Faire profession : les auteurs et autrices de bandes dessinées

Bien que son apparition remonte au XIXe siècle et que son activité génère un chiffre d’affaires évalué – dans le cas français – à plus de 591 millions d’euros en 20201, le métier d’auteur et d’autrice de bande dessinée demeure méconnu, tant du grand public et des pouvoirs publics que des chercheurs et chercheuses en sciences sociales. De surcroît, il n’a aucune existence légale, ne figurant en tant que tel ni dans les textes juridiques, ni dans les nomenclatures administrative et fiscale. C’est ainsi que pour obtenir des droits sociaux, les personnes impliquées dans la création de bande dessinée sont obligées de se rattacher à d’autres professions que la leur. Ainsi, les auteurs et autrices de BD ont historiquement relevé de plusieurs statuts : dessinateur-reporter ou peintre-illustrateur durant l’entre-deux-guerres, ils et elles basculent dans le régime des indépendants après la Seconde Guerre mondiale, lorsque la publication en album supplante progressivement la diffusion dans la presse. En 1975, ils et elles se rattachent au statut nouvellement créé d’artiste-auteur : ce dernier, bien plus avantageux que le régime des indépendants, permet aux artistes rémunérés en droits d’auteur de bénéficier d’une protection sociale proche du régime général, sous réserve de faire valoir des revenus suffisants (ils et elles obtiennent alors le statut d’« affilié »). Bien que les auteurs et autrices de BD partagent ce statut d’artiste-auteur avec de nombreuses professions, ces professionnels semblent y occuper une place spécifique. En effet, ils et elles font partie des artistes-auteurs les plus « professionnalisés », dans le sens où ils et elles tirent la majeure partie de leurs revenus de leur activité artistique : les scénaristes BD représentent 5,2 % des affiliés (soit 307 scénaristes) dont 78,6 % sont à temps plein sur leur activité d’auteurs, et les dessinateurs et coloristes BD 12,6 % (soit 744 dessinateurs/coloristes) dont 85,8 % à temps plein. Par comparaison, les écrivains (poète, essayiste, auteurs et autrices de littérature), qui représentent 36 % des affiliés, ne sont que 60 % à être à temps plein sur leur activité d’écriture2.

Toutefois, malgré cette spécificité, les auteurs et autrices ne sont pas parvenus à obtenir un statut spécifique, potentiellement plus adapté à leurs réalités que ce statut d’artiste-auteur. Parmi les hypothèses qui expliqueraient cette situation, l’une est particulièrement récurrente : les auteurs et autrices de BD seraient « individualistes », incapables de faire corps pour défendre leur profession. Pourtant, ces dernières années, ces professionnels ont cherché à se faire entendre dans l’espace public et à faire reconnaître par les pouvoirs publics des problèmes qu’ils/elles estiment grever leur activité : précarité économique, souffrances au travail, sexisme, manque de reconnaissance sociale, statuts juridiques et fiscaux inadaptés... Ces mobilisations ne sont d’ailleurs pas nouvelles : depuis l’apparition du médium, nombre d’auteurs et d’autrices se sont organisés pour dénoncer collectivement leurs difficultés. Certains se sont même engagés dans la transformation de leur communauté de métier en un groupe professionnel à part entière, avec l’espoir que sa spécificité soit reconnue par leurs interlocuteurs, parmi lesquels l’État. Cette démarche se heurte toutefois à des obstacles : beaucoup d’auteurs et d’autrices se montrent sceptiques, sinon réticents, à l’idée d’une organisation et d’une régulation collectives de leur activité.

Il y a là une énigme : pourquoi les auteurs et autrices de BD sont-ils présentés (et se présentent eux-mêmes) comme individualistes, alors qu’ils et elles font preuve d’initiatives visant à défendre leurs intérêts collectifs ? C’est à la résolution de cette énigme qu’a été consacrée ma thèse de doctorat en sociologie3 grâce à la mise en place d’un dispositif d’enquête principalement ethnographique (septembre 2014 - janvier 2020).

Nocérino, Faire profession : les auteurs et autrices de bandes dessinées

Cette démarche nous a permis d’entrer dans ce que les auteurs et d’autrices de BD appellent leurs « ateliers » (leurs espaces de travail, partagés ou non), mais également de les suivre dans les différents lieux de sociabilité, d’échanges et de collaborations qu’ils et elles traversent, à l’instar des festivals qui occupent une place centrale dans la profession. Au gré des observations menées dans ces divers espaces, il a été possible de constater la présence de plusieurs collectifs d’auteurs et/ou d’autrices dédiés à l’émergence d’un espace de prise de parole et de partage d’expériences quant aux difficultés rencontrées par chacun et chacune. Ces espaces pouvant, parfois, être l’occasion pour les auteurs/autrices de s’accorder sur la nécessité de dénoncer certains des préjudices subis dans le métier, qu’il s’agisse de problèmes rencontrés auprès des collaborateurs (un éditeur refusant de restituer des planches originales, un auteur qui plagie, un journaliste qui fait des remarques sexistes, un diffuseur qui ne défend pas un livre, etc.), des publics (manque de reconnaissance, comportement intrusif, mépris lors des rencontres, etc.) ou au sein des administrations publiques (réformes non concertées du statut, modification des taxes et taux de cotisation, méconnaissance de l’activité par les élus ou membres des administrations, etc.). Au suivi de l’activité quotidienne des auteurs et autrices s’est donc ajoutée une observation de leurs mobilisations collectives, que ce soit dans leurs dimensions les plus publiques (marches, débrayages de dédicace, réunions d’information, etc.), mais aussi les plus privées (débriefing entre personnes engagées, réunions de consultation avec des membres des administration, échanges de courriels, etc.). Ces matériaux ethnographiques (soit près de 250 journées d’observations cumulées) ont été complétés par dix-huit entretiens semi-directifs destinés à obtenir d’autres types de données (notamment celles difficilement accessibles par l’observation : réunions auxquelles il n’a pas été possible d’assister, témoignage sur les pratiques passées, etc.) ainsi que par l’analyse de courriels échangés au sein d’un des collectifs suivis. Ont également été intégrées à l’analyse les données récoltées dans le cadre de deux études réalisées avec les États généraux de la BD, soit une enquête par questionnaires (1 469 réponses exploitables) et une enquête complémentaire par entretiens semi-directifs (n=15)4. Par ailleurs, en tant que créateur et animateur d’un blog de BD consacré à la sociologie, j’ai moi-même expérimenté de nombreux aspects du métier d’auteur, que ce soit dans sa dimension créative (scénario, dessin et colorisation), promotionnelle (dédicaces, interviews, interventions scolaires) mais aussi administrative et financière (démarches liées à la création d’un statut, production de devis et factures…). 

Ce dispositif d’enquête a ainsi permis de prendre une certaine distance vis-à-vis des différentes représentations du métier qui peuvent circuler, que ce soit au sein du lectorat de BD, des collaborateurs et collaboratrices des auteurs ou autrices, voire de ces professionnels eux-mêmes. Ces visions du métier, qu’elles soient idéalisées (cette profession serait un havre d’autonomie et d’ambiance bon enfant) ou misérabilistes (les auteurs et autrices, pris dans une compétition effrénée, seraient l’objet d’une auto-exploitation caractéristique des professions impliquées dans les industries culturelles), se sont avérées fort éloignées des conditions et pratiques réelles des individus, lesquelles se révèlent bien plus nuancées. L’enquête a ainsi révélé que l’un des enjeux majeurs pour ces auteurs et autrices était de parvenir à distinguer le « bon » du « mauvais » professionnel. Pierre Bourdieu soulignait, à propos du champ littéraire, à quel point la définition des frontières d’une activité artistique faisait l’objet de luttes importantes, relatives notamment à l’autonomie d’un champ donné5. De fait, les auteurs et autrices convoquent souvent, dans ces échanges, la notion d’« autonomie ». Toutefois il ne s’agit pas tant, dans ces discours, de l’autonomie d’un champ que de celle des individus, appréhendée comme signe du professionnalisme. On pourrait dès lors être tenté de disqualifier cette approche individualiste de l’autonomie, d’autant plus que les auteurs et autrices ont bien du mal à s’accorder sur ce qu’il convient ou non de faire pour se voir qualifier d’« autonome ». Tel n’a pas été le choix opéré ici : plutôt que de critiquer les contradictions relatives aux différentes définitions de l’autonomie portées par les acteurs et de se concentrer sur l’autonomisation supposée d’un champ, l’objectif a été de rendre compte des fondements pratiques de l’autonomisation des professionnels malgré ces désaccords. Autrement dit, l’ambition a été de restituer les pratiques qui permettent aux auteurs et autrices, dans l’interaction, de s’accorder sur ce que signifie être un « bon professionnel », c’est-à-dire un professionnel faisant preuve d’autonomie. Il est possible, pour cela, de s’inspirer des travaux d’Everett C. Hughes, selon qui l’affirmation d’une profession passe avant tout par des revendications relatives à la (re)définition d’un « faisceau de tâches » associé à tel ou tel métier, revendications qui participent de la mise en discussion de la « distribution des rôles sociaux »6. L’autonomisation sera dès lors entendue comme le fait d’intervenir avec succès dans la répartition des responsabilités dont on a la charge (que ce soit en parvenant à s’en rendre soi-même propriétaire ou à transférer tout ou partie de cette propriété vers un tiers)7. Le fait de réussir à revendiquer des responsabilités ou de parvenir à les transférer vers des tiers (comme c’est le cas du « sale boulot » décrit par E. C. Hughes8) s’apparente donc bien à une autonomisation des professionnels. Mais au-delà d’une autonomisation des individus, il s’agit également d’une autonomisation collective. C’est justement en s’accordant sur ce qui relève des responsabilités des uns et des autres, les auteurs et autrices de BD sont susceptibles de mener à l’affirmation d’un groupe social. Ils et elles peuvent ainsi revendiquer une « expertise », c’est-à-dire parvenir non pas seulement à réaliser des tâches, mais aussi à identifier des « problèmes professionnels » que seuls les détenteurs de l’expertise sont capables de résoudre9.

Reste à expliquer pourquoi les auteurs et autrices de BD peuvent défendre collectivement leurs intérêts et, dans le même mouvement, se montrer méfiants voire réticents vis-à-vis de l’appartenance à un groupe professionnel.

D’une sociologie de la BD à une sociologie générale en BD

 

La sociologie de la BD trouve son acte fondateur dans l’article de Luc Boltanski consacré à la constitution d’un champ spécifique à cette activité10. Le sociologue repère ainsi une polarisation au sein des praticiens, entre « novateurs » et « conservateurs ». Si ce travail donne un aperçu des tensions qui traversent le travail des professionnels, il se concentre essentiellement sur la problématique de la légitimité du champ et du médium. La plupart des travaux qui ont suivi se sont intéressés à cette question de la légitimité11, décrivant parfois une « artification » de la BD12. Néanmoins, si cette question de la reconnaissance de la BD peut s’apparenter à un enjeu, c’est essentiellement pour les maisons d’édition, les bédéphiles ou les journalistes spécialisés13. Les auteurs et autrices sont, de leur côté, surtout préoccupés par d’autres difficultés pratiques, liées à l’exercice de leur métier. Rares sont les publications scientifiques qui s’intéressent aux tensions propres à cette activité14. C’est essentiellement du côté de travaux des historiens qu’il faut se tourner pour entrevoir les problèmes liés à la professionnalisation du métier, processus d’ailleurs bien antérieur à l’émergence du champ repérée par Luc Boltanski15.

 

Ainsi, l’analyse proposée dans la thèse que synthétise cet article a permis de renouveler la sociologie des auteurs et autrices de BD. Cependant, l’objectif n’est pas pour autant de proposer une sociologie de la BD, laquelle impliquerait une enquête élargie auprès des autres acteurs du milieu, que ce soit les éditeurs/éditrices16, journalistes spécialisés, lectorat17 ou encore une analyse des contenus des œuvres18. La présente enquête vise plutôt à rendre compte des processus d’autonomisation qui traversent cette activité. De ce fait, cette recherche se situe au croisement de différents champs disciplinaires, à savoir la sociologie du travail, la sociologie des groupes professionnels et la sociologie politique. Ainsi, il existe différentes perspectives de généralisation des résultats, que ce soit au sein des professions artistiques, mais aussi dans l’ensemble des situations de travail frappées par des formes d’informalité (dont nous donnerons une définition dans le présent article). De la même manière, les évolutions relatives aux mouvements sociaux (baisse du syndicalisme, émergence de mobilisations populaires comme les gilets jaunes, etc.) pourraient gagner à être analysées à l’aide des outils proposés ici.

 

Mais plus encore, la thèse a également été l’occasion d’interroger la façon même de faire de la recherche en sociologue. Nous y questionnons et mettons en perspective nos propres pratiques professionnelles, non pas pour en faire des modèles, mais pour les soumettre à la discussion des pairs. Outre le fait que cela permet un meilleur contrôle des choix opérés durant l’enquête, l’objectif est d’initier une réflexion collective sur les manières de faire, ou de ne pas faire, de la sociologie. Cette réflexivité sur nos pratiques de recherche s’appuie évidemment sur les débats issus de la discipline. Cependant, elle a également été nourrie par l’utilisation de la bande dessinée comme écriture même de la thèse. En effet, le manuscrit intègre vingt-deux planches de BD, réparties en cinq séquences distinctes, dont certaines sont reproduites dans le présent article. Loin d’être une simple illustration des propos, une coquetterie graphique ou une tentative de mise en abyme, ces planches permettent d’explorer les différents moyens que la BD offre pour écrire la sociologie. La BD s’apparente à un outil d’instrumentation visuelle19 qui tout d’abord enrichit la description des situations. Elle permet ensuite d’appuyer la compréhension et l’explication grâce à de nombreuses techniques de mise en scène et de narration. Enfin, l’utilisation de l’image s’apparente aussi à un atout politique, dans le sens où elle permet de rendre plus accessible des raisonnements et analyses scientifiques, sans pour autant remettre en cause la pertinence et la complexité du propos20. Mais au-delà de ces apports, la mobilisation de la BD participe surtout à la dénaturalisation des différentes opérations d’inscription qui ponctuent la thèse, depuis la récolte des données jusqu’à leur restitution en passant par leur analyse. En changeant les habitudes et usages qui accompagnent nos pratiques de recherche, la rédaction en BD permet de prendre conscience des contraintes qui pèsent sur l’écriture scientifique (que ce soit en termes de formats ou de critères d’évaluation), et de la dimension parfois arbitraire de certaines de ces contraintes.

 

Pour toutes ces raisons, cette thèse se veut être un apport à une sociologie générale : par son fond comme par sa forme, elle interroge le rapport que nous autres sociologues entretenons avec nos sujets de recherches, nos objets et, plus généralement, notre métier.

Créer des bandes dessinées : un travail marqué par l’informalité

Lorsque les auteurs et autrices échangent sur ce qui distingue le « bon » du « mauvais » professionnel, ils et elles développent des formes de solidarité qui peuvent se structurer autour d’un certain idéal de la profession. Si plusieurs idéaux sont possibles (nous y reviendrons), il n’en demeure pas moins une « morale professionnelle » commune dans le sens que lui confère Durkheim, c’est-à-dire un « corps de règles morales » qui s’établit au sein de ce groupe social21. Ces règles, bien qu’elles soient plus ou moins implicites, n’encadrent pas moins l’activité des professionnels de la BD (auteurs et autrices mais aussi l’ensemble des personnes qui traversent ce milieu professionnel). C’est la mobilisation de ces règles qui rend justement l’activité possible, dans le sens où celles-ci orientent l’action des professionnels.

La morale professionnelle des auteurs et autrices de BD

Il est possible de regrouper ces règles par degré d’explicitation, mais également par la manière dont elles contribuent à cadrer l’activité22. Nous avons ainsi distingué :

 

  • les règles relevant d’un cadrage de l’engagement dans des relations intimes (il s’agit de règles qui valorisent le fait d’entretenir une relation privilégiée et spontanée avec ses collègues, mais aussi avec l’activité elle-même) : la participation aux moments festifs, l’attention à la singularité de chacun, la dérision et la passion du métier ;
  • celles qui relèvent d’un cadrage axé sur l’accomplissement technique de l’activité (peut-être le plus évident, il regroupe l’ensemble des règles qui rappellent qu’il faut s’assurer que les tâches liées à la production des BD sont bien réalisées) : l’anticipation des ruptures de coopération, la connaissance des techniques de création, le respect des formats de diffusion, l’anticipation des temporalités et la persévérance ;
  • celles qui produisent un cadrage désingularisant (dans ce dernier cadrage, les règles conduisent les professionnels à comparer leurs expériences avec celles de leurs collègues afin d’exprimer des principes généraux valables pour toutes et tous) : la connaissance et la défense des droits, l’affirmation de l’indépendance et l’évaluation de la qualité des objets et des personnes.

Outre cette pluralité, les observations menées nous ont également permis de constater à quel point ces règles pouvaient parfois entrer en contradiction les unes avec les autres. Les auteurs et autrices échangent ainsi sur la manière dont il est possible (et souhaitable à leurs yeux) de hiérarchiser ces règles professionnelles.

Plus encore, nous avons constaté que, parmi les différentes règles, certaines avaient un statut différent des autres, dans la mesure où leur mobilisation contribuait à maintenir un cadrage spécifique de l’action et, donc, à limiter les probabilités qu’émergent d’autres cadrages. Ces règles barrières permettent dès lors de comprendre et définir l’informalité qui caractérise cette activité : les auteurs et autrices trouvent en effet, dans les situations, davantage d’appuis pour agir en conformité avec les règles de la dérision, de la passion du métier ou de la persévérance, soit autant de règles barrières appartenant au cadrage intime pour les deux premières et au cadrage de l’accomplissement technique pour la dernière. Si le cadrage de la désingularisation dispose lui aussi d’une règle barrière (la règle de l’évaluation de la qualité des personnes et des objets), nous avons pu observer que celle-ci avait moins de chance d’être mobilisée dans l’action.

En résumé, l’activité peut être considérée comme informelle dans le sens où elle réunit les conditions propices à limiter les chances d’émergence d’un cadrage désingularisant. Notons que les auteurs et les autrices trouvent un sens particulièrement positif dans cette informalité : celle-ci, en réaffirmant l’importance de respecter le cadrage intime ou le cadrage de l’accomplissement technique, donne des appuis permettant d’honorer les règles composant la morale professionnelle. Toutefois, parce qu’elle tend à réduire l’émergence du cadrage désingularisant, l’informalité limite également les chances d’accroissement des réflexivités des auteurs et autrices sur leur action et, plus généralement, sur leur activité.

Les modalités de structuration du groupe professionnel

Cette définition de l’informalité permet de mieux comprendre comment s’organise le groupe social des auteurs et autrices de BD. Il apparaît effectivement que les hiérarchisations des règles réalisées par les auteurs et autrices sont particulièrement discutées au sein de cliques, soit de petits groupes de personnes qui se constituent au gré des interactions qui ponctuent l’activité professionnelle23. Ces cliques peuvent ainsi se constituer au sein des ateliers partagés, au sein desquels auteurs et autrices se donnent des conseils et échangent autour de leurs problèmes. Mais elles se constituent aussi au gré des rencontres qui s’opèrent durant les festivals, salons du livre et autres opérations de promotion : ceux-ci impliquent effectivement des moments de travail intense (séances de dédicaces, interviews, réunions avec des éditeurs/éditrices, etc.), mais aussi des temps de relâche (pause clope, déjeuner/diner, rencontre improvisée dans les bars, soirée festive, etc.) au cours desquels les auteurs et autrices partagent leurs expériences et, ainsi, peuvent s’accorder (ou se disputer) sur ce qu’il convient de faire pour être un bon professionnel24. Bien que souvent « vaporeuses »25, ces cliques n’en demeurent pas moins des espaces de socialisation, qui permettent aux individus de revendiquer une hiérarchisation spécifique des règles tout en prenant appui sur leurs pairs.

Nocérino, Faire profession : les auteurs et autrices de bandes dessinées

Ces cliques sont donc des espaces de socialisation car, selon l’idéal professionnel défendu à l’intérieur de telle ou telle clique, l’auteur ou l’autrice de BD verra son style personnel sanctionné plus ou moins positivement. À l’inverse, les écarts qu’il ou elle commettra vis-à-vis de cet idéal pourront être interprétés comme des fautes professionnelles.

Plus encore, nous avons remarqué que, du fait de l’informalité décrite précédemment, les styles valorisant le cadrage de la désingularisation avaient d’autant plus de chances de faire l’objet de sanctions négatives ; ce qui participe à renforcer davantage la dimension informelle du milieu.

L’autonomisation contrariée des auteurs et autrices de BD

L’analyse des règles professionnelles et de la manière dont s’organise ce milieu a alors conduit à s’intéresser plus directement à la façon dont les auteurs et autrices de BD peuvent parvenir à se considérer (eux-mêmes ou respectivement) comme de « bons » professionnels. Quand bien même ils et elles expriment des styles spécifiques s’inscrivant dans divers idéaux professionnels définis au sein de cliques, leurs pratiques relèvent d’une morale professionnelle commune. Comme cela a déjà été évoqué, nous avons pu constater que les auteurs et autrices valorisent le fait de se montrer « autonomes », que ce soit au regard de la règle de l’indépendance (il faut être capable d’assumer ses choix), mais aussi de la règle de la persévérance (il faut réussir à maintenir son activité) ou de la règle de la passion du métier (il faut s’engager spontanément dans le métier).

Reste que les auteurs et autrices peinent souvent à savoir ce qu’« être autonome » signifie, concrètement, dans le cours de l’action. Aussi, nous avons établi que le professionnalisme d’un auteur ou d’une autrice se mesurait surtout à sa capacité d’autonomisation (soit, pour rappel, la capacité d’un acteur à intervenir avec succès sur la répartition des responsabilités considérées – par lui et/ou un tiers – comme à sa charge). Ce résultat éclaire d’une autre façon la question des différences statutaires entre les auteurs et autrices de BD. En effet, les auteurs et autrices sont prompts à évaluer, chez eux-mêmes ou chez leurs collègues, divers degrés de professionnalisme : certains ou certaines sont ainsi considérés comme ayant un statut professionnel plus établi, ce qui rendrait acceptables les avantages comparatifs dont ils ou elles peuvent bénéficier (avances sur droit plus importantes, conditions contractuelles plus avantageuses, meilleure couverture presse, etc.). L’analyse des processus d’autonomisation permet de constater que ces inégalités de statut ne sauraient s’expliquer uniquement par les formes de consécration propre au milieu. En effet, le professionnalisme n’est pas directement lié au fait de rencontrer un succès critique ou commercial, mais plutôt au fait de parvenir à transférer la responsabilité vers soi-même ou vers des tiers. La « réussite » des professionnels est, aux yeux des auteurs et autrices, davantage une conséquence de cette autonomisation : si le succès critique et commercial peut être considéré comme un potentiel indice du professionnalisme, il ne le garantit pas. De nombreux auteurs et autrices, bien qu’ils ou elles connaissent le succès, font ainsi l’objet de critiques de la part de leurs pairs qui soulignent leur manque de professionnalisme, que ce soit parce qu’ils/elles ne rendent pas leurs planches à temps (faute relatives au cadrage de l’accomplissement technique), parce qu’ils/elles se révèlent exécrables avec leurs collègues (faute relative au cadrage de l’engagement dans des relations intimes) ou encore parce qu’ils/elles se désintéressent des revendications internes à la profession (faute relative au cadrage de la désingularisation). À l’inverse, un fort professionnalisme n’assure pas le succès commercial et/ou critique des auteurs et autrices de BD : les auteurs et autrices peuvent ainsi s’émouvoir du fait que leurs collègues éprouvent de la difficulté à vivre de leur métier, alors même qu’ils ou elles sont considérés comme des excellents professionnels (les « sympas », « bosseurs » ou « politisés » évoqués dans les planches précédentes).

Cette analyse met en exergue les logiques sous-jacentes aux différences statutaires et les raisons pour lesquelles celles-ci sont parfois valorisées par les professionnels. À leurs yeux, il est normal qu’une personne ayant fait preuve d’autonomisation (et donc de leur professionnalisme) obtienne des avantages, parce qu’elle aura réussi à intervenir dans les responsabilités qui la concernent. Cependant, cela nous permet aussi d’expliquer une difficulté récurrente dans les processus d’autonomisation. Prenons un exemple.

Séquence n° 1. « Enfin, non, je me fais exploiter. Mais… mais c’est de ma faute aussi »

 

Décembre 2014, je me rends dans un atelier partagé en région parisienne où je réalise des observations depuis un mois. Il est 9 h, seul un membre de l’atelier est présent : Alexandre, qui travaille dans le jeu vidéo et ne fait pas de BD. Au bout d’une demi-heure, Nicolas arrive : tous les trois, nous nous retrouvons dans la cuisine à prendre un café.

 

Alexandre : Tu bosses sur quoi en ce moment ?

Nicolas : Toujours pareil, mon bouquin d’illu’… Non, mais là, ça m’emmerde, il y a rien à faire ! Et du coup, je prends du retard sur les autres projets. J’ai déjà dû appeler un autre éditeur pour demander un délai alors que j’avais déjà dû repousser une fois. [Il soupire] La classe quoi…

Alexandre : Mais comment ça se fait ?

Nicolas : Bah je leur envoie mes crayonnés, pour validation. Puis la couleur. Donc bon, déjà c’est long. Mais en plus, elle me recontacte ensuite pour me dire « Ah, mais il manque un dessin… je ne peux pas vous dire encore quoi, on ne sait pas vraiment de quoi on va avoir besoin ».

Alexandre : Des modif’ quoi.

Nicolas : Non non, pas des modif’. Enfin, si… elle me demande des modif’ en plus, ouais. Mais là, c’est carrément des ajouts. Des trucs qui n’étaient pas prévus à la base, à cause d’une mauvaise organisation. Et du coup, vu que le contrat est déjà signé, je ne serais pas payé plus.

Alexandre : Ah ouais, alors que tu travailles le double, quoi.

Nicolas : C’est pas le double de travail… c’est le double de temps, en général ! Parce qu’il y a toute l’attente, pour les validations puis les modif’ après… Là, tu vois, j’attends encore des validations pour des trucs que j’ai envoyés la semaine dernière.

Alexandre : J’ai l’impression que c’est assez classique, non ?

Nicolas : En tout cas, avec elle, c’est tout le temps comme ça.

Alexandre : C’est bien payé au moins ?

Nicolas : Non. Sur celui-là, non.

Alexandre : Non, mais genre combien ?

Nicolas : 2 700 euros… [Alexandre fait une grimace] Ouais, hein ? Bon, si c’est pour deux mois, c’est gérable… Mais là, vu que ça court sur trois ou quatre mois, pfff… Non, mais le pire, c’est que c’est de ma faute aussi. À force d’accepter des trucs à la con… Tu vois, au début de l’année, j’avais rien, zéro projet… Walou ! Du coup pendant un moment, j’ai tout accepté. Et là, je me suis mis dans le jus. Enfin, non, je me fais exploiter. Mais… mais c’est de ma faute aussi. Putain, fais chier, ce métier aussi !

Lorsqu’il évoque ses difficultés, Nicolas pointe vers la responsabilité de son éditrice : elle tarde à faire des retours, demande des changements non prévus, et le rémunère mal. En tentant de transférer la responsabilité vers un tiers, l’auteur réalise une dénonciation de la manière dont les responsabilités sont ainsi distribuées : il juge problématique de devoir assumer des retards dont il n’est finalement pas responsable, au risque de voir son statut de professionnel dégradé (« J’ai déjà dû appeler un autre éditeur pour demander un délai alors que j’avais déjà dû repousser une fois. [Il soupire] La classe quoi »). Pourtant, s’il se confie ici, il ne tente pas pour autant un transfert de responsabilité vers l’éditrice en question. Plus encore, il se rend responsable de la situation : s’il se fait exploiter et qu’il s’agace contre « ce métier », il estime par ailleurs que c’est de sa faute.

Si le fait de transférer la responsabilité vers un tiers est bien une forme possible d’autonomisation, il s’agit d’une opération délicate. Elle s’apparente effectivement au fait de se présenter comme « victime » d’un préjudice, qu’il s’agisse des comportements d’un tiers (l’éditrice qui ne tient pas ses délais) ou d’un système (le métier qui, en tant que tel, serait marqué par la désorganisation). Or, s’engager dans un « processus de victimisation »26 est bien peu compatible avec la morale professionnelle : cela peut être interprété comme une faute au regard de la règle de l’indépendance, mais aussi des règles de la persévérance ou de la passion du métier. Parce que l’autonomisation qui s’appuie sur un transfert de responsabilité de l’auteur ou l’autrice vers un tiers s’apparente à l’engagement dans un processus de victimisation, elle risque paradoxalement d’être interprétée comme un manque d’autonomie et, de ce fait, causer une dégradation du statut des personnes concernées.

 

Dès lors, quand bien même ils ou elles peuvent parfois se considérer victimes de préjudices, les auteurs et autrices endossent régulièrement la responsabilité de leurs échecs comme de leurs réussites. Il existe donc dans ce milieu une tendance à la responsabilisation des auteurs et autrices, voire à l’auto-responsabilisation tant celle-ci est souvent à l’initiative des auteurs et autrices eux-mêmes (à l’image de Nicolas dans la séquence précédente qui non seulement est rendu responsable par ses interlocuteurs et interlocutrices, mais se désigne spontanément comme responsable). Cette tendance trouve son explication dans la manière dont le travail est organisé, c’est-à-dire à travers la valorisation d’une certaine informalité dans les relations de travail. En effet, parce que la dimension peu publique des interactions quotidiennes de travail tend à renforcer la mise en place tant du cadrage de l’engagement dans des relations intimes que de celui de l’accomplissement technique, il est plus difficile de s’inscrire dans le cadrage de la désingularisation. Et, de ce fait, il est plus compliqué pour les auteurs et autrices de comparer leurs situations et, ainsi, de trouver des appuis pour faire la démonstration de la responsabilité d’un tiers.

Cela ne signifie pas pour autant que les auteurs et autrices n’ont aucune chance de parvenir à s’engager dans un processus de victimisation. Ce dernier sera en effet d’autant plus probable que les auteurs et autrices seront parvenus à mettre en série leurs expériences individuelles Les cliques, notamment, sont des espaces d’intenses discussions, où les auteurs et autrices peuvent partager ou comparer leurs difficultés. Ceux-ci réalisent ainsi parfois qu’ils et elles ne sont peut-être pas les seuls responsables de leurs difficultés. Plus encore : parce que les pairs s’accordent sur le fait qu’une situation est anormale ou problématique, ils et elles peuvent se convaincre de la nécessité de transférer la responsabilité de cette situation vers un tiers. Néanmoins, quand bien même les cliques fournissent des ressorts à la victimisation par le partage d’expériences, la forte informalité dans l’organisation du travail rend beaucoup plus difficiles les formes d’autonomisation qui impliqueraient la responsabilisation de tiers. Au point qu’il est possible d’affirmer que se met souvent en place une autonomisation contrariée : parce que les auteurs et autrices s’obligent souvent à s’autonomiser en se responsabilisant eux-mêmes afin d’être reconnus comme professionnels, ils et elles en viennent parfois à commettre des erreurs (comme Nicolas qui, se surchargeant de tâches, ne parvient plus à les honorer) qui portent atteinte à leur statut de professionnels.

Des mobilisations pour (mais aussi contre) le groupe professionnel

Dès lors, comment expliquer que, dans un tel contexte, les auteurs et autrices de BD parviennent parfois à s’engager dans des processus de victimisation et de responsabilisation de tiers ? Quels sont les facteurs et conditions susceptibles de favoriser une telle autonomisation ?

Étant donné la nécessité, pour cela, de mettre en série des expériences, il n’est pas étonnant que ces victimisations émergent principalement dans des cliques qui valorisent fortement des idéaux professionnels mettant l’accent sur un cadrage désingularisant. C’est ainsi que l’étude des collectifs d’auteurs et/ou d’autrices de BD permet de poursuivre l’analyse des fondements pratiques de l’autonomisation : si les formes d’organisation du travail tendent à produire une autonomisation contrariée des professionnels, ces collectifs peuvent contribuer à limiter ce phénomène. Pour comprendre cela, il convient de s’attarder sur les actions et particularités de ces cliques.

Les collectifs, entre information et accompagnement

Comme nous l’avons précédemment souligné, ces groupes d’auteurs et/ou d’autrices s’apparentent bien à des cliques de professionnels, à ceci près qu’ils tendent à défendre des idéaux professionnels orientés vers la valorisation d’un cadrage désingularisant. Nous trouvons un bon exemple de cela lors de l’assemblée générale du groupement BD du Syndicat national des auteurs compositeurs (SNAC) évoqué dans les planches suivantes27.

Nocérino, Faire profession : les auteurs et autrices de bandes dessinées

En cela, l’action de sensibilisation et de mobilisation menée dans ces collectifs tend à renforcer l’autonomisation des professionnels, en proposant des espaces d’échanges plus formalisés que ceux des cliques décrites précédemment. En veillant à constituer et partager diverses informations, les membres de ces collectifs aident leurs pairs auteurs et autrices de BD à franchir les épreuves rencontrées au quotidien, notamment en encourageant ces derniers à tenter des transferts de responsabilité vers des tiers plutôt qu’à se rendre systématiquement responsables de leurs difficultés. 

Les membres engagés dans ces collectifs vont même parfois jusqu’à accompagner et soutenir les tentatives de transferts de responsabilités initiées par leurs collègues. Adoptant alors une posture de « négociateur » aux côtés des auteurs et autrices s’estimant victimes d’un préjudice, ils ou elles peuvent ainsi renforcer encore davantage l’autonomisation de leurs collègues en les aidant à rappeler à des tiers leurs responsabilités.

Toutefois, il convient également de pointer les limites de cette aide à l’autonomisation. En effet, malgré le soutien de collectifs d’auteurs et d’autrices, les professionnels qui souhaitent s’engager dans un processus critique relatif aux attributions de responsabilité sont toujours susceptibles de voir leur statut de professionnel dégradé (à l’image des moqueries évoquées dans les planches précédentes). Surtout, la responsabilisation d’un tiers peut toujours être interprétée comme une faute étant donné la tendance à la responsabilisation de soi observée dans le milieu. Ce phénomène est d’autant plus récurrent que les auteurs et autrices de BD investis dans de tels collectifs ont eux aussi été socialisés dans un milieu professionnel valorisant l’informalité : de ce fait, ils et elles tendent parfois également à adopter une posture de « relativisation »28 des préjudices subis par leurs collègues, exigeant d’eux qu’ils ou elles fassent la preuve de leur autonomisation alors même que c’est ce manque d’autonomisation qui peut les avoir conduits à solliciter l’aide de collectifs.

La victimisation du groupe social des auteurs et autrices de BD : un enjeu de mise en visibilité des préjudices

Il est alors nécessaire de rendre compte des conditions de « félicité de la victimisation » des auteurs et autrices de BD, c’est-à-dire une victimisation qui permettrait leur autonomisation sans remettre en cause leur professionnalisme. Nous avons ainsi observé que la victimisation avait d’autant plus de chances de permettre l’autonomisation des professionnels qu’elle pouvait s’appuyer sur un double mouvement : d’une part, l’émergence d’un groupe réunissant les victimes d’un même préjudice et, d’autre part, la démonstration de l’existence dudit préjudice.

La thèse a ainsi été l’occasion de décrire les actions menées au sein de divers collectifs pour réussir à faire exister un tel groupe malgré une méconnaissance préalable des manières de se mobiliser : grâce à différentes actions (lettres ouvertes, débrayages des dédicaces, marches lors de festival, actions sur les réseaux sociaux, etc.), les auteurs et autrices sont parvenus à exprimer leurs difficultés, tout en parvenant à se représenter publiquement en tant que groupe. La thèse a également permis de montrer que les auteurs et autrices de BD avaient par ailleurs développé une « expertise profane », en cherchant des moyens d’objectiver les divers préjudices dont souffrent potentiellement tous les professionnels29. C’est notamment le cas des États généraux de la BD : association créée en 2014 à l’initiative d’auteurs et d’autrices, son ambition était de produire diverses enquêtes sur le milieu de la BD. Les membres de cette association, conscients des difficultés de leurs pairs, ont ainsi décidé de concentrer leur énergie sur la production d’une enquête statistique destinée à créer une photographie jusqu’alors inédite de la situation économique et sociale des auteurs et autrices de BD. Le questionnaire, conçu en collaboration avec un comité scientifique constitué d’historiens, sociologues et économistes, a été diffusé en octobre 2015 et a rapidement obtenu de nombreuses réponses. Ce sont ainsi 1 469 réponses qui ont pu être exploitées afin de donner un premier aperçu, en janvier 2016, de la situation des auteurs et autrices. Ce premier travail statistique des EGBD, présenté publiquement lors du festival d’Angoulême, a ainsi permis de mettre en relief une forte précarité au sein de la profession30.

Nocérino, Faire profession : les auteurs et autrices de bandes dessinées

En prenant appui sur ces données objectivées, les auteurs et autrices de BD sont parvenus à construire un « problème public » autour de cette question de leur précarité, transférant une partie de la responsabilité de la situation vers l’État31. Les données produites par les EGBD ont également été mobilisées pour constituer un autre problème public, autour cette fois du sexisme dans le milieu de la BD. En effet, en septembre 2015 des autrices créent le collectif des créatrices de bande dessinée contre le sexisme (aussi nommé BD-Égalité) : en réunissant divers témoignages, elles interpellent leurs collaborateurs sur diverses dérives observées dans les relations de travail32. Suite à la publication des résultats des EGBD, les autrices mobilisées ont pu insister sur les inégalités économiques entre auteurs et autrices.

Qu’il s’agisse de la précarisation du métier ou du sexisme, les auteurs et autrices mobilisées se sont engagés dans un processus de victimisation en prenant appui sur ces données objectivées. Toutefois, malgré le travail de démonstration réalisé, ces victimisations ne sont pas exemptes de multiples formes de relativisation, que ce soit par les interlocuteurs des auteurs et/ou autrices ou par eux-mêmes. Ainsi, alors même que la construction d’un problème public vise à pointer l’existence de la responsabilité causale ou politique d’un tiers, les auteurs et autrices sont régulièrement renvoyés vers leur propre responsabilité, augmentant d’autant leurs chances de s’inscrire dans une forme d’autonomisation contrariée.

Toutefois, s’ils et elles peinent à faire reconnaître comme légitimes de telles tentatives de responsabilisation de tiers, les auteurs et autrices engagés dans des collectifs n’en parviennent pas moins à revendiquer une « propriété » sur les problèmes constitués, c’est-à-dire une capacité à définir eux-mêmes quelles sont les difficultés qu’ils et elles rencontrent au sein de leur activité. Dès lors, si les mobilisations ne garantissent pas à elles seules une autonomisation des professionnels, elles renforcent l’appartenance de ces victimes à un même groupe, en l’occurrence un groupe de professionnels capable de revendiquer une expertise sur les problèmes qu’ils et elles rencontrent33. Ces derniers, parce qu’ils et elles sont parvenus à se montrer publiquement et à démontrer l’existence d’un préjudice, peuvent permettre aux auteurs et autrices de BD de revendiquer collectivement une autonomisation non pas seulement des professionnels, mais aussi du groupe professionnel lui-même considéré dans son ensemble, en appelant à une régulation de la manière dont les responsabilités sont attribuées au sein de ce milieu professionnel.

Un corporatisme de moyenne portée

Il est dès lors nécessaire d’analyser ces appels à la régulation de l’activité. Pour cela, il a fallu suivre les auteurs et autrices mobilisés dans leurs interactions avec les « agents de l’État »34. Outre l’apprentissage des diverses compétences pratiques du politique, cette confrontation consiste surtout à présenter à ces agents de l’État les problèmes rencontrés par les auteurs et autrices de BD, mais aussi à proposer des solutions qui règleraient tout ou partie du problème. Les auteurs et autrices engagés au sein de collectifs présentent leurs problèmes professionnels et au-delà, cherchent à se représenter en tant que groupe capable de porter des revendications de régulation valables pour l’ensemble de ses membres.

Toutefois, c’est avant tout un corporatisme de moyenne portée qui s’est mis en place. En effet, si les auteurs et autrices engagés parviennent parfois à obtenir une régulation collective de l’activité, celle-ci est rarement traduite formellement dans le droit, laissant toujours une possibilité, pour les différents acteurs, de maintenir une régulation informelle du travail. Ce corporatisme de moyenne portée s’explique avant tout par une difficulté à produire une « totalisation » du groupe professionnel des auteurs et autrices de BD qui soit satisfaisante aux yeux tant des agents de l’État que des auteurs et autrices eux-mêmes35. En effet, les professionnels du milieu de la BD (parmi lesquels les auteurs et les autrices) tendent à regretter la généralisation causée par la régulation à l’échelle de la profession dans son ensemble, d’autant plus si cela implique un rapprochement avec des corps de métier certes comparables, mais pourtant considérés comme bien différents dans leurs statuts et pratiques de travail (écrivains/écrivaines, illustrateurs/illustratrices, etc.).

En outre, même à l’intérieur du groupe des auteurs et autrices de BD, s’observe une division du travail de victimisation : les différents collectifs d’auteurs et/ou d’autrices tendent ainsi à se concentrer sur certaines revendications, revendiquant une expertise sur certains problèmes plutôt que d’autres. Or, une telle division conduit à remettre en cause les tentatives de totalisation impulsées par les personnes mobilisées pour une régulation collective de l’activité. Ainsi, quand bien même les auteurs et autrices s’accordent sur l’existence de préjudices concernant l’ensemble de leur groupe grâce à une recomposition des représentations, ils et elles peinent à revendiquer une régulation collective de l’activité, laquelle est perçue comme pouvant limiter leurs chances de défendre leurs droits.

Dès lors, si les auteurs et autrices peuvent parfois s’engager dans une politisation consistant à former un groupe professionnel a priori destiné à devenir une corporation autonomisée (c’est-à-dire capable d’intervenir, à l’échelle de la corporation, sur la manière dont les responsabilités sont agencées et négociées), il existe également une autre modalité de politisation. Cette dernière revient plutôt à revendiquer l’autonomisation non pas d’un groupe socio-professionnel, mais des auteurs et d’autrices eux-mêmes. Il est important d’insister sur le fait que ces deux modalités de politisation – nommées respectivement politisation corporatiste et politisation individualiste – sont toutes deux susceptibles de renforcer l’autonomisation des professionnels mais à des niveaux distincts. Les effets de ces deux formes de politisation sont bien différents sur la structuration du groupe professionnel : la première allant plutôt dans le sens de l’affirmation d’une corporation ; la seconde dans le sens d’une affirmation des individus comme fin en soi et non comme moyen pour constituer une corporation. Force est de constater que le caractère grandement informel de l’organisation du travail, parce qu’il renforce la tendance des auteurs et autrices à se responsabiliser, favorise l’émergence d’une autonomisation des professionnels plutôt que celle du groupe professionnel.

En somme, la structuration de l’activité n’empêche pas pour autant les auteurs et autrices de développer des formes de politisation allant dans le sens de la mise en place d’une corporation. Toutefois, elle les rend moins probables, incitant davantage les auteurs et autrices à s’engager dans une politisation qui, de fait, œuvre contre la formation d’un groupe professionnel spécifique.

Les résultats de la thèse : histoire et critique de la formation contrariée du groupe des auteurs et autrices de BD

Ce faisant, il est possible d’expliquer, dans le même mouvement, les fortes mobilisations des auteurs et/ou autrices et leur réticence à se constituer comme groupe professionnel : si les auteurs et autrices de BD ne parviennent pas à se structurer comme groupe professionnel autonomisé, c’est que la manière dont le travail est organisé les incite à se politiser de façon à favoriser l’autonomisation des professionnels plutôt que de viser la formation d’un groupe professionnel autonome. Parce que le travail est marqué par l’informalité, il valorise davantage l’engagement dans des relations intimes et dans l’accomplissement technique qu’il n’encourage la désingularisation des situations. Les idéaux professionnels qui en découlent suscitent donc des formes de solidarité certes effectives (notamment au sein des cliques), mais essentiellement tournées vers l’autonomisation des personnes et ne se donnant pas à voir comme une étape vers la revendication d’une juridiction spécifique adossée à un groupe professionnel particulier.

Appréhender la pluralité des processus de politisation

Il est possible de préciser encore le propos en mettant en lumière deux grandes formes de professionnalisme chez les auteurs et autrices de BD : un professionnalisme de l’informalité et un professionnalisme de la politisation. Le premier est orienté vers des idéaux professionnels qui valorisent les cadrages liés à l’informalité, quand le second valorise les idéaux professionnels orientés vers la désingularisation. Étant donné que l’informalité s’apparente à une obligation morale du fait de l’organisation de l’activité, cette forme de professionnalisme est actuellement dominante. Toutefois, dans certaines cliques (les collectifs notamment), les auteurs et autrices peuvent défendre une autre forme de professionnalisme, valorisant cette fois l’inscription dans un cadrage désingularisant et, de ce fait, la politisation des problèmes professionnels. Si ce professionnalisme de la politisation est dominé, parce que moins adapté à la manière dont l’activité est organisée, il n’en reste pas moins une forme de professionnalisme pouvant être valorisée par les auteurs et autrices. D’ailleurs, quand bien même les auteurs et autrices de BD ont de plus fortes chances de s’inscrire dans un professionnalisme de l’informalité, ils et elles ne s’engagent pas moins dans un processus de formation de leur groupe professionnel. Ils et elles ont effectivement toujours la possibilité de s’engager dans des processus critiques lorsqu’ils ou elles rencontrent des difficultés s’apparentant à des épreuves dans leur activité, allant parfois même jusqu’à politiser celles-ci en tentant de construire un problème public. Reste que, étant donné la prédominance du professionnalisme de l’informalité, les modalités de cette politisation ne permettent pas vraiment aux auteurs et autrices de constituer un groupe socio-professionnel bien délimité. C’est en cela qu’il a été possible de parler d’une « formation contrariée » du groupe professionnel des auteurs et autrices de BD.

L’informalité comme résultat d’un processus historique

Ces résultats peuvent être prolongés par une analyse rétrospective de l’activité des auteurs et autrices de BD. En effet, à travers une histoire de leur professionnalisation depuis l’entre-deux-guerres, il a été possible de décrire l’affirmation progressive du professionnalisme de l’informalité sur le professionnalisme de la politisation. Celle-ci s’explique notamment par un bouleversement profond dans les modalités de production du médium. En effet, la crise de la presse périodique et, en parallèle, l’affirmation du livre comme nouveau canon36, se sont traduites par une modification substantielle des modes de rémunérations et des formes d’organisation du travail.

Lorsque les auteurs et autrices publiaient dans la presse, leur travail s’organisait autour de rédactions ou d’agences de presse, auxquelles ils et elles livraient hebdomadairement des planches. Quand bien même les auteurs et autrices pouvaient travailler seuls sur leurs propositions de planches, ils et elles s’inscrivaient dans un collectif de travail, marqué par des cadences et des formats particulièrement rigides. Ce contexte de travail, laissant une moindre place à l’informalité, s’est révélé favorable à l’émergence d’un professionnalisme de la politisation. Des auteurs et autrices se sont ainsi mobilisés en vue de faire reconnaître le lien de subordination qui les liait aux journaux ou agences de presse37. Cela a permis à nombre d’auteurs et d’autrices d’obtenir le statut de salarié-pigiste : ils et elles sont alors rémunérés à la planche sur la base de barèmes négociés localement, tout en obtenant des avantages sociaux (congés, treizième mois, réductions d’impôts, etc.). À ces revenus pouvaient s’ajouter des droits d’auteur dans le cas où la série faisait l’objet d’une édition sous forme d’album.

Avec la crise des journaux illustrés, la manière de produire et publier des BD change progressivement. Les auteurs et autrices travaillent désormais leurs projets pour être diffusés directement sous la forme de livres. Ils et elles ne peuvent, dès lors, plus être rémunérés « à la pige » : si certaines structures éditoriales proposent un « fixe » pour rémunérer le travail réalisé, c’est surtout « l’avance sur droits d’auteur » qui devient la norme. Ainsi, les auteurs et autrices négocient, à chaque contrat d’édition, une avance qui fera par la suite l’objet d’un remboursement sur les droits générés par les ventes (en fonction d’un taux de droit d’auteur, lui aussi négocié à chaque contrat). Cette évolution relative aux modalités de rémunération fait ainsi perdre à de nombreux auteurs et autrices leur statut de salarié-pigiste et les avantages qui lui sont associés. Mais plus encore, cela s’est également traduit par un changement radical dans les relations de travail. En effet, le contrat d’édition se contente de définir les modalités des cessions de droits et reste très évasif sur la manière dont le travail est organisé. Cette nouvelle organisation du travail s’avère dès lors propice à l’affirmation d’un professionnalisme de l’informalité.

Il convient d’insister sur le fait que les auteurs et autrices trouvent un intérêt dans cet encadrement juridique minimal : comme nous l’avons déjà évoqué, ils et elles sont attachés au fait de pouvoir faire preuve de leur « autonomie ». Ainsi, le contrat d’édition est un dispositif qui a un sens particulièrement positif dans la morale professionnelle des auteurs et autrices. Toutefois, il rend particulièrement difficile des régulations à l’échelle du groupe professionnel. De fait, si des agents de l’État se sont intéressés à la BD dans les années 1980 et 1990, c’est essentiellement sous l’angle de la légitimation du médium. Sur cette période, les problèmes professionnels des auteurs et autrices restent donc majoritairement absents des politiques publiques mises en place.

Il ne s’agit pas pour autant de dire que le système de droit d’auteur et le statut d’artiste-auteur provoquent l’individualisme des artistes-auteurs, mais que ces professionnels trouvent un sens positif dans une organisation spécifique du travail, au point de s’être inscrits dans ce régime spécifique et de continuer à s’en revendiquer. Cela permet de résoudre l’énigme sous-jacente à cette recherche. Les auteurs et autrices de BD, ne sont pas individualistes en soi (comme ils et elles l’affirment souvent eux-mêmes) : les mobilisations étudiées dans le cadre de cette thèse ont justement pu montrer à quel point ces professionnels agissaient collectivement, y compris parfois pour demander une régulation collective de leur métier. Le constat vise plutôt à affirmer que c’est l’évolution des modalités d’organisation du travail qui les amènent à valoriser certains aspects de la morale professionnelle, lesquels conduisent effectivement à des comportements que l’on pourrait qualifier d’individualistes. De ce fait, les formes de politisation corporatiste qui visent l’autonomisation du groupe professionnel dans son ensemble sont devenues moins probables que par le passé. Les auteurs et autrices trouvent aujourd’hui davantage de raisons de politiser les problèmes rencontrés d’une manière individualiste, c’est-à-dire visant une autonomisation des individus plutôt qu’une autonomisation à l’échelle d’un groupe social dans son ensemble. Autrement dit, il a été possible de souligner les conditions sociales privilégiant des formes de raisonnements individualistes, y compris au sein de mobilisations collectives.

Des résultats à la critique sociologique

Cette analyse socio-historique de la professionnalisation des auteurs et autrices de BD permet de consolider différentes critiques à l’issue de ce travail de recherche, et ce à plusieurs niveaux.

Un premier niveau de critiques pourrait être qualifié d’internaliste38, dans le sens où celles-ci pointent les formes auto-limitatives, les paradoxes internes des politisations des auteurs et autrices. Nous critiquons ainsi certaines politisations individualistes en montrant en quoi elles participent de la tendance à relativiser les préjudices subis par les auteurs et autrices, alors même qu’elles se donnent pour objectif de souligner l’existence de problèmes professionnels. De la même manière, nous critiquons des formes de politisations corporatistes qui, même si elles contribuent à dénaturaliser les rapports sociaux, contribuent parfois à la réification de groupes sociaux (par exemple en faisant des auteurs et autrices étrangers les responsables des difficultés rencontrées sur le marché français).

À ce premier niveau critique s’en ajoute un second, dans une perspective externaliste cette fois. Il ne s’agit effectivement plus de pointer les contradictions internes des acteurs, mais d’adosser la critique sur les valeurs de dénaturalisation et d’enquête portées par la sociologie elle-même. L’enquête a permis de faire le constat selon lequel l’informalité de l’activité des auteurs et autrices de BD rend difficile le recul critique de ces derniers et, de cette manière, renforce la tendance à la responsabilisation de soi plutôt qu’une réflexivité sur les causes sociales des problèmes rencontrés dans l’activité. Aussi, notre critique d’inspiration sociologique porte sur le manque de dispositifs susceptibles de renforcer les réflexivités des acteurs et, ainsi, de fournir des appuis aux auteurs et autrices dans leurs tentatives de victimisation. Cette critique de l’absence de dispositif s’étend aux institutions étatiques : les agents de l’État semblent effectivement peu disposés à favoriser la mise en place de tels dispositifs, et ce malgré plusieurs demandes de la part de collectifs d’auteurs et/ou d’autrices. Cela ne signifie pas pour autant que l’État reste silencieux face aux difficultés des auteurs et autrices de BD. Toutefois, les dispositifs mis en place visent essentiellement à fournir une aide à des individus (bourses, résidences, fiches pratiques, etc.) plutôt que de donner les moyens pour une régulation collective de l’activité (comme pourraient le faire des élections professionnelles par exemple). En cela, les agents de l’État favorisent eux aussi une politisation individualiste des problèmes professionnels, limitant alors d’autant les chances d’aborder ceux-ci comme collectifs.

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1

Xavier Guilbert, Panorama de la BD en France, 2010-2020, Paris, CNL, 2021, p. 9.

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2

Ministère de la culture et de la communication, CNL, et People Vox, La situation économique et sociale des auteurs du livre. Volet d’enquête sur les activités et revenus des auteurs du livre affiliés à l’Agessa, Paris, Centre national du livre, 2016, p. 56.

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3

Pierre Nocérino, Les Auteurs et autrices de bande dessinée. La formation contrariée d’un groupe social, Thèse de sociologie, sous la direction de C. Lemieux, Paris, EHESS, 2020, 561 p.

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4

Les résultats de ces deux études sont publiées sur le site internet des EGBD [en ligne]. L’enquête statistique a également fait l’objet d’un second traitement par Pierre-Michel Menger et Colin Marchika (voir Pierre-Michel Menger, « Réflexions sur la carrière d’auteur de bande dessinée », Angoulême, Neuviemeart 2.0, 2016 [en ligne].

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5

Pierre Bourdieu, « Le champ littéraire », Actes de la recherche en sciences sociales, vol. 89, n° 1, 1991, p. 13 et sq.

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6

Everett C. Hughes, Le regard sociologique. Essais choisis, Paris, Éditions de l’EHESS, 1996, p. 69‑73.

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7

Cette définition de l’autonomisation avait été formulée à l’occasion d’un travail antérieur, sur un tout autre sujet. Pour une synthèse de ce travail, voir Léa Mazé et Pierre Nocérino, « Analyser l’accueil des personnes âgées en institution. De l’autonomie aux transferts de responsabilité », ethnographiques.org, n° 35, 2017 [en ligne]. 

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8

E.C. Hughes, Le regard sociologique. Essais choisis, Paris, Éditions de l’EHESS, 1996, p. 81‑85.

Retour vers la note de texte 11821

9

Andrew Abbott, The System of Professions - An Essay on the Division of Expert Labor, Chicago, University of Chicago Press, 1988, p. 59.

Retour vers la note de texte 11822

10

Luc Boltanski, « La constitution du champ de la bande dessinée », Actes de la recherche en sciences sociales, 1975, vol. 1, n° 1, p. 37‑59.

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11

Éric Maigret, « La reconnaissance en demi-teinte de la bande dessinée », Réseaux, vol. 12, n° 67, 1994, p. 113‑140 ; Éric Maigret et Matteo Stefanelli (eds.), La bande dessinée: Une médiaculture, Paris, Armand Colin, 2012, 162 p.

Retour vers la note de texte 11824

12

Vincent Seveau, « La bande dessinée », in Nathalie Heinich et Roberta Shapiro (eds.), De l’artification. Enquêtes sur le passage à l’art, Paris, Éditions de l’EHESS, 2012, p. 253‑260 ; Jacques-Erick Piette, « L’accession au statut d’artiste des dessinateurs de bande dessinée en France et en Belgique », Sociologie de l’Art, vol. OPuS23 & 24, n° 2, 2014, p. 111‑128 ; Nathalie Heinich, « L’artification de la bande dessinée », Le Débat, vol. 3, n° 195, 2017, p. 5‑9 ; Benjamin Caraco, « Enseigner la bande dessinée : le cas de l’atelier d’illustration de l’École des arts décoratifs de Strasbourg », Sociétés & Représentations, n° 47, 2019, p. 237‑259.

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13

Sylvain Lesage, « La bande dessinée, entre mainstream et avant-gardes », Savoir/Agir, vol. 44, n° 2, 2 juillet 2018, p. 47‑53.

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14

On notera toutefois les travaux suivants : en France, Morgane Parisi, Le processus créatif, un regard anthropologique. Les modes de coopération en œuvre dans le processus créatif, chez des auteurs de bande dessinée d’Angoulême, Mémoire de Master, sous le direction de L. Barthélémy et T. Smolderen, Bordeaux 2 - éesi, Angoulême, 2011, 119 p ; au Japon, Sharon Kinsella, Adult Manga. Culture & Power in contemporary japanese society, Honolulu, University of Hawai’i Press, 2000, 228 p ; et dans les pays anglophones et hispanophones Casey Brienza et Paddy Johnston (eds.), Cultures of comics work, New York, Palgrave Macmillan/Springer, 2016, 308 p. Si ces travaux rendent compte des problématiques liées à la création, ils laissent toutefois majoritairement de côté les dimensions non créatives de cette activité (promotion, administratif, etc.).

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15

Thierry Crépin, « Haro sur le gangster ! » La moralisation de la presse enfantine, 1934-1954, Paris, CNRS Éditions, 2001, 493 p ; Jessica Kohn, « Travailler dans les Petits Mickeys » : les dessinateurs-illustrateurs en France et en Belgique de 1945 à 1968, Thèse d’Histoire, sous la direction de L. Martin et de J.-P. Gabilliet, Paris, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, 2018, 880 p.

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16

Sylvain Lesage, Publier la bande dessinée. Les éditeurs franco-belges et l’album, 1950-1990, Villeurbanne, Presses de l’Enssib, 2018, 424 p ; Kevin Le Bruchec, « L’auto-édition de bande dessinée : Une voie d’entrée spécifique au sein du champ éditorial », Bibliodiversity, n° 7, 2019, p. 44‑57.

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17

Christine Détrez et Olivier Vanhée, Les mangados : lire des mangas à l’adolescence, Paris, Éditions de la BPI, 2012, 320 p ; Benoît Berthou (ed.), La bande dessinée : quelle lecture, quelle culture ?, Paris, Éditions de la BPI, 2015.

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18

Thierry Rogel, Sociologie des super-héros, Paris, Hermann, 2012, 256 p ; Pascal Robert, De l’incommunication au miroir de la bande dessinée, Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, 2017, 144 p.

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19

Pierre Naville, « Instrumentation audio-visuelle et recherche en sociologie », Revue française de sociologie, vol. 7, n° 2, 1966, p. 158‑168.

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20

Esquissé dans un article déjà ancien (Pierre Nocérino, « Ce que la bande dessinée nous apprend de l’écriture sociologique », Sociologie et sociétés, vol. 48, n° 2, 2016, p. 169‑193), ces réflexions ont été développées dans le propos liminaire de la thèse (P. Nocérino, Les Auteurs et autrices de bande dessinée. La formation contrariée d’un groupe social, Thèse de sociologie, sous la direction de C. Lemieux, Paris, EHESS, 2020, p. 43‑53).

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21

Émile Durkheim, Leçons de sociologie, Paris, Puf, 1990 [1950], p. 62.

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22

Tout en reprenant les concepts d’Erving Goffman (Les Cadres de l’expérience, Paris, Les Éditions de Minuit, 1991 [1974], 576 p), ce cadre d’analyse s’inspire également de l’analyse grammaticale de l’action proposée par Cyril Lemieux (Le Devoir et la grâce, Paris, Economica, 2009, 256 p).

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23

La notion de « clique » est reprise à William Foote Whyte (« Corner Boys: A Study of Clique Behavior », American Journal of Sociology, vol. 46, n° 5, 1941, p. 647-664). Le choix du terme se justifie aussi par la lecture d’Erving Goffman : contrairement à « l’équipe » [team], à savoir un groupe qui partage des intérêts communs dans un jeu contre d’autres groupes, la clique correspond à un groupe dans le groupe : à l’intérieur d’une équipe peuvent se retrouver des personnes autour d’une définition différente de la situation. Si le groupe des auteurs et autrices de BD peut s’apparenter à une équipe, celle-ci est constituée d’un ensemble de petits groupes informels [informal groups] pouvant répondre au nom de clique (voir Erving Goffman, The presentation of self in everyday life, Edinburgh, University of Edinburgh, 1956, p. 51-52).

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24

Sur l’importance spécifique de ces moments de relâche dans l’apprentissage et la mise en discussion du professionnalisme, voir Pierre Nocérino, « Faire groupe entre la poire et le fromage. Informalité et autonomie dans le travail des auteurs et autrices de BD », Sociologie du travail, vol. 62, n° 3, 2020 [en ligne]. 

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25

Le concept de communautés vaporeuses (« wispy community ») est défini par Gary Alan Fine comme des petits groupes sociaux évanescents, au sein desquels les acteurs vivent des expériences fortes. Ces groupes vaporeux peuvent disparaître rapidement comme être réactivés ultérieurement, au point parfois de constituer de véritables cliques (voir Gary Alan Fine, Tiny Publics. A Theory of Group Action and Culture, New York, Russell Sage Foundation, 2012, p. 152‑153).

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26

Selon Yannick Barthe, la victimisation peut se définir comme la « transformation en victimes de personnes qui ne se pensaient pas forcément comme telles » (Yannick Barthe, Les retombées du passé. Le paradoxe de la victime, Paris, Le Seuil, 2017, p. 28). L’analyse de ces processus nécessite dès lors une description de l’action menée par les « victimisateurs », qui vont chercher à faire reconnaître le statut de victimes à des individus ou à un groupe, mais aussi au rôle des « relativisateurs », qui vont plutôt chercher à remettre en cause ce statut, notamment en interrogeant l’ampleur, voire la réalité même du préjudice subit.

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27

Le groupement BD du SNAC (habituellement nommé « SNAC-BD ») a été créé en 2007. Au moment de l’enquête, il réunit 450 membres, dont une vingtaine de « pilotes » qui prennent une part active dans la vie du syndicat (organisation d’action, présence lors de réunion de concertation, intervention auprès de maisons d’édition lors de conflit, etc.). Chaque année, le SNAC-BD invite ses membres lors d’une assemblée générale. Ce 25 mai 2016 sont présents : le délégué général du syndicat, trois auteurs du comité de pilotage et dix adhérents (trois autrices et sept auteurs, parmi lesquels trois sont d’anciens ou anciennes « pilotes »).

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28

La relativisation est définie de la manière suivante : « Soit il s’agit de mettre en regard différents types de violence pour en conclure que les victimes d’un certain type de violence ont moins de légitimité à bénéficier de ce statut que celles d’un autre type. Soit c’est le rôle joué par la victime qui sert à établir une hiérarchie entre les victimes en faisant le départ entre celles qui peuvent vraiment être considérées comme telles et celles qui ne le peuvent qu’à un degré moindre » (Y. Barthe, Les retombées du passé. Le paradoxe de la victime, Paris, Le Seuil, p. 152. Souligné par l’auteur).

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29

La notion d’expert profane est reprise à Madeleine Akrich, Yannick Barthe et Catherine Rémy (eds.), Sur la piste environnementale. Menaces sanitaires et mobilisations profanes, Paris, Presses des mines, 2010, p. 25‑28.

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30

EGBD, Enquête Auteurs 2016. Résultats statistiques, Angoulême, États Généraux de la Bande Dessinée, 2016.

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31

La notion de problème public est ici reprise à Joseph Gusfield (La culture des problèmes publics L’alcool au volant : la production d’un ordre symbolique, Paris, Economica, 2009 [1981], 356 p). Rappelons que pour J. Gusfield, la construction d’un problème public est rendue possible par le travail réalisé par des acteurs en vue de démontrer la « responsabilité causale » d’un problème, mais aussi l’existence d’une « responsabilité politique » (de la part d’institutions publiques). Les acteurs impliqués se disputent alors la « propriété » du problème, c’est-à-dire la « capacité à créer ou orienter la définition publique d’un problème » (Ibid., p. 11).

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32

Les témoignages sont réunis sur le site internet du collectif [en ligne].

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33

Dans une note, Andrew Abbott explicite que la revendication d’une juridiction par une profession est assimilable à la constitution d’un problème public (A. Abbott, The System of Professions - An Essay on the Division of Expert Labor, Chicago, University of Chicago Press, 1988, p. 332).

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34

Sont désignés par cette expression l’ensemble des « agents administratifs » rattachés, d’une manière ou d’une autre, à des missions définies par des administrations publiques (voir notamment Jean-Marc Weller, « Les agents administratifs : travail d’arbitrage et conscience professionnelle », in Didier Demazière et Charles Gadéa (eds.), Sociologie des groupes professionnels, Paris, La Découverte, 2009, p. 321‑331).

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35

La notion de « totalisation » est empruntée à Alain Desrosières (Pour une sociologie historique de la quantification. L’argument statistique I, Paris, Presses des Mines, 2013, p. 145‑146).

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36

Voir Sylvain Lesage, L’effet livre. Métamorphoses de la bande dessinée, Tours, Presses universitaire François Rabelais, 2019, 432 p.

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37

Sur cette mobilisation, voir Jessica Kohn, « Travailler dans les Petits Mickeys » : les dessinateurs-illustrateurs en France et en Belgique de 1945 à 1968, Thèse d’Histoire, sous la direction de L. Martin et de J.-P. Gabilliet, Paris, Université Sorbonne Nouvelle Paris 3, 2018, p. 310‑319.

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38

La distinction entre « critique interne » (portant sur les contradictions internes, en se situant du point de vue même des acteurs) et « critique externe » (se basant sur des valeurs ou normes différentes de celles défendues par les acteurs) est empruntée à Cyril Lemieux (La sociologie pragmatique, Paris, La Découverte, 2018, p. 80).

Abbott Andrew, The System of Professions - An Essay on the Division of Expert Labor, Chicago, University of Chicago Press, 1988, 452 p.

Akrich Madeleine, Barthe Yannick et Rémy Catherine (eds.), Sur la piste environnementale. Menaces sanitaires et mobilisations profanes, Paris, Presses des Mines, « Sciences sociales », 2010, 308 p.

Barthe Yannick, Les retombées du passé. Le paradoxe de la victime, Paris, Le Seuil, « La couleur des idées », 2017, 248 p.

Berthou Benoît (ed.), La bande dessinée : quelle lecture, quelle culture ?, Paris, Éditions de la Bpi, « Études et recherche »), 2015.

Boltanski Luc, « La constitution du champ de la bande dessinée », Actes de la recherche en sciences sociales, 1975, vol. 1, n° 1, p. 37‑59.

Bourdieu Pierre, « Le champ littéraire », Actes de la recherche en sciences sociales, 1991, vol. 89, n° 1, p. 3‑46.

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Crépin Thierry, « Haro sur le gangster ! » La moralisation de la presse enfantine, 1934-1954, Paris, CNRS Éditions, 2001, 493 p.

Desrosières Alain, Pour une sociologie historique de la quantification. L’argument statistique I, Paris, Presses des Mines, « Sciences sociales », 2013, 329 p.

Détrez Christine et Vanhée Olivier, Les mangados : lire des mangas à l’adolescence, Paris, Éditions de la Bpi, « Études et recherche », 2012, 320 p.

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EGBD, Enquête Auteurs 2016. Résultats statistiques, Angoulême, États Généraux de la Bande Dessinée, 2016.

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Mes remerciements vont à Hélène Seiler-Juilleret et Philippe Garnier pour leurs relectures attentives, retours et suggestions tout au long du processus de rédaction de cet article. Les recherches menant aux présents résultats ont bénéficié d’un soutien financier de l’État et de l’ANR dans le cadre du « LABEX TEPSIS » : que ces institutions soient elles aussi remerciées pour leur soutien. Je remercie enfin Cyril Lemieux pour ses commentaires et conseils relatifs à ce texte et, plus généralement, pour avoir accompagné ce travail de recherche.