
Le drapeau national marocain projeté sur l’écran géant, Festival des Cerises, Sefrou, 2019.
Festivalisation culturelle, réinvention de l’histoire et construction de la « marocanité »
Actuellement, au Maroc, environ 200 festivals culturels sont célébrés chaque année. Ces évènements sont le résultat d’une série de politiques culturelles inaugurées par l’État à partir de la fin des années 1950, dans le but de promouvoir l’image d’un Maroc ouvert aux diversités internes et externes aux frontières nationales. Le processus de festivalisation de la culture marocaine consiste souvent en la transformation, opérée par l’État, des moussems1 – foires à caractère rural, célébrées dans la plupart des cas en l’honneur d’un marabout (selon un calendrier agricole et/ou religieux) – en événements nationaux dédiés à la socialisation, à l’intériorisation et à l’incorporation des symboles de l’État2.
Aujourd’hui, on compte environ 800 moussems3. Cependant bon nombre d’entre eux ont subi, au fil du temps, des transformations considérables, à travers un processus d’adaptation à un modèle international urbain. Cette transformation constitue l’un des résultats les plus évidents et spectaculaires de la diplomatie culturelle étatique4.
À partir de 1956, année de l’indépendance, la célébration des moussems devint un instrument utile à la diffusion d’une idéologie nationaliste visant à renforcer la légitimité spirituelle et politique des souverains alaouites (la dynastie régnante au Maroc). Les élites marocaines entreprirent une opération de domestication de l’histoire5 dans le but d’établir une coïncidence entre mémoire dynastique et mémoire nationale6. Il s’agissait d’une opération intellectuelle d’envergure qui a nécessité, entre autres, la mobilisation de toute une série de processus d’invention de la tradition, de récupération stratégique et de mise en spectacle du passé. Pendant la lutte des mouvements nationalistes qui a éclaté au Maroc à partir des années 1930, les nationalistes avaient institué la Fête du Trône, célébrée la première fois en 1933, consacrant définitivement la fusion entre le peuple et la nouvelle figure politique du Roi qui devait libérer et réhabiliter le destin du pays. La « personnalisation » de la lutte anticoloniale fut une opération tout sauf évidente, qui a nécessité le déploiement de moyens importants pour la recherche et la sélection, au sein du passé historique et mythique du Maroc, d’une série d’éléments en mesure de légitimer et de fonder l’image et le rôle du souverain. C’est dans ce cadre que s’est opérée l’assimilation de la figure du Roi à celle du saint ou du marabout. Dans les faits, l’expérience de l’exil à Madagascar (1953-1955) permit au sultan Muhammad Ben Yusuf, futur Mohammed V, de se présenter comme un « martyr » et comme un leader charismatique, politique et religieux, emblème de la résistance nationale. Avec son avènement sur le trône en 1957, la monarchie marocaine est née, institution clé d’un système à la fois politique et religieux.
La capacité de la monarchie à réarticuler sa légitimité idéologique s’est exprimée également par une utilisation habile des médias et des cérémonies politiques. Ainsi, à partir de 1956, la nationalisation massive des moussems commença. Cependant, tout aussi significatif fut le processus de création de nouveaux festivals nationaux et internationaux, entrepris par la monarchie en 1959, lorsque Mohammed V inaugura le Festival national des arts populaires. La première édition de ce Festival fut présentée par Meriem Aherdan, épouse de l’ancien ministre Mahjoubi Aherdan, comme la rencontre historique entre les différentes composantes d’une communauté nationale enfin libérée de la domination occidentale et prête à revenir, avec une « indépendance retrouvée », à une « authentique » culture marocaine. En postulant l’existence d’une tradition historique et culturelle partagée, le phénomène-festival visait, à l’origine, à l’adhésion du peuple marocain à un héritage censé refléter son « âme profonde7 ».
Pour certains chercheurs, les festivals, qu’ils soient « dérivés » des moussems ou d’une création plus récente, représenteraient un moyen spectaculaire, efficace et sophistiqué des politiques culturelles étatiques, loin des rhétoriques d’apolitisme qui caractérisent, dans la plupart des cas, la médiatisation de ces événements publics.
André Azoulay, fondateur du Festival Gnawa d’Essaouira et conseiller de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, est l’un des promoteurs les plus influents de ce que l’on pourrait définir un processus de réinvention de l’histoire, de la mémoire et de la nation. Pendant la semaine « sacrée » du Festival Gnawa, Essaouira se transforme en un « sanctuaire urbain », théâtre de rituels prônant les principes de coexistence interculturelle et interreligieuse8. Le cas d’Essaouira (1998) est chronologiquement précédé par celui de Fès (1994), ville également désignée par le discours officiel comme un lieu sacré. Les espaces urbains et les éléments architecturaux de l’ancienne médina deviennent, selon Faouzi Skali, anthropologue, chérif, maître soufi, fondateur de la Fondation Esprit de Fès, organisatrice du Festival de Fès des musiques sacrées du monde, les composantes d’un paysage de l’âme9.
Revitalisation du soufisme et lutte à l’islam « engagé »
Dans sa recherche sur les Gnawa (descendants d’esclaves de l’Afrique subsaharienne) du sud du Maroc, Viviane Pâques a mis en évidence la grande influence que les performances médiatisées par la télévision ont joué dans le processus de mise en scène de la transe gnawa dès les années 198012. Dans ce contexte, elle a souligné le passage « du rituel au spectacle ». Les études de Viviane Pâques, tout comme celles de Cynthia Becker13 et de Deborah Kapchan14, se sont concentrées sur la médiatisation de la transe soufie, ainsi que sur la prolifération des performances soufies qui a entraîné une augmentation incontrôlée de la malléabilité de la performance.
Entre la fin des années 1990 et les premières années 2000, l’État entreprit une véritable « politique musicale15 », en se servant de personnalités politiques qui étendirent leur soutien à un grand nombre de festivals16. Parallèlement, à partir du début des années 2000, on a assisté à l’institutionnalisation du phénomène-soufi – qui s’est exprimé principalement par la nomination ministérielle de certains membres de la confrérie Qadiriyya Boutshishiyya – et à la récupération promotionnelle du soufisme, qui s’inscrivait dans une dynamique politique de contrôle et de lutte contre un certain islam « radical »17.
En même temps, les processus de festivalisation ont contribué à la production d’un « soufisme universalisé ».

Performance de la Tariqa Darkawiya, Festival de Fès des musiques sacrées du monde, 2022.
Depuis le 11 septembre 2001, la médiatisation et la fabrication d’un « soufisme enchanté18 » ont eu pour double objectif de produire une nouvelle forme de religion inclusive – fondée sur la paix et la coexistence interculturelle – et de moderniser le phénomène pour un public de plus en plus attiré par les mondes du tourisme sacré et de la marchandisation culturelle et religieuse. Le projet du Festival de Fès des musiques sacrées du monde a vu le jour au début des années 1990, à la suite de la guerre du Golfe. Le Festival – dont la première édition a été célébrée sous le patronage du ministère des Affaires culturelles – a été initié par les organisateurs dans le but de diffuser un message d’ouverture et de tolérance, à travers la réalisation d’une « reconnaissance mutuelle de la diversité des cultures et des spiritualités19 », et de construire « un pont vers l’humanisme mondial20 ». Dès sa seconde édition, l’événement est placé sous le haut patronage du Roi. En 2001, l’Unesco a désigné le Festival de Fès des musiques sacrées du monde comme l’une des manifestations publiques contribuant le plus à la diffusion de la paix dans le monde. Après le 11 septembre 2001 et les attentats qui ont eu lieu à Casablanca en 2003, le Festival a pris de nouvelles significations politiques, dans la perspective de s’opposer aux formes internes d’extrémisme religieux et de promouvoir une version tolérante de l’islam, marquant un tournant avec lequel les festivals marocains sont devenus de véritables « counter-terror spectacles21 ».
Performer le religieux dans la sphère publique fassie
Au cours de mes recherches, j’ai examiné les relations entre les performances culturelles étatiques et les politiques identitaires dans le Maroc contemporain, ainsi que la réarticulation et la médiatisation d’une sphère publique nationale dans une société à majorité musulmane. Le travail de terrain a été mené, à plusieurs reprises, de 2019 à 2022, à Fès et à Sefrou. À partir de l’observation des performances, en tant que technologies de production et d’imagination de la culture et de l’histoire nationales, j’ai analysé certaines pratiques liées à l’organisation du champ politique et religieux marocain. J’ai donc interrogé les liens entre représentations et mémoire dans le cadre des mécanismes de formation et de consolidation d’un dispositif rituel et symbolique stratifié destiné à la fois à réaffirmer et à transcender sa dimension nationale. L’entité étatique se révèle ainsi un artefact culturel qui doit être contextualisé au sein de dynamiques transnationales spécifiques22. J’ai choisi d’étudier l’État représenté et imaginé, en explorant la production et la circulation des discours culturels, en questionnant leur réception, leur réélaboration et leur mobilisation. Lucette Valensi a montré comment, dans la narration nationale du Maroc postcolonial, le Roi a joué un rôle clé dans la recherche de nouvelles formes d’écriture de l’histoire pour conquérir et contrôler les connaissances sur le passé23. Les processus contemporains de la mise en festival de la culture et du religieux se situent dans une relation de continuité avec ces opérations. De mon côté, j’ai examiné la mise en performance du religieux, dans le cadre spécifique du Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde, et plus généralement, dans la sphère publique nationale et islamique.
À la fin des années 1990, certains chercheurs ont observé, dans la plupart des États à majorité musulmane, l’apparition de nouveaux moyens et de nouvelles formes de communication. Par son action monopolistique, l’État a mis en œuvre des stratégies renouvelées pour dicter aux citoyens les conditions nécessaires afin d’atteindre la condition considérée comme moderne. Ces prérogatives concernaient donc toute une série de « compétences » fondamentales en matière de modèles de civilisation, de modalités d’appartenance à une communauté de croyants et de citoyens. Il faut souligner que les discours concernant les identités religieuses ne sont jamais séparables de ceux qui portent sur les identités politiques, ethniques et linguistiques et que la détermination de l’univers des politiques islamiques implique une série de personnages : les érudits en matière religieuse, les « intellectuels laïcs, les mères, les dirigeants gouvernementaux et les musiciens24 », qui invoquent les symboles de la condition humaine aptes à opérer une reconfiguration des limites du débat civique et de la vie publique. L’enquête de terrain a montré qu’aborder le thème du politique dans le monde musulman signifie mettre l’accent sur les processus d’interprétation des idées et des symboles que les musulmans, dans divers contextes, identifient comme « islamiques » et sur les dynamiques conflictuelles de construction et de représentation du discours public à différents niveaux. Si le politique peut être aussi appréhendé comme une lutte autour de l’imagination des gens, dans ce contexte, la compétition pour le sens des symboles joue un rôle fondamental, tout comme les ambitions de contrôle des institutions culturelles.
Le thème de la vingt-sixième édition du Festival de Fès des musiques sacrées du monde, au centre de mes recherches, était « L’architecture et le sacré ». Il s’inscrivait dans le débat politique sur la ville islamique, mettant en valeur un supposé lien intime entre l’identité de la ville et celle du festival.

Performance de l’Académie Kathak avec les Roohani Sisters, grand spectacle d’ouverture de la vingt-sixième édition du Festival de Fès des musiques sacrées du monde, 2022.
La cérémonie d’ouverture, présidée par Son Altesse Royale la Princesse Lalla Hasnaa, a eu lieu le soir du 9 juin 2022. Sur les murs séculaires de Bab Al-Makina ont été projetées des formes architecturales des lieux saints de l’islam, du christianisme, du judaïsme, du bouddhisme et de l’hindouisme : la Bucinaniyya – ancien cadran solaire hydraulique qui marquait l’heure de la prière à Fès – se transfigura dans la rosace de la nef centrale de Notre-Dame de Paris ; ensuite, les vingt-cinq mille pièces de verre coloré se métamorphosèrent dans le sable, celui de mandalas tibétains aux couleurs vives, symboles de l’éphémère de la vie terrestre. De l’éphémère symbolisé par les mandalas, on passa, par opposition, à l’empreinte laissée par l’homme sur le cours du temps, représentée par la Mosquée Hassan II de Casablanca, dominant l’océan, construite selon le vœu du souverain en 1993. Bab Al-Makina fut « inondé » par les eaux de l’Atlantique et sur la partie centrale supérieure de la scène apparut le célèbre verset du Coran qui a inspiré la construction de la plus grande mosquée du pays : « Le trône de Dieu était sur l’eau » (Coran, 11 : 7). La célèbre chanteuse et ethnomusicologue franco-algérienne Françoise Atlan, icône internationale de la musique arabo-andalouse séfarade, ouvrit le spectacle. Ensuite, la compagnie espagnole de danse verticale Delrevés effectua des chorégraphies acrobatiques. Ce fut ensuite le tour du Chœur de Chambre du Maroc, dirigé par Amine Hadef, et du luthiste tibétain Lobsang Chonzor, qui a interprété une série de pièces tirées des chants de Milarepa, poète et maître spirituel du bouddhisme tibétain. Chonzor a partagé la scène avec l’ensemble gnawa d’Aziz Erradi, avant de céder la place aux performances de l’Académie Kathak et de la Compagnie de danse Anuj Arjun Mishra. Alors que Bab Al-Makina prenait l’apparence du Taj Mahal, les Roohani Sisters sont montées sur scène pour proposer quelques compositions célèbres de la tradition musicale qawwali. La soirée s’est ensuite poursuivie avec la performance du chanteur iranien Mohammed Motamedi, habitué de l’événement. La cérémonie s’est conclue avec la performance du Chœur Sama dirigé par Nourredine Tahiri. À 23h00, à la salle de la Préfecture, en face du Musée Batha, a eu lieu la première des quatre Sufi Nights, des performances gratuites mettant en scène un hadra (rituel collectif des confréries mystiques musulmanes pouvant conduire à la transe ou à un état d’extase), prières chantées, etc. Animés chaque nuit par une confrérie différente (Charkawiyya, Darkawiyya, Chadiliyya Fassia et Wazaniyya), ces événements participent d’un imaginaire du « sacré » véhiculé par le Festival et offert au public local et aux touristes.

Performance de la Tariqa Charkawiya, Festival de Fès des musiques sacrées du monde, 2022.
La Fondation Esprit de Fès, s’inspirant du passé mythique de Fès, héritière de l’âge d’or andalou, est à l’origine d’un projet consistant à transfigurer la ville en un grand sanctuaire qui trouve son centre dans l’islam. Une telle volonté est au cœur de la rhétorique du Festival, qui est à la base de la construction d’une « version romantique » de l’histoire multiculturelle de la ville et des dynamiques relationnelles entre les groupes. À ce propos, les activités du Forum, qui ont eu lieu le 11 juin 2022 à la Salle de conférence de l’Hôtel les Mérinides, ont été introduites et présentées par les organisateurs comme suit :
« La médina de Fès est une des illustrations parfaites de cette imbrication entre les lieux de culte, les mausolées, les cimetières et autres lieux de magie et de quête d’intercession entre les humains et les forces surnaturelles. Il y a aussi toutes les medersas, toutes les calligraphies et décorations qui citent, rappellent ou suggèrent des références de l’islam. Ces lieux et ces ornements ne sont pas en marge de la vie des gens ; ils sont dans le quotidien des populations, ils tracent leurs itinéraires et norment les lieux et les espaces qui déterminent et rythment leurs quotidiens. Cette sacralité […] est la matrice du mode de vie des habitants. »
Une jeune femme, parmi le public, a pris la parole pour mettre en lumière ce qui lui semblait être une série de paradoxes inacceptables. S’adressant aux responsables, en particulier à Driss Khrouz, directeur du Forum, elle a souligné que tandis qu’ils se livraient à de vaines célébrations de la splendeur de la médina de Fès, et tandis que les interventions des conférenciers universitaires en exaltaient la grandeur des medersas (écoles coraniques) et des lieux de culte, ces espaces étaient en réalité structurés selon une logique discriminante qui reflétait toute une série d’inégalités sociales. En outre, la jeune femme souligna que la vie quotidienne des habitants de Fès Al-Bali et de Fès Al-Jdid, l’ancienne médina et la nouvelle médina, se déroulait dans des conditions très difficiles, bien connues des organisateurs. Le Festival de Fès aurait pu accueillir et diriger des actions concrètes en soutien aux habitants de la médina, mais ces mêmes organisateurs ont évité de le faire. En effet, l’édition 2022, qui n’a duré que quatre jours au lieu de neuf, a vu la suspension des concerts gratuits organisés à Bab Boujloud destinés à un public plus large que celui qui aurait pu se permettre de payer 350 dirhams (34 euros) pour assister à un seul spectacle. Le Forum a été le théâtre de la contestation d’une narration idyllique élaborée par l’État en collaboration avec les élites politiques. La critique s’est exprimée par la mise en question des réifications spatiales opérées par les rhétoriques officielles des organisateurs. À la ville « imaginaire » de ces derniers, une participante a tenté d’opposer la ville « réelle », traversée par de profondes inégalités, qui s’inscrivent dans les mêmes lieux que les logiques institutionnelles du Festival tendent à dépolitiser et à idéaliser. Un tel exemple montre également que les festivals marocains s’avèrent être des espaces complexes de reconfiguration des relations État-ville. Les espaces urbains jouent à la fois le rôle d’investissements économiques stratégiques et d’arènes, problématisant les différentes facettes des politiques impliquées dans une situation patrimoniale. Les organisateurs de cette situation se débattent entre les défis posés par l’atteinte d’une position de premier plan sur un marché culturel national et mondial, et, de l’autre côté, par la poursuite d’un équilibre social et d’une participation dans des contextes marqués par une précarité générale des services et de graves disparités sociales.

Le Forum de la vingt-sixième édition du Festival de Fès des musiques sacrées du monde, 2022.
Au sein du Festival de Fès, la musique est supposée être la vectrice d’un message culturel et politique de réconciliation, le médium d’une catharsis collective. Selon Kapchan les traditions discrètes représentées au sein du Festival font l’objet d’une dynamique de décontextualisation continue et articulée, qui se manifeste souvent par la marchandisation de leurs esthétiques ; ces esthétiques sont recontextualisées afin de réaliser une promesse de ré-enchantement. Derrière cette promesse, à travers l’expérience du son et de la musique, vit et prolifère le marché du tourisme du sacré et, localement, les « promesses brisées » d’amélioration des conditions de vie de la population ne suppriment pas le besoin même de la promesse, jusqu’à ce que, précisément, les circonstances qui l’exigent ne soient elles-mêmes éliminées (la pauvreté, le terrorisme, la xénophobie, le racisme, etc.)25. Comme l’a suggéré Maria Curtis, la performance du sacré réalisée par le Festival de Fès modifie et altère également les conceptions locales de la spiritualité26. Pour étudier ces phénomènes, Dale Eickelman et Armando Salvatore ont promu l’utilisation d’une approche focalisée sur les processus de médiation de la religion dans la sphère publique islamique27. Cela nous pousse à considérer la religion comme une pratique de médiation qui ne peut être comprise et analysée qu’au sein des formes et des actions communicatives à l’intérieur desquelles elle se définit. Le « sacré festif » médiatisé par le Festival est donc un phénomène transnational, incompréhensible en dehors des mondes du tourisme du sacré, et donne lieu à la création d’une communauté éphémère ainsi qu’à de nouvelles esthétiques et à de nouvelles formes de fabrication transnationale du sentiment religieux.
Noblesse, hiérarchies organisationnelles et politiques du sacré
Aziz L., directeur artistique du Festival dans la ville jusqu’en 2019, chargé en 2022 de l’organisation des Sufi Nights, a déclaré que la nécessité de créer une scène à accès gratuit était principalement motivée par la volonté d’adapter la programmation artistique de l’événement au public fassi. « Les habitants de Fès », me raconte-t-il,
« n’avaient pas les moyens économiques, mais surtout, ils ne possédaient pas un niveau culturel adéquat pour comprendre les représentations. À Bab Makina, des concepts culturels complexes étaient médiés, une noblesse qui n’était pas à la portée de tous. Lorsqu’on établit une programmation artistique, il faut être conscient du public qu’on a devant soi. Donc, ils ne savaient pas ce qui se passait au Festival, ils ne pouvaient pas y assister, et même s’ils assistaient, ils ne comprenaient pas. Alors, pour toucher aussi ce type de public, il a été décidé d’organiser des performances gratuites sur la place Boujloud.28 »
Je suis arrivée à Fès le 6 juin 2022 ; le Festival devait commencer le soir du 9 juin. Dans la ville nouvelle, il y avait très peu d’affiches publicitaires pour l’événement. J’ai demandé à divers habitants de la médina s’ils savaient que, après deux ans d’interruption, la vingt-sixième édition du Festival de Fès des musiques sacrées du monde aurait lieu. Personne n’a répondu affirmativement. J’ai décidé de me rendre au siège de la Fondation Esprit de Fès, mais je n’y ai trouvé personne. Au préalable, j’avais essayé de contacter les responsables de la Fondation bien à l’avance, sans obtenir de résultat. Certains de mes interlocuteurs employés dans les bureaux municipaux et régionaux m’ont dit que le Festival de Fès des musiques sacrées du monde était une affaire entièrement interne à la Fondation, qu’ils n’étaient pas impliqués dans l’organisation de l’événement, ne figurant que comme partenaires institutionnels. Tout cela a contribué à confirmer l’idée selon laquelle le Festival de Fès est essentiellement un festival créé par des élites pour des élites et pour la classe moyenne supérieure, malgré l’universalité professée par ses discours29. Comme le souligne à plusieurs reprises Alain W., ancien directeur artistique (redevenu depuis directeur artistique de l’événement), le Festival veut se poser en moteur d’une démocratie globale. Cependant, parmi les divers groupes organisateurs, composés de Marocains et de Français, il existe souvent des relations qui oscillent entre collaboration et conflit – un conflit qui concerne souvent les trajectoires du Festival et ses aspirations. Par exemple, en commentant les aspirations de Skali, qui a quitté le Festival en 2014, Alain W. a déclaré :
« Le profane prend désormais la place du sacré. Il y a une séparation croissante entre ces deux éléments. À cause de la consommation, la musique a perdu son éthique. Le Festival est un manteau occidental pour la valorisation de la culture. C’est un phénomène polyvalent. Je suis contre la mondialisation. C’était une préoccupation de Skali, surtout, qui avait pour but de nourrir une politique religieuse d’ouverture spirituelle. Cependant, c’est un discours que nous avons historiquement construit en Europe, je veux dire, l’éducation et la culture comme moyens d’intégration des peuples. Toutefois, l’éducation occidentale ne fournit pas les clés d’une ouverture spirituelle ; au contraire, elle ouvre à une démocratie tellement dépendante de la consommation qu’elle a perdu les repères éthiques essentiels.30 »
Des conversations avec Alain émerge surtout un thème : la difficulté de négocier un chemin au sein d’une hiérarchie organisationnelle rigide. Les activités concrètes de ceux qui gèrent la programmation artistique sont marquées par d’innombrables formes de censure. Il existe des codes précis à respecter, des façons spécifiques de communiquer certains messages sur scène. Au sommet de tout ce système se trouve le Palais, qui exerce son autorité de manière indiscutable. Lors de la soirée d’ouverture de l’édition 2022, bien qu’une performance finale ait été autorisée, qui devait réunir l’ensemble Gnawa d’Aziz Erradi et l’artiste tibétain Lobsang Chonzor, en plein milieu de cette dernière performance, le président du Festival ordonna catégoriquement d’arrêter. Il réitéra à plusieurs reprises cette injonction à l’équipe et au directeur artistique. La performance fut brusquement interrompue et la soirée se termina avant l’entrée en scène d’Erradi. Mes interlocuteurs me rapportèrent que la programmation de la cérémonie d’ouverture du Festival subit souvent ce genre de changements en direct, motivés par les demandes de ceux qui se trouvent au plus haut sommet de la gestion de l’événement.
À partir de la fin des années 1990, m’a raconté Alain, la programmation du Festival a dû faire face aux transformations radicales du public, de ses goûts musicaux, ainsi à ce qu’il a appelé « l’évolution de la musique traditionnelle », accompagnée d’une mise en scène croissante des rituels musicaux et religieux.
« Ce festival », a-t-il affirmé, « a représenté pour les Marocains une occasion importante de découvrir leur propre patrimoine musical traditionnel. Dans les années 1990 le soufisme était extrêmement en vogue. Non seulement les Marocains venaient, mais aussi les Américains et les Européens, nostalgiques du New Age (c’étaient les élites cultivées ; en effet, le Festival est un festival snob). À la fin des années 1990, le public a changé… la World Music a pris une place centrale, même au Maroc… Le fait est que depuis la fin des années 1990, la musique traditionnelle a changé et les goûts aussi ! Nous, Européens, avions un certain idéal de la tradition, même de leurs traditions. Mais ici, la tradition, la tradition spirituelle, évoluait d’une manière que nous n’étions peut-être pas prêts à accepter. Nous avons cette idée du primitif, héritée de notre passé colonial. Fès garde encore un peu de cette chimère traditionnelle, bien que désormais, dans presque tous les festivals, et celui-ci ne fait pas exception, on fait de la fusion, car il faut forcément accueillir la mondialisation. L’autre grande question est que la musique s’est de plus en plus émancipée de sa fonction sociale, au profit de ses composantes artistiques et esthétiques. Regardez le soufisme, au cœur de cet événement ! Aujourd’hui, tout est soufi. Le terme a clairement laissé derrière lui son sens traditionnel pour embrasser un processus de démocratisation consumériste. Trouver un équilibre entre l’héritage du sacré et la mise en scène profane est une entreprise vraiment difficile !31 »
Le témoignage d’Alain nous permet de saisir, du point de vue des metteurs en scène, les complexités qui découlent de la gestion des dynamiques ici évoquées, notamment celle de la recontextualisation des traditions dites spirituelles dans de nouveaux environnements médiatiques devenus les cadres d’une performance touristique miroir d’un agenda gouvernemental. Le « sacré universel » supposé émaner d’une pluralité d’esthétiques décontextualisées est ici mis en scène en suivant l’idée de flux globaux qui, pour reprendre les mots d’Alain W., « font évoluer la tradition locale » et entraînent la transformation des esthétiques, des goûts, des pratiques de réception et d’élaboration de messages destinés à des audiences mondialisées. Les directeurs artistiques et, en général, ceux qui sont chargés de la création artistique, doivent également être capables de reconfigurer, comme le montre le cas de Alain, leurs propres idéaux de tradition et de négocier, avec des marges réduites de manœuvre, entre les projets imposés par les sommets des hiérarchies organisationnelles et les préférences du public. L’institutionnalisation de ces performances constitue un rappel à une forme spécifique de l’islam qui vise à définir et à promouvoir une série de liens d’appartenance, des modes de participation et de représentation des individus au sein de la société marocaine contemporaine. La monarchie entreprit, donc, une double opération : l’élimination des tendances salafistes et leur remplacement par un soufisme relativement inoffensif, ne menaçant la sécurité de la nation ; la construction d’un récit religieux national devint alors un outil fondamental pour le maintien du monopole identitaire politique et religieux de l’État.
Médiatisation et rationalisation de la transe soufie : la définition d’une identité nationale religieuse
La plasticité de la doctrine soufie contemporaine constitue la principale base de praticabilité et du succès de la politique religieuse (la nationalisation de l’islam) inaugurée par Mohammed VI. Plus précisément, les processus de reproduction technologique de la transe soufie ont été à la base de la production d’une culture étatique qui a consisté en la création de nouvelles « royal audiences »32. L’alliance entre les ordres soufis et la monarchie dans le Maroc contemporain vise ainsi à maintenir l’ordre politique et culturel dans lequel la monarchie a un contrôle absolu du champ religieux. Le revival soufi, qui s’exprime surtout par la sponsorisation de certains évènements, se révèle être le vecteur privilégié de la définition d’un champ du sacré pour les Marocains.

Performance de la Tariqa Chadiliya Fassia, Festival de Fès des musiques sacrées du monde, 2022.
La musique soufie a été, ces dernières années, l’objet d’une puissante intégration dans le marché musical mondial. Cependant, les modalités de circulation des performances soufies ont été étroitement définies par les médias nationaux. Le journal Maroc Hebdo International a décrit la foule de visiteurs au Festival Gnawa en termes d’une audience unifiée dans un rituel collectif de transe. Ainsi, par l’utilisation de stratégies discursives spécifiques, il y a eu un déplacement sémantique de la transe, de la négation à l’édification/célébration d’une modernité marocaine idéale. Ces processus de rationalisation et de divulgation de la transe ont agi selon deux logiques : celle de la marchandisation culturelle et religieuse, « domestique » et internationale, et celle de la reconstitution de l’unité politique et sociale nationale à un moment de l’histoire où les actions des mouvements islamistes représentaient, pour l’État marocain, un péril. En outre, ces performances, transportées sur une scène, font l’objet des transformations proxémiques constantes et radicales, fonctionnelles à un processus plus général de marchandisation des performances culturelles corporelles.
Comme l’a soutenu Giovanni Pizza concernant l’étude des processus de festivalisation du tarentisme salentin33, ce type d’enquêtes anthropologiques met en lumière l’attitude de nos disciplines à « cohabiter avec les processus politico-culturels […] de fabrication de l’identité34 ». Un tel phénomène peut être aussi analysé au prisme des liens entre les technologies de gouvernement et la production de savoirs, en tenant compte de la « dimension microphysique de l’État » et de la « production corporelle du sens commun »35. Faire de l’ethnographie de ces événements signifie observer comment la variété des pratiques politiques, sociales, religieuses et culturelles « islamiques » interagit avec les principes d’une sphère publique soi-disant « moderne »36. Les stratégies discursives de la monarchie nécessitent l’élaboration de représentations publiques de la vertu afin d’exercer leur autorité sur la communauté des croyants/citoyens. Ce type de communication vise au renforcement et à la promotion de certains « processus de civilisation » qui incluent des « disciplines d’appartenance » spécifiques à la nation et à la communauté des croyants. Le principe de la citoyenneté démocratique, si central dans les discours transitologiques de l’État marocain actuel, réaffirmé et performé lors des festivals nationaux et internationaux, repose sur un certain idéal de « vertu publique » qui définit les trajectoires de la « construction d’un sujet responsable envers le bien commun »37.
Notes
1
Le terme français « moussem » dérive du mot arabe « mawsim » (au pluriel mawâsim) qui signifie « saison »; cette expression est généralement utilisée pour désigner un type spécifique de fête patronale saisonnière marocaine.
2
Cf. Fenneke Reysoo, Pèlerinages au Maroc. Fêtes, politique et échange dans l’islam populaire, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1991.
3
Mohamed Berriane, Geneviève Michon et Mohammed Aderghal, « Des moussem aux fêtes et foires à thème : Image identitaire du territoire ou image de l’État ? », in Mohamed Berriane et Geneviève Michon (dir.), Les Terroirs au Sud. Vers un nouveau modèle ? Une expérience marocaine, Marseille, IRD Éditions, 2016, p. 297.
4
Le concept de diplomatie culturelle fait référence à toutes les pratiques impliquant une « purposeful cultural cooperation between sub-national, national and supranational entities » (Nick Dines, « Moroccan City Festivals, Cultural Diplomacy and Urban Political Agency », International Journal of Politics, Culture, and Society, n° 34, 2021, p. 472).
5
Daniel Fabre (dir.), Domestiquer l’histoire. Ethnologie des monuments historiques, Paris, Éditions de la Maison des sciences de l’homme, ministère de la Culture, 2000.
6
Lucette Valensi, « Le roi chronophage. La construction d’une conscience historique dans le Maroc postcolonial », Cahiers d’études africaines, vol. 30, n° 119, 1990, p. 279-298.
7
Cf. Ahmed Sefrioui, Le Festival De Marrakech, s. l., Office national marocain du tourisme, 1965.
8
Cf. Aomar Boum, « “Sacred Week”: Re-Experiencing Jewish-Muslim Co-Existence in Urban Moroccan Space », in Glenn Bowman (dir.), Sharing the Sacra: The Politics and Pragmatics of Intercommunal Relations around Holy Places, New York, Berghahn, 2015, p. 139-155.
9
Faouzi Skali, Esprit de Fès, Casablanca, Langages du Sud, 2015.
10
Maurice Halbwachs, Les Cadres sociaux de la mémoire, Paris, Félix Alcan, 1925.
11
Cf. Jan Assmann, La Mémoire culturelle : Écriture, souvenir et imaginaire politique dans les civilisations antiques, Paris, Aubier, 2010 [1992].
12
Viviane Pâques, La Religion des esclaves. Recherches sur la confrérie marocaine des Gnawa, Bergame, Moretti & Vitali Editori, 1991.
13
Cynthia Becker, « “We Are Real Slaves, Real Ismkhan”: Memories of the Trans-Saharan Slave Trade in the Tafilalet of South-Eastern Morocco », The Journal of North African Studies, vol. 7, n° 4, 2002, p. 97-121.
14
Deborah Kapchan, Traveling Spirit Masters: Moroccan Gnawa Trance and Music in the Global Marketplace, Middletown, Wesleyan University Press, 2007.
15
Cf. Said Graiouid et Taieb Belghazi, « Cultural Production and Cultural Patronage in Morocco: the State, the Islamists, and the Field of Culture », Journal of African Cultural Studies, vol. 25, n° 3, 2013, p. 261-274.
16
Cf. Samir Ben-Layashi, « Feet on the Earth, Head in the Clouds. What do Moroccan Youths Dream Of? », in Bruce Maddy-Weitzman et Daniel Zisenwine (dir.), Contemporary Morocco. State, Politics and Society under Mohammed VI, Londres et New York, Routledge, 2013, p. 147-160.
17
Cf. Zakaria Rhani et Aziz Hlaoua, « Soufisme et culte des saints au Maroc », in Brigitte Maréchal et Felice Dassetto (dir.), Hamadcha du Maroc. Rituels musicaux, mystiques et de possession, Presses universitaires de Louvain, Louvain-la-Neuve, 2014, p. 17-30. Ellen Lust-Okar a décrit les mécanismes de cette dépolitisation, la définissant comme le résultat de stratégies très articulées qui opèrent généralement dans les régimes où les élites politiques néo-loyalistes sollicitent et mobilisent des groupes d’acteurs, les incluant ou les excluant de la sphère politique (cf. Ellen Lust-Okar, « Divided They Rule: The Management and Manipulation of Political Opposition », Comparative Politics, n° 36, 2004, p. 159-179 ; Ellen Lust-Okar, Structuring Conflicts in the Arab World. Incumbents, Opponents, and Institutions, Cambridge, Cambridge University Press, 2005). La mise en festival de la culture marocaine s’est exprimée à travers une série de processus de « réhabilitation dépolitisante » de certains groupes internes à la société, perçus comme potentiellement « nuisibles » à la stabilisation de la monarchie, voir le cas des manifestations culturelles berbères qui ont fait l’objet de vigoureux processus de folklorisation interne et de marchandisation culturelle (cf. Aomar Boum, « Dancing for the Moroccan State: Ethnic Folk Dances and the Production of National Hybridity », in Nabil Boudraa et Joseph Krause (dir.), North African Mosaic: A Cultural Reappraisal of Ethnic and Religious Minorities, Cambridge, Cambridge Scholars Press, 2007, p. 214-365 ; Bruce Maddy-Weitzman, « Ethno-politics and Globalisation in North Africa: The Berber Culture Movement », The Journal of North African Studies, vol. 11, n° 1, 2006, p. 71-83; Jonathan Wyrtzen, « National Resistance, Amazighite, and (Re)-Imagining the Nation in Morocco », in Driss Maghraoui (dir.), Revisiting the Colonial Past in Morocco, Londres et New York, Routledge, 2013, p. 184-204). Des dynamiques similaires sont observables dans les processus de festivalisation de la dissidence des jeunes et dans les stratégies de balkanisation du rap révolutionnaire mises en œuvre par l’État marocain depuis les années 1990.
18
Cf. Jean-Loup Amselle, Islams africains : la préférence soufie, Lormont, Le bord de l’eau, 2017.
19
Faouzi Skali, Esprit de Fès, Casablanca, Langages du Sud, 2015, p. 38.
20
Abdelhak Azzouzi, « Le Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde : un pont vers l’humanisme Mondial », in Mohamed Kabbaj (dir.), Le Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde. Un émerveillement, Paris, L’Harmattan, 2011, p. 22-24.
21
Moulay Driss El Maarouf, « Local Arts versus Global Terrorism: the Manifestations of Trauma and Modes of Reconciliation in Moroccan Music Festivals », in Lizelle Bisschoff et Stephanie Van De Peer (dir.), Art and Trauma in Africa: Representations of Reconciliation in Music, Visual arts, Literature and Film, Londres, I.B. Tauris, 2013, p. 74.
22
Cf. Aradhana Sharma et Akhil Gupta (dir.), The Anthropology of the State: A Reader, Oxford, Blackwell, 2006.
23
Lucette Valensi, « Le roi chronophage. La construction d’une conscience historique dans le Maroc postcolonial », Cahiers d’études africaines, vol. 30, n° 119, 1990, p. 279-298.
24
Dale F. Eickelman et James Piscatori (dir.), Muslim Politics, Second ed., Princeton et Oxford, Princeton University Press, 2004 ; cf. Olivier Roy, L’islam mondialisé, Paris, Seuil, 2002.
25
Deborah Kapchan, « The Promise of Sonic Translation : Performing the Festive Sacred in Morocco », American Anthropologist, vol. 110, n° 4, 2008, p. 467-483.
26
Maria F. Curtis, Sound Faith : Nostalgia, Global Spirituality, and the Making of the Fes Festival of World Sacred Music, Austin, these de doctorat, University of Texas, 2007.
27
Cf. Dale F. Eickelman et Armando Salvatore (dir.), Public Islam and the Common Good, Leiden, Boston, Brill, 2004 ; cf. Birgit Meyer et Annelies Moors (dir.), Religion, Media, and the Public Sphere, Bloomington et Indianapolis, Indiana University Press, 2006.
28
Entretien avec Aziz L. fait le 11 juin 2022.
29
Cf. Taieb Belghazi, « Festivalization of Urban Space in Morocco », Critique : Critical Middle Eastern Studies, vol. 15, n° 1, 2006, p. 97-107.
30
Entretien avec Alain W. réalisé le 11 juin 2022.
31
Entretien avec Alain W. réalisé le 11 juin 2022.
32
Emilio Spadola, The Calls of Islam. Sufis, Islamists, and Mass Mediation in Urban Morocco, Bloomington et Indianapolis, Indiana University Press, 2014, p. 8.
33
Région du Sud de l’Italie hellénisée durant le Moyen Âge, le Salento est considéré comme la patrie du tarantisme.
34
Giovanni Pizza, Il tarantismo oggi. Antropologia, politica, cultura, Rome, Carocci, 2015, p. 62.
35
Giovanni Pizza, Il tarantismo oggi. Antropologia, politica, cultura, Rome, Carocci, 2015, p. 95.
36
Armando Salvatore, « Movimenti islamici, sfera pubblica, e tessuto associativo », Jura Gentium. Rivista di filosofia del diritto internazionale e della politica globale, 2005, https://www.juragentium.org/topics/islam/it/salvator.htm, consulté le 15 décembre 2022.
37
Armando Salvatore, « Movimenti islamici, sfera pubblica, e tessuto associativo », Jura Gentium. Rivista di filosofia del diritto internazionale e della politica globale, 2005, https://www.juragentium.org/topics/islam/it/salvator.htm, consulté le 15 décembre 2022.
Bibliographie
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Jan Assmann, La Mémoire culturelle. Écriture, souvenir et imaginaire politique dans les civilisations antiques, Paris, Aubier, 2010 [1992].
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