que nous devons faire nôtre et répandre l’idée que nous sommes les leaders que nous cherchions (we are the leaders we’ve been looking for ) 46 ».

Figures humaines et porteurs matériels : l’autorité n’a peut-être rien perdu de sa puissance en dépit d’un certain effacement du chef de l’ordre industriel et de la société de masse – quand celui-ci se maintient dans l’ordre politique des pays autoritaires, sinon pires. Si le chef était depuis longtemps tout le contraire de l’homme sans qualités de Robert Musil, son antithèse contemporaine, on peut distinguer le moment où il pourrait rejoindre le magasin de Molière et, parmi bien d’autres figures, le tartuffe, le bourgeois gentilhomme et le misanthrope.

Les formes de l’autorité évoquées sont discursives et complexuelles. Elles n’en sont pas pour autant le côté discours d’une opposition si fréquente, trop fréquente, entre pratiques et discours. Elles sont pratiques, elles relèvent de pratiques qui contribuent à construire le social. Elles sont produites dans leur activité spécifique par des écrivains, des artistes, des artisans, des psychologues, des sociologues, des anthropologues, des historiens, des philosophes, des managers, des administratifs, des politiques bien entendu et des journalistes47. Ces pratiques s’articulent à d’autres pratiques liées à l’exercice même de l’autorité et leur fournissent justification, instrumentation, orientation. Puisse l’investigation historique à faces multiples qui est présentée dans cet atelier contribuer à en élucider les formes du présent.

Déplier la liste des notes et références
Retour vers la note de texte 13760

1

Cette introduction a bénéficié des remarques d’Eric Michaud et Paolo Napoli. Qu’ils en soient remerciés ici.

Retour vers la note de texte 13761

2

Il est paru récemment, cet atelier étant déjà composé, un ouvrage remarquable de Claire Oger sur l’autorité dans les espaces institutionnels et sur ce qui « fait référence », et donc aussi sur d’autres formes que celles dont il s’agit ici, et en particulier l’autorité intellectuelle, Faire référence. La construction de l'autorité dans le discours des institutions, Paris, Editions de l’EHESS, 2021.

Retour vers la note de texte 13762

3

François Hartog, Régimes d'historicité. Présentisme et expériences du temps, Paris, Seuil, 2003.

Retour vers la note de texte 13807

4

 Nilüfer Göle, Richard Rechtman, Sandra Laugier, Yves Cohen, Revendiquer l’espace public, Paris, CNRS Editions, 2022.

Retour vers la note de texte 13763

5

Pierre Legendre, L'Empire de la vérité - Leçons II, nouvelle édition: Introduction aux espaces dogmatiques industriels, Paris, Fayard, 2001 ; Alain Touraine, La Fin des sociétés, Paris, Seuil, 2013.

Retour vers la note de texte 13764

6

Julien Turgan, Les Grandes usines, études industrielles en France et à l'étranger, Paris, Michel Lévy frères, 15 vol., 1868-1884.

Retour vers la note de texte 13765

7

Dernièrement Larissa Zakharova, De Moscou aux terres les plus lointaines. Communications, politique et société en URSS, Paris, Éditions de l’EHESS, 2020.

Retour vers la note de texte 13766

8

Immanuel Wallerstein, Le Capitalisme historique, Paris, La Découverte, 1983.

Retour vers la note de texte 13767

9

Voir Yves Cohen, « La figure du chef en France, Allemagne, Union soviétique et aux États-Unis de 1890 à 1940 », à paraître dans Politika. 

Retour vers la note de texte 13769

11

Nicolas Ostrovsky, Et l'acier fut trempé..., Paris, Éditions sociales internationales, 1937.

Retour vers la note de texte 13770

12

Charles de Gaulle, « L'action de guerre et le chef », Revue militaire française, 1er mars 1928.

Retour vers la note de texte 13771

13

Serge Berstein, Pierre Birnbaum, Jean-Pierre Rioux et al., « De Gaulle et les intellectuels : histoire d'un différend », in Serge Berstein, dir., De Gaulle et les élites, Paris, La Découverte, 2008.

Retour vers la note de texte 13772

14

Woodrow Wilson, Leaders of men, Princeton, Princeton University Press, 1952, p. 42 (à partir d’un manuscrit de 1890).

Retour vers la note de texte 13773

15

Floyd H. Allport, Social Psychology, Boston, Houghton-Mifflin, 1924, p. 419.

Retour vers la note de texte 13774

16

Emory Bogardus, Leaders and leadership, New York, Appleton-Century Co, 1934, p. 13.

Retour vers la note de texte 13775

17

Henri Fayol, directeur général d’entreprise et fondateur de l’« administration scientifique », s’interroge dans une note de terrain de 1913 : « Grands chefs. 20 Jt [juillet] 1913. On sait par expérience combien il est difficile de rencontrer, réunies en un seul homme, toutes les qualités qui font le bon chef d’industrie ; quand il s’agit de très grandes entreprises, la difficulté est presque insurmontable. Par exception, des organisateurs de premier ordre se manifestent, mais ce sont des exceptions ; les géants sont encore plus rares dans le monde intellectuel que dans le monde physique. Le plus grand obstacle aux très grands groupements, c’est l’absence d’hommes ». Centre d’histoire de Sciences Po, fonds Fayol, HF4, s.d. (1913), man.

Retour vers la note de texte 13776

18

Voir sur l’autorité contemporaine Emmanuel Droit et Pierre Karila-Cohen, dir., Qu'est-ce que l'autorité ? France-Allemagne(s), XIXe-XXe siècles, Paris, Editions de la MSH, 2016 et Kathya Araujo, El miedo a los subordinados. Una teoría de la autoridad, Santiago, LOM Ediciones, 2016.

Retour vers la note de texte 13777

19

Alexandre Kojève, La Notion de l’autorité, Paris, Gallimard, 2004.

Retour vers la note de texte 13778

20

Alexandre Kojève, La Notion de l’autorité, Paris, Gallimard, 2004, juste avant p. 57.

Retour vers la note de texte 13779

21

Alfred Binet, La Suggestibilité, Paris, Schleicher, 1900 (rééd. Paris, L’Harmattan, 2005, disponible en ligne sur Gallica).

Retour vers la note de texte 13780

22

Clara E. Espey, Leaders of girls, New York et Cincinnati, The Abingdon Press, 1915. Un de ces exemples est L. H. Moore, « Leadership Traits of College Women », Sociology and social research, vol. 17, 1933. 

Retour vers la note de texte 13781

23

Ordway Tead, Art of leadership, New York, McGraw-Hill, 1935, p. 237-256.

Retour vers la note de texte 13782

24

Robert Belot, Henri Frenay. De la résistance à l’Europe, Paris, Seuil, 2003, p. 318.

Retour vers la note de texte 13784

25

François Terré, « Présentation », in A. Kojève, o. c., p. 24.

Retour vers la note de texte 13785

26

Parmi les onze qu’il sélectionne, on trouve Odin, Mahomet, Dante, Shakespeare, Luther, Cromwell et jusqu’à l’insurpassable Napoléon Bonaparte, comme le montre Sabina Loriga dans cet atelier.

Retour vers la note de texte 13786

27

Max Weber, « Le métier et la vocation de l’homme politique », in Le Savant et le politique, Paris, 10/18, 1963, p. 103.

Retour vers la note de texte 13787

28

Max Weber, Économie et société, Paris, Pocket, 1995, 2 vol.

Retour vers la note de texte 13788

29

Jacques Ellul, Propagandes, Paris, Armand Colin, 1962, p. 265-266. Voir le chapitre d’E. Michaud, p. xxx.

Retour vers la note de texte 13789

30

Charles Féré, Sensation et mouvement. Études expérimentales de psycho-mécanique, Paris, F. Alcan, 1887.

Retour vers la note de texte 13790

31

Raymond Williams, « Advertising : the Magic System » (1960-1969), Culture and Materialism. Selected Essays, Londres, New York, Verso, 2005, p. 170-195.

Retour vers la note de texte 13791

32

Walter D. Scott, The Theory of Advertising. A Simple Exposition of the Principles of Psychology In Their Relation to Successful Advertising, Boston, Small, Maynard & Company, 1903. L’ouvrage est réédité en 1907 et 1921, puis récemment en 1985 et 2012.

Retour vers la note de texte 13792

33

Walter D. Scott, The Theory of Advertising, Boston, Small, Maynard & Company, 1903, p. 74, souligné par l’auteur.

Retour vers la note de texte 13793

34

Walter D. Scott, The Theory of Advertising, Boston, Small, Maynard & Company, 1903, p. 66.

Retour vers la note de texte 13794

35

Walter D. Scott, The Theory of Advertising, Boston, Small, Maynard & Company, 1903, p. 13.

Retour vers la note de texte 13796

36

Georges Charpy, « Conférence sur l'interchangeabilité et l'usinage en série », Bulletin des Usines Renault, n° 34, 15 décembre 1919, p. 12.

Retour vers la note de texte 13797

37

Edmond Landauer, « La direction à distance », in L’Organisation Scientifique du Travail (ive congrès international, Paris, 1929), Paris, Comité national de l’Organisation française, 1929, p. 6 

Retour vers la note de texte 13795

38

Richard Thaler et Cass Sunstein, Nudge : la méthode douce pour inspirer la bonne décision, Paris, Vuibert, 2010 (1e éd. américaine, 2008, Paris, Pocket, 2012).

Retour vers la note de texte 13798

39

Émile Cheysson, Le Rôle social de l'ingénieur, Paris, Librairie Guillaumin et Cie, 1897.

Retour vers la note de texte 13799

40

S. O’Connor, « When your boss is an algorithm », Financial Times, 8 septembre 2016, page consultée le 8 janvier 2021, J. Prassl, Humans as a service: The promise and perils of work in the gig economy, Oxford, Oxford University Press, 2018 et A. Rosenblat, Uberland: How algorithms are rewriting the rules of work, Los Angeles, University of California Press, 2018. Merci à Brooke Duffy (Cornell University) pour avoir indiqué cette piste (“Algorithmic precarity in cultural work », First Published September 30, 2020 Research Article, https://doi.org/10.1177/2057047320959855.

Retour vers la note de texte 13800

41

Peter Brown, Le Culte des saints : son essor et sa fonction dans la chrétienté latine, Paris, Éditions du Cerf, 1984, p. 118. Voir Bruno Latour, « Mixing Humans and Non-Humans Together : The Sociology of a Door-Closer », Social Problems, 1988, vol. 35, n° 3, p. 298-310 et id., « On technical Mediation », Common Knowledge, vol. 3, n° 2, 1994, p. 29-64.

Retour vers la note de texte 13801

42

Brooke Erin Duffy et Megan Sawey, ““There’s nobody left to influence anymore”: Service and value among the Instagram creator community”, in S. Cunningham & D. Craig, dir., Creator culture: Understanding the social media entertainment industry, New York, New York University Press (sous presse).

Retour vers la note de texte 13803

44

Mary P. Follett, The new state. Group organization the solution of popular government, New York, Longmans, Green, 1918, chap. xxv, Leaders or bosses? , (page consultée le 8 septembre 2008).

Retour vers la note de texte 13804

45

Voir le dossier « La démocratie de la place publique » coordonné par Nilüfer Göle et Yves Cohen, Politika, décembre 2018.

Retour vers la note de texte 13805

46

https://progressive.org/dispatches/we-leaders-looking-for-grace-lee-boggs/, page consultée le 12 janvier 2021 (merci à Gregory Pappas pour cette indication)

Retour vers la note de texte 13806

47

Voir Claire Oger, Faire référence. La construction de l'autorité dans le discours des institutions, Paris, Éditions de l’EHESS, 2021.