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C’était en novembre 2013, une vidéo a provoqué un léger émoi sur les réseaux sociaux pendant une semaine. Postée à l’origine par le Daily Mail Online, elle était intitulée « Le suprémaciste blanc Craig Cobb apprend qu’il est noir à 14% ». Le titre faisait référence à un épisode du Trisha Show, un talk-show américain dont l’animatrice, Trisha Goddard, Britannique et noire, avait invité Craig Cobb à faire un test d’ancestralité ADN. Le clip du Daily Mail Online montrait le moment où Trisha Goddard révélait les résultats du test à l’intéressé face au public du studio. La caméra faisait un gros plan sur le visage de Craig Cobb qui fixait Trisha Goddard lisant le rapport : « … 86% européen. Et euh… » L’animatrice marqua une pause pour souligner l’effet dramatique, puis une invitée, une femme noire qui portait un kufi, assise à côté de Cobb, éclata de rire en se frappant le genou, littéralement pliée en deux. Anticipant la chute, le public se mit à huer et applaudir de plus en plus fort. « Allez-y, dites-le ! » s’exclama la femme au kufi. « 14% africain subsaharien ! » conclut l’animatrice. Les spectateurs continuaient à s’esclaffer et s’agiter tandis qu’on voyait Craig Cobb lever la main et secouer la tête en souriant, imperturbable : « Attendez, une minute, une minute, dit-il, sûr de lui. Attendez… une minute. C’est ce qu’on appelle le bruit statistique. » « Mon cher, répondit Trisha Goddard, vous avez un peu de Noir en vous1 ».
La vidéo a été reprise par nombre de blogs et de sites d’information dont les auteurs se faisaient un plaisir de rappeler la supériorité des données factuelles de la génétique par rapport au racisme d’un Cobb, fondé sur les notions archaïques de « pureté » raciale et de suprématie blanche. Très vite, la page Wikipedia de Craig Cobb a été mise à jour : les résultats de son test ADN figuraient dans les lignes d’introduction. Plusieurs universitaires ont profité de l’incident pour expliquer que le système historique de classification raciale des États-Unis avait des effets paradoxaux puisqu’autrefois le fait d’avoir « une goutte de sang noir » faisait officiellement de vous un Noir. L’ethnographe Yaba Blay le formulait ainsi dans un article écrit pour CNN :
« Craig Cobb a sans doute “ l’air blanc ” aujourd’hui, mais en 1813 ou 1913, ses 14% d’ascendance africaine auraient été plus que suffisants pour faire de lui un Noir au regard de la loi. Paradoxalement, en 2013, son patrimoine rappelle toutes les nuances que comprend la notion d’identité raciale, au-delà de la couleur de la peau2. »
Il n’empêche, l’intéressé a refusé de reconnaître les résultats du test ADN révélé par Trisha Goddard. « J’ai accepté de faire le test parce que je pensais que c’était de la science, dit-il à un journaliste du Daily Mail. » Plus tard, il a déclaré que le test AncestrybyDNA, fourni par l’entreprise DNA Diagnostics Center (DDC), était une « méthode scientifiquement nulle » utilisée par l’émission pour « promouvoir le multiculturalisme3 ». Dans une interview accordée au Village Voice, il a qualifié DDC d’« entreprise bidon » sous prétexte que ses analyses génétiques étaient peu précises et que l’entreprise avait de mauvaises critiques sur Internet, avant d’annoncer qu’il comptait faire un nouveau test ADN en passant par une société plus réputée4. Le second test, réalisé par AncestryDNA (une filiale d’Ancestry.com et aujourd’hui le premier fournisseur mondial de tests d’ancestralité génétique), a offert à Craig Cobb le résultat qu’il attendait : 100 % d’ancestralité européenne, dont 57 % d’« Europe occidentale », 34 % d’« Irlande », et plusieurs pourcentages plus faibles attribués à la « Scandinavie », la « péninsule ibérique » , la « Grande-Bretagne » et à l’« Europe orientale ».
Craig Cobb a commenté l’épisode sur Stormfront, un forum Internet suprémaciste blanc, dans un post daté du 10 mars 2015. Il vante la meilleure qualité technique du test AncestryDNA par rapport à celle du test AncestrybyDNA en s’appuyant sur une comparaison des produits publiée en ligne par l’International Society of Genetic Genealogy (la Société internationale des généalogistes génétiques, dite l’ISOGG)5. « Le test d’AncestrybyDNA analyse 176 allèles sur plus de 600 000, écrit-il. Le test AncestryDNA en analyse plus de 500 000 ». Il poursuit ensuite :
« J’ai accepté – le premier test – parce que je pensais qu’ils utiliseraient une méthode fiable. Puis je me suis dit qu’ils utilisaient peut-être une fausse science (je pensais que la probabilité était relativement faible, mais elle existait)… auquel cas, mon “pré-algorithme” mental me prédisait un immense tollé et un dénigrement de ma personne, après quoi j’expliquerais aux sceptiques comment – dans un sens très personnel et en leur infligeant un sacré revers – fonctionnent les diffamations, les persécutions et les manipulations des Juifs. »
Apparemment satisfait du résultat du test d’AncestryDNA, Craig Cobb concluait son post par un appel à la reconnaissance :
« J’aimerais que les gens bien arrêtent de me qualifier de Noir à 14%. […] Je voudrais que ma page Wiki soit corrigée. [...] Aujourd’hui je suis classé comme en partie afro-américain. Encore des mensonges juifs. J’espère que vous comprenez, depuis le temps que cette histoire dure6. »
La vogue des tests d’ancestralité ADN est un phénomène plein de contradictions. Les premières entreprises s’adressant directement aux consommateurs (direct-to-consumer, DTC) sont apparues en 2000 aux États-Unis et au Royaume-Uni7. Du point de vue méthodologique, ces sociétés s’inspirent des approches mises au point par la génétique médico-légale et la génétique évolutive. Elles s’appuient sur les variations génétiques géographiquement définies que l’on repère dans les populations humaines contemporaines pour en tirer des conclusions sur les origines biogéographiques d’un client ou l’aider à construire son arbre généalogique biologique8. À l’origine, ces analyses reposaient soit sur des tests « uniparentaux », c’est-à-dire l’examen des régions de l’ADN mitochondrial (ADNmt) et du chromosome Y qui sont transmises des côtés maternel et paternel, chacun représentant une lignée ancestrale unique de l’arbre généalogique d’une personne ; soit sur une approche appelée « admixture », fondée sur des « marqueurs informatifs d’ancestralité » (MIA) présents dans le génome, qui représentent l’héritage génétique des deux parents (le test d’AncestrybyDNA en est un exemple9). En 2007, la société californienne de biotechnologie « 23andMe » et la société biopharmaceutique islandaise « deCODE Genetics » ont été parmi les premières à inaugurer un nouveau type de tests d’ancestralité autosomique en utilisant des techniques de génotypage qui analysent des centaines de milliers de variants génétiques (connus sous le nom de polymorphismes de nucléotides simples, PNS) présents dans tout le génome, fournissant un échantillon beaucoup plus complet du patrimoine génétique d’un individu que les premiers tests, uniparentaux et basés sur les MIA10. Depuis 2013, la plupart des entreprises de tests ADN ont adopté le génotypage. Elles vendent des tests d’admixture de haute résolution qui font le lien entre leur client et des dizaines, voire des centaines d’« ethnies génétiques » mondiales, pour 89 €, voire moins11.
Depuis une vingtaine d’années, certaines de ces entreprises sont encensées par ceux qui considèrent que ces technologies mettent fin au mythe de « pureté » raciale ou ethnique12. Cela dit, on reproche aussi à cette activité de conforter l’idée que les identités raciales et ethniques seraient – entièrement ou en partie – naturellement génétiques13. Plus récemment, les sociétés qui proposent des analyses autosomiques de petite échelle essayent de présenter ces produits comme des outils permettant de reconstituer les « origines ethniques » à des clients qui seraient déconnectés de leurs racines ancestrales. Dans l’ensemble, le marché mondial des tests d’ancestralité ADN est démesurément eurocentrique dès qu’il s’agit de constituter des ensembles de données de référence et des clientèles. De fait, plusieurs activistes amérindiens et indigènes condamnent cette industrie parce qu’elle cherche à commercialiser ses services sous prétexte de « guérir » les sociétés occidentales de leurs préjugés raciaux14. En même temps, des recherches révélant l’intérêt des communautés nationalistes blanches pour ces tests ont surpris de nombreux observateurs : le fait est qu’elles pourraient remettre en question plusieurs idées qui circulent sur le potentiel antiraciste de ces technologies15.
J’ai choisi de commencer par l’histoire de Craig Cobb parce qu’elle me permet d’aborder la question suivante : dans quelle mesure les technologies d’ascendance génétique pourraient-elles nous aider à en finir avec les mythes de « pureté raciale » ? Je me concentrerai d’abord sur les aspects techniques de ces tests pour montrer qu’en dépit de leur « objectivité » tant vantée, la gamme des technologies commerciales proposées au public et le flou de leur périmètre historique en font un outil sujet à caution si le but est de conforter ou de réfuter une ascendance personnelle. J’expliquerai que, paradoxalement, depuis quelques années, les « progrès scientifiques » de cette industrie apportent de l’eau au moulin des consommateurs désireux d’interpréter ces découvertes comme la confirmation de la « pureté raciale » à laquelle ils prétendent. Dans la seconde moitié de l’article, je me pencherai sur la façon dont l’« objectivité » de l’idée d’ancestralité ADN en tant que marqueur de « race » est remise en question et négociée par les différentes communautés d’utilisateurs ; je soulignerai les tensions qui existent entre, d’un côté, les narratifs qui privilégient le choix, de l’autre, la prévalence continue des conventions historiques quand il s’agit de définir une identité raciale en se fondant sur l’apparence physique et le « sang » (l’ascendance). Comme d’autres chercheurs16, je montrerai que les données génétiques ne sont jamais considérées comme une vérité a priori, mais plutôt assimilées de manière sélective par les personnes qui font les tests – qu’elles aient une conception anti-essentialiste ou une conception biologique-essentialiste de la « race ». Enfin, sachant que les régimes de suprématie de la race blanche opèrent à l’échelle mondiale en s’appuyant sur une variété de discours et d’arrangements structurels évoluant sans cesse (et pas exclusivement sur la notion de « pureté raciale »), je conclurai en m’opposant à l’idée que les technologies d’ancestralité ADN déstabiliseraient « automatiquement » le racisme, qu’il soit verbal ou structurel.
Des « entreprises bidon » à la science « objective » ?
Penchons-nous d’abord sur la façon dont les résultats de Cobb ont été accueillis par les généticiens qui connaissent la portée et les limites de cette technologie. À la suite de l’épisode du Trisha Show, plusieurs journalistes ont consulté des experts pour les interroger sur la fiabilité du fameux « 14 % d’Afrique sub-saharienne ». Notons que la plupart faisaient référence à des principes génétiques d’ordre général, plutôt qu’aux spécificités des tests que propose AncestrybyDNA. Parmi les réponses de ces experts, Neil Risch, directeur de l’Institut de génétique humaine de l’université de Californie, affirmait dans une interview à la National Public Radio : « Grâce aux marqueurs génétiques, vous pouvez localiser les gens relativement précisément, y compris au sein d’un continent ». Mais il rappelait que la précision des résultats dépendait de « la rigueur du test 17». Au même moment, un article publié par la rubrique FactCheck du site de Channel 4 News (Royaume-Uni) citait plusieurs généticiens à ce sujet. Neil Bradman, président du Centre d’anthropologie génétique de l’University College of London (UCL), ne faisait aucune référence au test d’AncestrybyDNA, préférant expliquer qu’il était « vain » de la part de Cobb de contester ses résultats puisque tous les humains « ont un ancêtre génétique qui remonte à l’Afrique ». De son côté, Spencer Wells, directeur du projet Genographic, une vaste étude à but non lucratif fondée sur des tests génétiques et lancée par le National Geographic, rappelait que « les concepts démodés de race ne sont pas seulement source de division sociale, ils sont scientifiquement faux », et que les humains « ne correspondent pas à des catégories physiques nettes que certains appellent races18 ».
En réalité, le test d’AncestrybyDNA était critiqué depuis plusieurs années par des généticiens, des spécialistes des Études scientifiques et technologiques (STS) et des généalogistes : tous signalaient divers problèmes techniques et épistémologiques susceptibles d’affecter son efficacité pour en savoir plus sur ses origines personnelles. L’anthropologue Kim TallBear, insistait sur la difficulté du test à distinguer certaines catégories continentales (Amérindiens/Asiatiques de l’Est ou Amérindiens/Européens, par exemple) à cause du nombre limité de MIA qu’il utilisait19. Autre inconvénient, relevé par la philosophe Lisa Gannett et l’anthropologue Duana Fullwiley : le test ne permettait pas de distinguer la date des « événements d’admixture » détectés20. La lecture des résultats dépendait fortement de la connaissance du contexte et de l’histoire familiale de la personne testée. Comme nous le verrons, le produit était donc un outil particulièrement sujet à caution pour en déduire son histoire personnelle.
Des faits sujet à caution
À l’origine, le test d’AncestrybyDNA a été mis au point par deux scientifiques américains, l’anthropologue et biologiste Mark Shriver et le biologiste moléculaire Tony Frudakis, puis il a été mis en vente en 2002 par la société DNAPrint Genomics. Pour un prix initial de 140 €, les clients avaient un rapport évaluant la composition de leur ascendance suivant quatre « grands groupes biogéographiques d’ancêtres » (« Asie de l’Est », « IndoEuropéen », « Amérindien » et « Africain subsaharien ») à partir de l’examen de 75 MIA repérés à divers endroits du génome. DNAPrint a fait faillite en 2009, après la crise financière mondiale, et le produit AncestrybyDNA a été cédé sous licence à DDC, la société qui a effectué le test de Craig Cobb en 201321.
Dans leur demande de brevet, Tony Frudakis et Mark Shriver précisaient que la répartition du test en quatre « populations ancestrales » correspondait à « une fusion aboutissant à un pedigree humain simplifié remontant à un temps où les populations vivaient relativement isolées dans les régions continentales de l’Afrique subsaharienne (Africains subsahariens), de l’Europe et du Moyen-Orient (IndoEuropéens), de l’Amérique du Nord/Sud (Amérindiens) et de l’Asie de l’Est (Asiatiques de l’Est22) ».
Les échantillons de référence utilisés pour tester le « caractère informatif sur l’ancestralité » des marqueurs génétiques qui représentaient ces quatre populations ancestrales putatives avaient été prélevés dans des groupes vivant aujourd’hui : au Nigeria et au Congo pour les marqueurs de l’Afrique subsaharienne, aux États-Unis pour les marqueurs européens, au Japon et en Chine pour les marqueurs de l’Asie de l’Est, et chez les Nativos du sud du Mexique pour les marqueurs des Amérindiens. Comme l’a noté Lisa Gannett, l’hypothèse sous-jacente, c’est que ces groupes modernes sont relativement « non mêlés » du point de vue génétique, leurs membres étant unis par « des liens ancestraux bien délimités avec les “groupes fondateurs” et des histoires lisibles de migrations de peuples23 ». En revanche, la composition génétique des individus vivant dans des zones géographiques situées entre ces coordonnées génétiques « extrêmes » de l’Ancien Monde étaient censée révéler un mélange de ces groupes puisqu’elle reflétait d’anciennes et « complexes » migrations et des admixtures de populations humaines voisines ayant eu lieu au fil de nombreux millénaires. Un individu russe vivant aujourd’hui pourrait donc avoir environ 10 % d’ancestralité génétique est-asiatique dû à une « admixture vieille » de 18 000 ans, expliquaient Tony Frudakis et Mark Shriver24.
En revanche, ajoutaient Tony Frudakis et Mark Shriver, les signes d’admixture génétique présents chez les personnes vivant dans des pays dont l’histoire a été marquée par la colonisation européenne étaient beaucoup plus susceptibles de résulter d’un « brassage » récent, apparu au cours des cinq-cents dernières années (il y avait apparemment une exception à la règle, les Américains d’origine européenne qui avaient servi de population de référence « européenne » pour le test). Le seul moyen de certifier la datation de cette admixture, disaient les deux chercheurs, c’était de tenir compte des informations généalogiques :
« Pour certains généalogistes, suivant l’arbre généalogique, les preuves peuvent avoir tendance à montrer que le mécanisme d’admixture est lié à des événements récents. Par exemple, pour une personne dont la famille a des preuves écrites de la présence d’un arrière-grand-parent amérindien, les 10% d’admixture amérindienne que révèle un test BGA indiquent que l’événement est sans doute dû à une admixture récente. En revanche, pour une personne dont l’ancestralité européenne est confirmée et homogène, 10% d’admixture amérindienne indique que l’événement est sans doute dû à un mélange ancien25 ».
Autre problème mentionné par Tony Frudakis et Mark Shriver : la marge d’erreur moyenne du test, qui, selon eux, se situe généralement entre 1 % et 5 %26. Cette marge était qualifiée de « bruit statistique » (l’expression utilisée par Craig Cobb pour réfuter le résultat de son premier test) par une des versions du mode d’emploi d’AncestrybyDNA, par opposition à l’admixture « réelle » que le test cherchait à détecter27. Ce test donnait lieu à des erreurs d’attribution d’ascendance parce que la plupart des MIA qu’il utilisait n’étaient pas exclusivement limités à une population humaine. Ils étaient liés à des fréquences plus élevées dans telle population plutôt que dans telle autre : ces résultats étaient donc probables (au sein d’une marge donnée), plus que définitifs. Frudakis et Shriver signalaient également des cas où le test classait une ascendance amérindienne connue dans la catégorie « Asie de l’Est », une erreur qu’ils avaient repérée au cours de leurs premières expériences, quand ils évaluaient la précision du panel s’agissant d’estimer les admixtures récentes en comparant les résultats obtenus aux généalogies connues des personnes testées28. Ces erreurs n’étaient pas une « mauvaise » réponse au sens scientifique, disaient-ils. Elles s’expliquaient par le lien génétique étroit entre les populations actuelles d’Asie de l’Est et d’Amérique du Nord puisque les ancêtres des secondes sont arrivés d’Asie de l’Est en traversant le pont terrestre de Behring lors d’une série de migrations qui ont eu lieu il y a entre 10 000 et 25 000 ans29.
À cause de ce problème et des limites d’un test qui ne distingue pas admixtures anciennes et récentes, Frudakis et Shriver expliquaient que les résultats négatifs étaient plus susceptibles de servir de preuve définitive que les résultats positifs pour les gens cherchant à certifier telle ou telle théorie sur leur ascendance récente :
« Par exemple, si on a une donnée circonstancielle, mais de faible qualité, suggérant un arrière-grand-père au sang purement africain, et que le test ABG [ancestralité biogéographique] révèle une origine 100 % indo-européenne, on ne tiendra pas compte de l’information (suivant la loi génétique de l’assortiment indépendant qui fait que ce résultat serait possible, mais peu probable, si les données étaient en fait correctes). En revanche, si on pense que la famille a eu un arrière-grand-père chinois, on ne peut pas le prouver à partir de l’obtention d’une admixture 20 % est-asiatique parce qu’il n’est pas possible de distinguer admixture exogame [c’est-à-dire récente] et admixture ancienne30 ».
Si l’on s’en tient à cette ligne, le meilleur moyen de confirmer ou d’écarter l’hypothèse de l’ascendance récente de Craig Cobb serait de mener de nouvelles recherches généalogiques pour trouver des preuves solides de la présence d’ancêtres noirs. Justement, ces éléments historiques sont difficiles à retrouver parce que les doctrines raciales américaines étaient faites pour que les individus « métis » soient classés dans des groupes de « non-blancs » et qu’au sein des lignées américaines blanches l’idée de « métissage racial » était violemment stigmatisée31. Les personnes d’origine africaine qui se faisaient passer pour « blanches » ont peut-être veillé à dissimuler leurs origines à leurs nouvelles familles pour s’intégrer pleinement dans la société blanche. Par ailleurs, les descendants de ces personnes ont pu modifier leurs arbres généalogiques à titre posthume ou gommer ces ancêtres des histoires transmises oralement pour préserver le mythe de la « pureté » de leurs ancêtres.
Des technologies qui évoluent
La nouvelle génération de tests autosomiques à petite échelle proposées par des sociétés comme 23andMe, AncestryDNA et FamilyTreeDNA32 a été conçue pour résoudre certains des problèmes de catégorisation et d’échelle historique que posaient les premiers tests d’admixture, dont ceux d’AncestrybyDNA. Là où l’analyse de Tony Frudakis et Mark Shriver partaient d’une poignée de groupes géographiquement éloignés qui servaient de populations de référence, dont chacune représentait une « population ancestrale » continentale, ces nouveaux tests s’appuient sur des techniques d’échantillonnage « dense » de nombreuses populations issues d’immenses régions géographiques. C’est en 2008 qu’un premier exemple de cette méthodologie a été présenté dans une étude consacrée à la structure génétique des populations européennes, dirigée par John Novembre, biologiste évolutionniste de l’université de Californie. Il montrait qu’à partir de techniques d’échantillonnage sélectif, on pouvait repérer une structure génétique à petite échelle, y compris parmi des populations ayant « de faibles niveaux moyens de différenciation génétique », structure sous-entendant « une correspondance étroite entre les distances génétiques et géographiques33».
Le test d’« ethnicité génétique » d’AncestryDNA a été mis en vente pour la première fois en mai 2012. Un communiqué de presse de l’époque indiquait que le test analysait « le génome d’une personne à plus de 700 000 emplacements de marqueurs » et contribuait à « déterminer les origines géographiques et ethniques en comparant les signatures ADN uniques des personnes testées à l’ADN d’individus du monde entier. […] La version actuelle du test comprend 20 catégories géographiques et ethniques mondiales, dont six régions d’Europe, cinq régions d’Afrique et les Amérindiens34». Le test s’appuie sur un ensemble de données de référence exceptionnel : une collection de 100 000 échantillons d’ADN prélevés sur des populations vivantes du monde entier, chaque échantillon étant assorti d’arbres généalogiques très précis35. Cet ensemble de données a été compilé entre 1999 et 2010 par des scientifiques et des bénévoles associés à la Sorenson Molecular Genealogy Foundation (SMGF). Le projet était financé par le milliardaire mormon James LeVoy Sorenson et visait à produire une base de données génétiques d’envergure mondiale36. Au début, la base était accessible au public sur le site GeneTree : chacun pouvait télécharger ses propres données génétiques et les comparer aux « lignées » stockées dans la base37. Après la mort de James LeVoy Sorenson en 2010, elle a été rachetée par le géant Ancestry.com, dont le siège est dans l’Utah, qui l’a utilisée pour en faire la base de son nouveau produit, AncestryDNA.
Le site d’Ancestry DNA comprend un livre blanc qui explique la méthode scientifique qui a servi à mettre au point le test d’« ethnicité génétique38 ». La première étape consiste à sélectionner des échantillons de référence à partir des données de la SMGF et de plusieurs bases publiques afin d’avoir un échantillon de « populations mondiales ». En général, les échantillons de chaque région cible viennent d’individus peu apparentés et dont l’ascendance est relativement « non mêlée » (par exemple, des personnes dont les quatre grands-parents sont nés dans le même pays). Ensuite, les échantillons de référence sont génotypés et les données sont « nettoyées » Pour ce faire, on utilise l’analyse en composantes principales (ACP), où chaque échantillon d’ADN est représenté sous la forme d’un point sur un graphique, si bien que la distance par rapport aux autres échantillons pointés reflète la distance génétique globale entre eux (laquelle reflète souvent la distance géographique). Ces graphiques permettent d’identifier et de supprimer les échantillons qui ont des valeurs, ce qui arrive, entre autres, si certains individus d’une cohorte sont trop étroitement liés entre eux, ou si leur ancestralité génétique contredit les informations que l’on a sur leur pedigree. Une fois que les données « nettoyées » sont de nouveau reportées sur un graphique ACP, idéalement elles apparaissent sous forme de grappes distinctes, se chevauchant parfois légèrement. Les chercheurs partent de ces grappes pour identifier un certain nombre de « populations génétiques » qui serviront de base aux « ethnies génétiques » constitutives du test. Enfin, une série d’expériences est effectuée, qui servent à vérifier la fiabilité des prédictions d’« ethnicité » de chaque échantillon au sein de cette base de données de nouveau nettoyée ; une fois de plus, les valeurs improbables sont éliminées.
Le test d’AncestryDNA a été conçu suivant l’hypothèse qui veut que la grande majorité de l’ADN des clients est un mixte de différentes « ethnicités » dû soit à des événements de brassage récents (qui date de cinq-cents à mille ans), soit à des histoires de migration et de brassage plus anciennes (qui remontent au-delà du dernier millénaire). Les proportions de mélange ou d’admixture des clients sont calculées par un algorithme qui analyse la fréquence des allèles à des centaines de milliers de positions du génome. L’attribution d’une ascendance entre des régions voisines est hautement probabiliste ; elle repose sur les « signaux » collectifs de nombreux marqueurs génomiques (les polymorphismes d’un seul nucléotidique, dit PSN39). Il n’existe donc pas de marqueur génomique unique, « français » ou « japonais », par exemple, qui permette de rattacher catégoriquement l’ascendance d’une personne à ces populations40.
Le test d’AncestryDNA – comme ceux qui sont apparus sur le marché à la même époque, dont le test de composition d’ancestralité autosomique de 23andMe et le test myOrigins de FamilyTreeDNA – correspond à une avancée technique et méthodologique importante si l’on compare avec la génération précédente, notamment en ce qui concerne l’échelle géographique à laquelle elle disait estimer l’ancestralité des clients. La première version du test d’AncestryDNA comprenait 26 régions « mondiales » dont la définition géographique variait (« Scandinavie », « Juif européen », « Asie orientale », « Bénin/Togo », « Afrique du Nord »). Ces appellations étaient à la fois pratiques (elles dépendaient du contenu de la base de référence et de la fiabilité des prédictions d’« ethnicité » des échantillons) et stratégiques puisqu’elles tenaient compte de l’origine des clients d’Ancestry.com (la majorité était des Américains européens ou d’origine européenne), ainsi que des « nouveaux » groupes démographiques cibles tels que les Afro-Américains41. La couverture « mondiale » de ces tests était donc assez inégale, voire incohérente : on comptait, par exemple, 9 « ethnies génétiques » pour l’Europe et l’Afrique contre 3 pour l’Asie, 1 pour les Amériques et aucune pour l’Australasie.
Notons que la plupart de ces entreprises regroupaient leurs populations de référence par catégorie continentale. En général, les personnes qui font un test d’ancestralité ADN obtiennent un document qui n’est autre qu’une carte du monde sur laquelle des zones oblongues et colorées indiquent les régions ou les « ethnies » de leurs ancêtres. La carte est accompagnée d’un tableau qui indique la répartition par région des pourcentages de cette ancestralité. 23andMe et FamilyTreeDNA ont adopté un code chromatique et attribuent une couleur à chaque groupe continental. 23andMe distingue les populations sous-continentales en ajoutant différentes nuances de la même couleur (voir images 1 et 2). De son côté, AncestryDNA attribue des couleurs à chaque population génétique au hasard, mais présente les résultats sous forme d’un tableau vertical structuré par groupes continentaux, si bien que les clients voient d’abord leurs pourcentages continentaux généraux, suivis par la répartition « ethnique » plus précise de chaque région (voir image 3)42. C’est sous cette forme que Craig Cobb a obtenu ses résultats d’ancestralité « 100 % européenne ».
Comme l’a fait remarquer Peter Wade, même si les tests d’ADN autosomique présentent plutôt l’ascendance de chacun comme un mixte de différentes « populations génétiques », ils entraînent « inévitablement les idées de pureté et d’intégralité, sous-entendus comme les antécédents notionnels circonscrits qui donnent lieu au mélange43 ». Dans le processus résumé ci-dessus, les proportions du mixte de chaque client sont calculées à partir de collections d’échantillons d’ADN qui ont été « nettoyés » (ou, pourquoi pas, « purifiés ») pour donner l’impression que ce sont des signaux génétiques clairs, reliant des marqueurs d’ADN à des populations et des territoires géographiques « distincts ». Néanmoins, comme le note Peter Wade, il s’agit toujours d’une pureté relative, qui cache des histoires plus anciennes de brassage et de migration44. Le but du test d’AncestryDNA (et de ceux de la même génération) est de fournir aux clients une histoire de leur ascendance qui correspond à une période généalogique relativement récente. Ce qui explique que les appellations adoptées pour décrire les différentes « ethnicités génétiques » ou « ancestralités » correspondent à des entités géopolitiques contemporaines que les clients connaissent – même si certaines de ces entités n’existent que depuis deux siècles.
Admixture autosomique de l’autrice obtenue avec le test myOrigins de FamilyTreeDNA, 2014
Admixture autosomique de l’autrice obtenue avec le test de composition d’ancestralité de 23andMe, 2016
Admixture autosomique de l’autrice obtenue avec le test d’ethnicité génétique d’AncestryDNA, 2014
Dans leur livre blanc, les chercheurs qui travaillent pour AncestryDNA reconnaissent les difficultés qu’il y a à historiciser précisément les résultats d’ancestralité obtenus par un test ADN. Ils ajoutent qu’il est possible de mesurer l’efficacité du test en comparant les résultats avec les pedigrees enregistrés dans la base de données SMGF (ou, par exemple, ceux qu’ont obtenu les clients ayant téléchargé des arbres généalogiques détaillés de leurs profils sur Ancestry.com)45. Ils déclarent néanmoins ce qui suit :
« Les arbres généalogiques comprennent des informations qui sont très loin de ce que nous estimons chez AncestryDNA. Ils n’indiquent que les régions des ancêtres connus d’un échantillon, alors qu’avec l’estimation ethnique génétique, nous tâchons d’évaluer la quantité inconnue d’ADN héritée de fait par tous les ancêtres d’un échantillon. Par ailleurs, les estimations génétiques d’ethnicité remontent à des milliers d’années, au-delà de la génération à laquelle s’arrête un arbre généalogique. Les régions qu’un arbre qualifie de “populations” étaient peut-être très différentes des milliers d’années plus tôt, il est donc possible qu’elles soient représentées autrement par une estimation ethnique génétique46.»
L’accent mis sur l’histoire récente, qui correspond plus ou moins à la période du colonialisme européen, répond surtout à la volonté des clients américains de savoir quelles sont les origines géographiques de leurs ancêtres peu avant leur arrivée dans le « Nouveau Monde47 ». Or c’est aussi à cette époque que la notion moderne de « race » humaine, qui fait référence à de vastes groupes continentaux, naît et s’impose comme une façon de classer les individus dans les sociétés coloniales, lesquelles décident, par exemple, qui peut se reproduire avec qui, et quel sera le statut juridique et social des enfants. Si nous envisageons la race comme un phénomène bioculturel – c’est-à-dire comme le produit de régimes historiques coloniaux et de visions du monde racistes qui visent à perpétuer des différences ostensiblement « naturelles » en contrôlant les populations –, la présence de catégories « raciales » dans ces rapports peut être comprise comme le reflet de cette histoire de la racialisation48. Cela dit, cette interprétation ne vaut que si elle va avec une contextualisation historique et théorique rigoureuse – à laquelle peu de sociétés d’analyse ADN s’astreignent. Pour les clients, c’est ce qui explique, par exemple, que la catégorie « Européen » donne l’impression d’être une entité naturellement délimitée et historiquement stable, et non pas le produit de l’histoire récente d’entreprises coloniales et raciales. De fait, c’est ainsi que les nationalistes blancs lisent ces rapports et exploitent ces données pour confirmer la nature absolue et biologiquement enracinée des différences raciales.
Négocier son ancestralité
Jusqu’ici j’ai tâché d’expliquer comment différentes techniques d’analyse génétique – qui fonctionnent suivant des échelles historiques et régionales variables quand il s’agit d’estimer une ascendance – avaient pu produire différents rapports sur l’ascendance d’un Craig Cobb. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Les chercheurs en sciences sociales qui s’intéressent à la réception de ces données par différents utilisateurs publics et dans divers contextes culturels montrent que les connaissances génomiques sont soumises à des processus de traduction et d’interprétation socialement et idéologiquement déterminés, qui conditionnent la façon dont les clients font le lien entre leurs résultats et le narratif personnel qu’ils entretiennent sur leur identité49. Comme d’autres formes d’identité sociale, les revendications d’appartenance raciale ou ethnique fondées sur l’ADN invoquent des processus collectifs et nécessairement réciproques d’affirmation et d’assignation, de choix et d’obligation. Les gens qui font le test s’en remettent souvent à une communauté et à des « gardiens » spécifiques pour évaluer la pertinence de leurs données génétiques par rapport à une identité revendiquée50. Ces échanges leur permettent aussi de confirmer l’objectivité des résultats obtenus en les comparant à d’autres types de savoirs contextuels : des sources d’information personnelles (par exemple, un récit oral ou des informations déjà existantes sur l’histoire de la famille) ou des idées plus générales et de sens commun sur l’identité et l’ancestralité (comme celles qui fondent les mythes sur l’identité nationale ou les différentes conceptions la race51).
Aux États-Unis, la distinction admise entre Blancs et Noirs fait référence à l’ancestralité. C’est une convention dont l’origine est l’esclavage et la volonté coloniale de définir qui pouvait ou ne pouvait pas être asservi (la blancheur étant intrinsèquement liée à l’idée de liberté « naturelle », et la noirceur à celle d’esclavage « naturel52 »). Cette ligne de démarcation a néanmoins varié au fil du temps. Dans l’État de Virginie, par exemple, selon la période, le critère suivant lequel un individu était noir du point de vue juridique fut avoir « un quart de sang noir », ou « un seizième ou plus de sang noir », ou encore, « une goutte avérée de sang noir53 ». Aujourd’hui, de nombreux théoriciens critiques de la race affirment que les identités noires américaines n’obéissent plus en priorité à la logique biologique des « gouttes de sang », mais plutôt à des mécanismes sociaux d’auto-assignation et de reconnaissance communautaire. Commentant les résultats du test ADN de Craig Cobb, l’ethnographe Yaba Blay – dont l’ouvrage (1)ne Drop analyse ce que signifie « être Noir » pour les personnes ayant la peau claire ou « d’apparence ambiguë » et s’identifiant comme Noirs ou descendants d’Africains – écrivait ce qui suit :
« Être noir, en tant qu’identité et expérience vécue, est beaucoup plus complexe et plus nuancée qu’avoir tant de gouttes dans son arbre généalogique. Être noir, c’est autant ce qui fait que vous êtes ce que vous êtes que ce que vous faites de vous-même.
Même si j’ai ri en voyant la tête de Craig Cobb quand il a découvert qu’il était “ d’origine africaine”, il est évident que les résultats de son test ADN ne font pas de lui un Noir comme par miracle ; le nombre de gouttes n’intervient plus54 ».
Le raisonnement de Yaba Blay tient compte de l’idée de choix, et de convention, qui préside à la définition contemporaine de l’identité raciale. C’est aussi ce que soulignent les chercheurs qui analysent les réactions des utilisateurs, ainsi que moi-même puisque je me suis intéressée à l’impact de ces tests sur les affiliations raciales et ethniques des personnes qui y ont recours au Brésil et aux États-Unis55. Plusieurs Américains blancs que j’ai interrogés avaient découvert qu’ils avaient un petit pourcentage d’ancestralité africaine. Même si, en principe, cela pourrait être considéré comme un motif de reclassement dans la catégorie « Noir », aucun ne disait que le test avait modifié la façon dont il ou elle s’identifiait du point de vue racial. Contrairement à Cobb, ces personnes acceptaient ces résultats sans problème, certaines ont même fait des recherches pour essayer d’identifier l’origine de cette ancestralité africaine dans leur arbre généalogique. En revanche, elles ne pouvaient pas revendiquer d’identité noire dans la mesure où (comme le dit l’une d’elles) « ce n’est pas quelque chose avec lequel j’ai vécu ni avec lequel je me suis identifié, ni moi, ni personne dans ma famille56». Ces réactions vont dans le sens de Yaba Blay quand elle explique que pour beaucoup de gens aujourd’hui aux États-Unis, être noir ne se résume pas à avoir quelques « gouttes de sang » ni tant de pour-cent d’ADN. C’est aussi une mémoire culturelle qu’il faut réaffirmer à chaque génération pour que naisse un sentiment d’authenticité sociale. Cette affirmation répétée est encore plus importante quand les traces de cette origine racialisée ne sont plus « visibles » à la surface du corps, auquel cas, être noir est avant tout une identité sélective.
Le rapport entre ancestralité génétique et identité raciale est perçu différemment dans les sociétés latino-américaines comme le Brésil, marquées à la fois par des histoires de brassage « racial » intense (mestiçagem ou miscigenação, en portugais) et des idéologies eugénistes de blanchiment racial (embranquecimento/branqueamento). Les Brésiliens que j’ai interrogés distinguaient toujours leur pourcentage d’ancestralité génétique (que certains considéraient plus ou moins comme une mesure de leur « race biologique ») de leur « couleur » (cor, en portugais, un terme qui désigne autant la couleur de la peau que des traits phénotypiques racialisés tels que la texture des cheveux, la couleur des yeux et la forme du nez et des lèvres). Pour eux, c’est la « couleur », et non l’ancestralité génétique, qui était le vecteur du racisme (ou de l’absence de racisme) qu’ils avaient connu, donc qui influençait la façon dont ils s’identifiaient racialement, par exemple, sur les formulaires officiels57. Pour autant, les personnes qui militent dans les mouvements politiques noirs ou les groupes culturels « afro » ont tendance à considérer qu’être noir est moins une question d’ancestralité génétique ou de couleur que de sentiment et d’identification personnelle à l’histoire et à la culture afro-brésiliennes. Certaines personnes ayant la peau claire assument une identité « afro » à cause de leur affinité avec tel grand-parent ou tel parent qui leur a transmis des histoires sur les racines noires de leur famille58. La volonté d’entretenir la mémoire de ses ancêtres noirs est aussi une forme de résistance à la doxa du blanchiment qui domine au Brésil depuis la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, dont le but était de « purifier » la nation de ses éléments « raciaux » africains et indigènes. Cette doxa s’est tarie avec le temps, mais son influence est encore sensible dans le racisme anti-Noir du Brésil actuel59.
Défier ou appuyer la blancheur ?
Les rapports entre les données génétiques d’ancestralité et les différentes formes d’identification raciale sont donc socialement et politiquement marqués, et compris au prisme des histoires familiales de chacun et des conventions raciales de chaque communauté. Craig Cobb, par exemple, a tenu à négocier ses résultats au sein de sa communauté de suprémacistes blancs, unie par la croyance en la nécessité de préserver la pureté génétique de la « race blanche ». Au début, quand ses coreligionnaires ont découvert son « ancestralité africaine sub-saharienne », ils étaient ambivalents. Les résultats de son test étaient à peine mentionnés sur le fil de discussion commentant l’incident posté par le forum Stormfront après le Trisha Show. Certains membres du forum soutenaient ouvertement Cobb et estimaient que l’émission avait été « truquée à ses dépens », rappelant l’identité revendiquée par cet « homme blanc courageux, honnête et racialement loyal ». Les autres cherchaient surtout à savoir si Cobb « donnait une mauvaise image de » ou « nuisait à » la communauté nationaliste blanche en se présentant ouvertement comme un néonazi (un marquage dont certains avaient peur qu’il dissuade d’éventuelles recrues jugeant leur communauté « trop extrême60 »).
Plus tard, en 2015, quand Craig Cobb a publié les résultats d’AncestryDNA sur un autre fil de discussion de Stormfront, les réactions furent nettement positives. Plusieurs adhérents de Stormfront le félicitèrent parce qu’il avait réussi à prouver sa blancheur, confortant ainsi les principes racistes défendus par leur communauté, notamment l’idée qu’une personne peut être génétiquement blanche à 100 %, ou que la présence de « sang » noir ou juif « se voit » dans le physique ou le comportement d’un individu pour ceux qui savent le repérer. Comme le disait un membre, « Je savais [que M. Cobb était européen à 100 %], s’il était noir à 14 %, ça se verrait ». « Les idiots qui disent avoir “prouvé” que Craig était un octavon, affirmait un autre, ne font que discréditer la science avec leurs absurdités. Quiconque ayant une once de bon sens savait que les résultats présentés par cette émission débile étaient entièrement fabriqués61 ».
Ces commentaires reflètent les conclusions d’une étude de deux sociologues, Aaron Panofsky et Joan Donovan, qui se sont penchés sur les réactions des membres de Stormfront aux résultats des tests ADN postées au sein de leur communauté : certains résultats sont interprétés comme s’ils confirmaient l’identité raciale blanche des personnes testées, d’autres, comme s’ils contredisaient leurs revendications62. En dépit des conditions d’adhésion très strictes de ce forum communautaire (réservé aux « personnes non juives d’origine entièrement européenne, sans exception »), Panofsky et Donovan ont remarqué de nombreuses réactions de soutien à des individus dont les données génétiques ancestrales sont perçues comme si elles remettaient en cause leur identité raciale blanche. Ces sympathisants ont une large gamme de stratégies visant à réfuter ou réinterpréter ces résultats « indésirables ». Il y a ceux qui mettent en doute la fiabilité du test en disant que de nombreuses sociétés sont « dirigées par des Juifs » ou « font partie d’une conspiration libérale », et qu’elles attribuent régulièrement de petits pourcentages d’ancestralité « non-blanche » aux clients américains pour « promouvoir le multiculturalisme et faire croire aux Blancs qu’ils sont métissés63». D’autres proposent que les candidats fassent un nouveau test en faisant appel à une autre entreprise et leur recommandent des chercheurs jugés favorables à la cause nationaliste blanche, ou des plates-formes de comparaison d’ADN en libre accès, comme GEDmatch64, soi-disant moins affectées par les « préjugés multiculturels » que les grandes entreprises commerciales. Autre stratégie : parier sur des erreurs de catégorie dans l’étiquetage des données génétiques de façon à pouvoir requalifier des populations racialement « suspectes » comme étant absolument « caucasiennes ».
Dans l’ensemble, cela dit, Panofsky et Donovan notent que ces tests sont mal vus parce qu’ils menacent la conception biologique-essentialiste de la race qui fonde le nationalisme blanc. Le problème, relevé par certains membres du forum, c’est que les données initiales montrant que la plupart des personnes d’origine européenne ont un petit pourcentage d’admixture génétique non-européenne signifient que de nombreux membres ne sont plus racialement « purs » suivant leurs normes. Dans l’ensemble, pourtant, les techniques ADN incitent rarement les membres à revenir sur leurs convictions ; au lieu de quoi, les communautés nationalistes blanches cherchent à redéfinir les contours de ce que signifie être Blanc. Certains proposent de s’écarter des définitions biologiques-essentialistes, sous-entendant que les définitions culturelles et politiques de la blancheur seraient une condition d’adhésion plus pertinente. Comme l’a dit un des sympathisants : « Si vous avez l’air blanc, si vous vivez comme un blanc, si vous vous identifiez aux blancs, si vos grands-parents et vos arrière-grands-parents avaient l’air blanc, vivaient comme des blancs et s’identifiaient aux blancs, souvent ça suffit65 ». À l’inverse, d’autres anticipent la possibilité de repérer les variantes génétiques expliquant les traits physiques, comportementaux et cognitifs qui sont censés caractériser la couleur blanche, une façon de faire entrer l’essentialisme génétique par la petite porte66. Comme le rappellent Panofsky et Donovan, de nombreuses entreprises se risquent déjà à des hypothèses sur les caractéristiques génétiques qui vont de « la couleur des cheveux et des yeux aux préférences gustatives en passant par le QI67 » – autant d’outils que ces communautés s’approprieront sûrement les yeux fermés pour créer de nouveaux tests de « blancheur génétique ».
Le sang et le sol
L’étude d’Aaron Panofsky et Joan Donovan souligne la flexibilité fondamentale des idéologies racistes, et la capacité des adhérents à adapter leurs doctrines aux données scientifiques, et vice versa. Il existe des cas où les sympathisants en arrivent à bousculer les idées qu’ils ont sur l’ascendance, voire à modifier leur conception ontologique de la race, mais c’est plus rare chez ceux qui sont très attachés à la notion de supériorité raciale. Qui plus est, comme le montre l’exemple de Cobb, les entreprises ont différentes méthodologies, si bien qu’il existe de nombreuses options pour obtenir le résultat souhaité. Notons qu’effectuer un nouveau test est une pratique relativement courante et va au-delà des communautés nationalistes blanches. Dans le cadre de mes recherches, j’ai constaté que, pour la plupart des gens, l’objectif de ces nouveaux tests est d’avoir un tableau plus complet de leur ascendance et de pallier les limites techniques d’un test (le volume et le contenu de la base de données, les marqueurs d’ADN pris en compte…), plutôt que de prouver une identité raciale mise en avant68.
Notons aussi que la quête de « pureté » raciale n’est pas le seul motif justifiant que les données génétiques sur l’ancestralité soient exploitées pour étayer les idées de suprématie raciale ou ethnique. Jenny Reardon et Kim TallBear ont comparé la ferveur avec laquelle les scientifiques « occidentaux » collectent les ADN de groupes indigènes à « la position bien connue des [Européens] ayant des revendications morales sur les ressources naturelles des peuples indigènes69 ». Aux États-Unis et au Canada, des activistes et des universitaires s’insurgent contre la présence d’échantillons d’ADN indigènes dans les bases de données commerciales des tests en rappelant que ces technologies alimentent souvent les revendications identitaires et les ressources politiques des non-indigènes. Ces pratiques pourraient conduire à de nouvelles définitions juridiques de ce que signifie être « autochtone » ou « natif », et inciter à mettre l’accent sur la conception raciale de l’ascendance au détriment des relations sociales et culturelles, privilégiées par les conceptions tribales de l’identité70. De son côté, Darryl Leroux a montré que les services qui proposent des tests d’ancestralité « amérindienne » sont exploitées par les descendants de colons québécois français qui militent pour être juridiquement reconnus en tant que groupe « autochtone », y compris les droits politiques qui en découlent. Pour Darryl Leroux, remonter une lignée familiale jusqu’à de lointains ancêtres amérindiens « permet aux colons blancs de se dire autochtones tout en portant atteinte à la souveraineté et à l’autodétermination des autochtones71 ». Au Royaume-Uni et dans plusieurs pays européens, les nationalistes ethniques tentent de récupérer les études génétiques de populations et les prétendues particularités biologiques qu’elles identifient parmi les populations européennes « autochtones », pour dire que celles-ci devraient avoir un statut d’autochtone et être préservées de l’influence corruptrice des migrants « étrangers72 ».
Pour la géographe Catherine Nash, la dichotomie entre groupes « autochtones » et groupes « étrangers » (ou « purs » et « mixtes ») fait partie intégrante des fondements théoriques de la génétique des populations, qui tend à cartographier les variations génétiques suivant des groupes humains géographiquement définis. C’est ainsi qu’elle écrit :
« L’idée qu’une séquence d’ADN a une origine géographique implique à son tour que chaque lieu – localité, région, pays et continent – a un caractère génétique particulier et que les personnes qui y vivent partagent ce caractère et se distinguent génétiquement, à différents degrés, de celles qui vivent dans d’autres lieux. Si l’on suit ce raisonnement, les personnes qui sont dans un lieu spécifique mais sont génétiquement différentes des habitants “indigènes” ont d’autres lieux ancestraux génétiques naturels donc, à un certain niveau fondamental, appartiennent naturellement à un autre lieu73. »
Politiquement parlant, cette logique est à double tranchant. Si certains groupes historiquement opprimés (les Uros, au Pérou, par exemple, ou les Aïnous, au Japon) ont essayé de s’appuyer sur la notion de différenciation génétique pour faire valoir leur revendication politique de groupe « ethniquement distinct », en pratique, les données ADN peuvent aussi être utilisées pour discréditer les revendications de particularité ethnique à partir du moment où l’on ne trouve pas de niveau d’homogénéité génétique « suffisant74 ». Au Brésil, où l’adoption de mesures de discrimination positive à caractère racial a suscité une polémique de plus de dix ans, les travaux sur l’ancestralité génétique ont souvent été récupérés par des commentateurs de droite pour contester la légitimité des activistes noirs qui défendaient ces mesures pour lutter contre le racisme structurel et les inégalités sociales sachant qu’elles permettent d’augmenter le nombre d’étudiants noirs admis dans les universités publiques. Ces commentateurs s’appuyaient sur des études d’ADN qui montraient que tous les Brésiliens avaient une ancestralité mixte, quelle que soit leur « couleur » – pour certains, il était donc impossible de savoir objectivement qui était éligible à ce dispositif de discrimination positive puisqu’on pouvait avoir la peau foncée et des caractéristiques « africaines » tout en ayant une proportion importante d’ancestralité génétique européenne, ou vice versa75. Cette politique de quotas a été avalisée par une loi fédérale en 2012, mais récemment est née la crainte de voir des Brésiliens phénotypiquement blancs compromettre son efficacité en brandissant des rapports d’ADN ou d’autres données généalogiques, notamment des preuves d’ancestralité africaine (un phénomène qualifié de « fraude raciale » par certains militants noirs). D’où la publication de nouvelles directives qui mettent l’accent sur l’apparence physique, plus que sur l’ascendance, pour pouvoir bénéficier des programmes de discrimination positive76.
Conclusion
Nous avons tendance à croire que les tests d’ancestralité ADN sont un outil efficace pour déconstruire les idéologies racistes. En réalité, ces technologies, utilisées pour tenter d’invalider les conceptions biologiques-essentialistes de la race au prisme de l’ancestralité génétique personnelle, sont « à double tranchant77 ».
Premier problème, la variété des tests qui sont à la disposition du public : les différents contenus des bases de données de référence et des marqueurs d’ADN examinés peuvent produire des rapports très éloignés sur les ancêtres d’une même personne. Les gens qui cherchent à avaliser un récit spécifique de leur ascendance peuvent accumuler les tests jusqu’au moment où elles obtiennent une version qui « marche ». En outre, ces technologies commerciales sont en constante évolution, et ce pour répondre aux intérêts de clientèles cibles. Depuis dix ans, les sociétés qui proposent des tests ADN (en particulier celles qui s’adressent avant tout aux clients nord-américains) tentent d’affiner leurs analyses afin de refléter les origines « ethniques » des clients sur une échelle de temps généalogique relativement récente, qui correspond approximativement à l’époque du colonialisme européen et à l’émergence des catégories raciales modernes. Leurs algorithmes ont tendance à exclure les empreintes de métissages ancestraux « plus profonds », si bien que les résultats sont plus susceptibles de coïncider avec les attentes des clients s’agissant de leurs origines ethniques et raciales (plus que les tests antérieurs fondés sur les AIM, que certaines entreprises proposent encore). D’où les problèmes qui se posent sur l’objectivité des tests ADN vendus comme des mesures « scientifique » de l’ascendance. Jenny Reardon formule ainsi la question : « Les tests d’ancestralité génétique – qui fonctionnent à partir de bases de données générées suivant des ordres économiques et politiques spécifiques – peuvent-ils être considérés comme objectifs ? Sur quelles bases ?78»
En dépit de ces évolutions, de nombreuses entreprises persistent à classer leurs résultats suivant des taxonomies de type racial (par exemple, en décomposant les « proportions d’ancestralité » en groupes continentaux, puis en catégories sous-continentales), ce qui permet aux clients d’apprendre qu’ils sont « 100 % européens », par exemple. Ces rapports se prêtent très facilement à une lecture raciste. Comme l’indiquent Aaron Panofsky et Joan Donovan, « Les nationalistes blancs considèrent le “100 % européen” que certains découvrent [dans leur test] comme la preuve que l’idéal de “pureté ” blanche et européenne est une réalité empirique pour beaucoup, n’en déplaise aux progressistes affirmant que “tout le monde est métis”79».
Envisagés collectivement, ces résultats peuvent aussi nous renseigner sur la façon dont la différence raciale a été construite et reproduite au fil de l’histoire par la mainmise sur les rapports sexuels, l’espace et les structures de parenté dans les sociétés coloniales et slavocratiques. À cet égard, certains chercheurs affirment que la race ne saurait être considérée exclusivement comme une construction sociale, puisque les processus de racialisation qui accompagnaient et légitimaient l’esclavage et le colonialisme ont laissé leur empreinte dans la génomique des populations américaines et caribéennes modernes80. Ce qui ne signifie nullement approuver les conceptions biologiques-essentialistes de la race. Au contraire, plutôt que de sous-entendre que les « races » sont des structures génétiques naturelles qui régissent les comportements humains et les destins personnels, les paradigmes bioculturels visent fermement à « situer la biodiversité humaine au sein d’un cadre socioculturel, réunissant ainsi la culture et la biologie en intégrant celle-ci dans la société et la culture81 ». Le fait que des suprémacistes blancs américains obtiennent effectivement des résultats d’ancestralité « 100 % européenne » peut être considéré comme une conséquence du tabou lié au métissage dans l’Amérique du Nord coloniale et postcoloniale – mais aussi comme le produit de l’efficacité de la « règle de la goutte unique » qui fait que tout enfant né de rapports interraciaux est « noir » du point de vue racial, donc est supprimé des généalogies blanches. En même temps, que certains Américains blancs aient un léger pourcentage d’ancestralité génétique africaine peut être considéré comme une relique de la pratique historique des Noirs à la peau claire essayant de « passer pour des Blancs » afin d’échapper à l’esclavage et au racisme systémique.
Je me suis particulièrement intéressée ici aux réactions des nationalistes blancs nord-américains en m’appuyant sur l’exemple de Craig Cobb dont les résultats semblaient contradictoires. Néanmoins, il est important de signaler que les idéologies de suprématie raciale et ethnique ne se limitent en aucun cas à l’idée de « pureté » génétique. En Amérique latine, le suprémacisme blanc a été mobilisé avec succès par une approche eugéniste du métissage racial82. Aaron Panofsky et Joan Donovan expliquent d’ailleurs que certains suprématistes blancs nord-américains débattent pour savoir s’ils n’auraient pas intérêt à adopter ce type de conception de la blancheur, fondée sur le principe de « dilution » des traces de métissages passés au moyen d’accouplements sélectifs – un processus qui pourrait ostensiblement être repéré grâce aux technologies ADN83. Ce qui en dit long sur la flexibilité des doctrines racistes et nationalistes ethniques, parfaitement capables de s’adapter aux théories et aux techniques scientifiques du moment pour préserver leur ordre du jour : la domination raciale.
Enfin, je rappelle que j’ai limité mon analyse à la question qui consiste à savoir dans quelle mesure les technologies ADN permettent de démystifier les idéologies racistes. Les chercheurs en sciences sociales, eux, ont tendance à dire que plusieurs formes de racisme vont bien au-delà de la croyance en la « pureté » et la suprématie raciales. Ce sont des racismes structurels et systémiques – produits par la structure des sociétés telle que les idéologies raciales l’ont voulue pour perpétuer les inégalités entre des groupes racialisés84. En ce qui concerne la lutte contre les formes structurelles de racisme, le potentiel antiraciste des tests ADN est ambigu. Au Brésil, des travaux sur le patrimoine génétique de la nation ont été exploités pour contester et discréditer les militants antiracistes. Ailleurs, on a vu des groupes indigènes s’inquiéter en voyant que des données ADN sont exploitées pour s’approprier leur identité et rogner sur leurs droits politiques, chèrement acquis, de minorités historiquement opprimées. Ce qui explique que des déclarations bien intentionnées comme « Nous sommes tous génétiquement métissés » ou « Nous sommes tous des migrants » peuvent être de parfaits moyens d’éluder, voire d’entraver, l’action politique visant à remédier aux inégalités sociétales dont se nourrissent les racismes85.
Notes
1
Laura Collins, « EXCLUSIVE : Watch the Moment White Supremacist Trying to Take over North Dakota Town Refuses to Fist Bump Black Host after She Tells Him He Is 14 per Cent African, », Mail Online, 11 novembre 2013, d’après News, en ligne.
2
Yaba Blay, « White Supremacist Would Be Black under America’s One-Drop Rule », CNN, 20 novembre 2013, d’après Living.
3
Collins, « EXCLUSIVE : the Moment White Supremacist… ».
4
Tessa Stuart, « White Supremacist Craig Cobb Grapples with DNA Test Suggesting He Is Part Black », The Village Voice, 12 novembre 2013, d’après News and Politics.
5
« Autosomal DNA testing comparison chart », ISOGG Wiki, mis en accès le 4 mars 2018.
6
Cobb, « Craig Cobb’s Ancestry.com DNA Results ».
7
Donn Devine, « Solving the Mystery : DNA Tests for Your Research » Ancestry 18, n° 5 (2000), p. 47-49 ; Catherine Nash, « Genetic Kinship, » Cultural Studies 18, n° 1 (2004), 1-33.
8
Les facteurs génétiques qui sous-tendent ces structures de populations sont analysées plus longuement par Hiroki Oota dans « La Diversité génétique humaine et les facteurs socio-culturels », Politika, 21 juillet 2021.
9
Mark D. Shriver et Rick A. Kittles, « Genetic Ancestry and the Search for Personalized Genetic Histories, » Nature Reviews 5 (2004), p. 611-18 ; Jean-Luc Bonniol et Pierre Darlu, « L’ADN au service d’une nouvelle quête des ancêtres ? » Civilisations 63, n° 1 § 2 (2014), p. 201-19.
10
« Autosomique » fait référence aux autosomes, càd aux 22 paires de chromosomes chiffrés qui constituent le génome humain et se transmettent par recombinaison (à l’exclusion les chromosomes sexuels, X et Y). Sur la mise au point des tests autosomiques de 23andMe et deCODE, voir Gísli Pálsson, « Decode Me ! Anthropology and Personal Genomics, » Current Anthropology 53, n° 5 (2012), S185-95.
11
Claude-Olivier Doron et Jean-Paul Lallemand-Stempak, « Interpréter la diversité humaine. Entretien avec Bertrand Jordan », La Vie des Idées, 25 février 2014, ; Sarah Abel, « À la recherche des identités transatlantiques. Des boucles conceptuelles au croisement de la société, l’histoire et la génétique», Nuevo Mundo Mundos Nuevos, colloque, 10 octobre 2016 ; Sarah Abel, Permanent Markers : Race, Ancestry, and the Body after the Genome, Chapel Hill, University of North Carolina Press, 2022, p. 89-113.
12
Sarah Abel, « Of African Descent ? Blackness and the Concept of Origins in Cultural Perspective, » Genealogy 2, n° 1 (2018), https://doi.org/10.3390/genealogy2010011.
13
Kim TallBear, « DNA, Blood, and Racializing the Tribe, » Wicazo SA Review 18, n° 1, 2003, p. 81-107 ; Dorothy Roberts, « Tracing Racial Roots, » in Fatal Invention : How Science, Politics, and Big Business Re-Create Race in the Twenty-First Century, New York, New Press, 2011, p. 226-57.
14
Dieter Holger, « DNA Testing for Ancestry Is More Detailed for White People. Here’s Why, and How It’s Changing », PCWorld, 4 décembre 2018 ; Jenny Reardon et Kim TallBear, « Your DNA Is Our History : Genomics, Anthropology, and the Construction of Whiteness as Property », Current Anthropology 53, n° 5, 2012, S233-45.
15
Élodie Grossi et Joan Donovan, « Hate in the Blood : White Supremacists’ Use of DNA Ancestry Tests », The Activist History Review, 20 octobre 2017, ; Vasile Stănescu, « “White Power Milk” : Milk, Dietary Racism, and the “Alt-Right” », Animal Studies Journal 7, n° 2, 2018, p. 103-28 ; Aaron Panofsky et Joan Donovan, « Genetic Ancestry Testing among White Nationalists : From Identity Repair to Citizen Science», Social Studies of Science, 49, n° 5, 2019, p. 653-81, https://doi.org/10.1177/0306312719861434 ; Alexandros Mittos et al., « “And We Will Fight For Our Race !” A Measurement Study of Genetic Testing Conversations on Reddit and 4chan », 2019 ; Aaron Panofsky, Kushan Dasgupta et Nicole Iturriaga, « How White Nationalists Mobilize Genetics : From Genetic Ancestry and Human Biodiversity to Counterscience and Metapolitics », American Journal of Physical Anthropology, 175, n° 2, 2021, p. 387-98, https://doi.org/10.1002/ajpa.24150.
16
Par exemple, Alondra Nelson, « Bio Science : Genetic Genealogy Testing and the Pursuit of African Ancestry, » Social Studies of Science 38, n° 5, 2008, 759-783 ; Wendy D. Roth et Biorn Ivemark, « Genetic Options : The Impact of Genetic Ancestry Testing on Consumers’ Racial and Ethnic Identities, » American Journal of Sociology 124, n° 1, 2018, p. 150-184, https://doi.org/10.1086/697487 ; Panofsky et Donovan, « Genetic Ancestry Testing among White Nationalists ».
17
Gene Demby, « How Can A White Supremacist Be 14 Percent Sub-Saharan African ? » NPR, 13 novembre 2013, d’après Code Switch.
18
Emma Thelwell, « Whose Ancestry Is African, and Who Is in DNA Denial ? » Channel 4 News, 13 novembre 2013.
19
Kim TallBear, Native American DNA : Tribal Belonging and the False Promise of Genetic Science, Minneapolis, University of Minnesota Press, 2013, p. 73.
20
Duana Fullwiley, « The Biologistical Construction of Race : “Admixture” Technology and the New Genetic Medicine », Social Studies of Science 38, n° 5 (2008), 695-735 ; Lisa Gannett, « Biogeographical Ancestry and Race », Studies in History and Philosophy of Biological and Biomedical Sciences 47, 2014, p. 173-184.
21
Récemment, DDC a rebaptisé le test d’AncestrybyDNA, vendu désormais sous le nom HomeDNA Starter Ancestry Test. Le test est aussi disponible sur www.dnatruth.com, qui rappelle qu’il est promu par le Maury Show, une émission américaine dont la production exécutive est la même que celle du Trisha Show. Voir Margaret O’Brien, « What Happened To AncestrybyDNA ? » Data Mining DNA (blog), 30 décembre 2020.
22
Tony N. Frudakis et Mark D. Shriver, « Compositions and methods for inferring ancestry », US Patent and Trademark Office 20040229231, San Diego, déposé le19 août 2003 et publié le 18 novembre 2004, §. 0235.
23
Gannett, « Biogeographical Ancestry and Race, » p. 179.
24
Frudakis et Shriver, « Compositions and methods for inferring ancestry, » § 0276-0277.
25
Frudakis et Shriver, § 0280.
26
Frudakis et Shriver, § 0190.
27
Gannett, « Biogeographical Ancestry and Race, » p. 180.
28
Voir aussi TallBear, Native American DNA, 73.
29
Frudakis et Shriver, « Compositions and methods for inferring ancestry », § 0258 ; voir aussi J. Víctor Moreno-Mayar et al., « Terminal Pleistocene Alaskan Genome Reveals First Founding Population of Native Americans », Nature 553, 2018, p. 203 ; David Reich et al., « Reconstructing Native American Population History, » Nature 488, 2012, p. 370-375.
30
Frudakis et Shriver, « Compositions and methods for inferring ancestry », 0281.
31
Elaine Pinderhughes, « Black Genealogy Revisited : Restoring an African American Family, » in Re-Visioning Family Therapy, éd. M. McGoldrick (New York, Guilford, 1998), p. 114-134 ; Edward Ball, Slaves in the Family, New York, Farrar, Straus and Giroux, 1998 ; Sarah Abel, « Linked Descendants : Genetic-Genealogical Practices and the Refusal of Ignorance around Slavery, » Science, Technology & Human Values, 2021, https://doi.org/10.1177/01622439211021656.
32
FamilyTreeDNA est une entreprise basée à Houston qui est parmi les premières à avoir proposé des tests au public en 2000. Elle se concentre sur les produits qui complètent les recherches généalogiques classiques, en particulier les généalogies juives, un aspect analysé dans : Nadia Abu El-Haj, The Genealogical Science : The Search for Jewish Origins and the Politics of Epistemology, Chicago et Londres, University of Chicago Press, 2012, p. 151-173. Aujourd’hui l’entreprise se charge d’admixtures ADN et d’analyses uniparentales pour différentes entreprises mondiales, dont MyHeritage, une entreprise israélienne importante.
33
John Novembre et al., « Genes Mirror Geography within Europe », Nature 456 (2008), p. 98.
34
Ancestry.com, « Ancestry.Com Launches New AncestryDNA Service : The Next Generation of DNA Science Poised to Enrich Family History Research », Ancestry.com Press Releases, mai 2012.
35
Actuellement, seule une partie de cette base de données est exploitée par le test d’AncestryDNA ; l’analyse repose aussi sur le panel HGDP-CEPH disponible au public, qui comprend 1 050 individus de 52 populations du monde, ainsi que des échantillons fournis par des membres d’AncestryDNA dont les arbres généalogiques sont connus. Catherine A. Ball et al., « Ethnicity Estimate White Paper », AncestryDNA, 30 octobre 2013.
36
L’église de Jésus-Christ des Saints des derniers jours (plus connue sous le nom d’Église Mormon) s’intéresse aux recherches généalogiques du point de vue théologique et elle s’est engagés depuis longtemps dans plusieurs projets de collecte et de numérisation de données généalogiques du monde entier. Les membres de l’Église sont censés participer à ce « travail du temple » qui consiste à essayer de retrouver la trace de ses ancêtres afin de leur offrir une chance de salut ( voir, par exemple, Fenella Cannell, « The Christianity of Anthropology, » Journal of the Royal Anthropological Institute 11, 2005, p. 335-356. L’histoire du projet SMGF et de son acquisition par AncestryDNA est plus amplement examinée dans Abel, Permanent Markers, p. 89-93).
37
Pier Giorgio Solinas, Ancestry : Parentele elettroniche e lignaggi genetici, Florence, Editpress, 2015, p. 70-71.
38
Ball et al., « Ethnicity Estimate White Paper ».
39
Les PNS (polymorphismes de nucléotides simples) sont des paires de base d’ADN dont on a découvert qu’elles varient entre les individus et les populations. Elles sont donc considérées come porteuses d’information sur l’ascendance.
40
Pour une analyse plus approfondie de la méthodologie du test d’« ethnicité génétique » d’AncestryDNA, voir Abel, Permanent Markers, p. 93-98.
41
Plusieurs des premières entreprises de tests visaient à aider les Afro-Américains à identifier leurs ancêtres antérieurs à l’eclavage. Voir Alondra Nelson, The Social Life of DNA : Race, Reparations, and Reconciliation after the Genome, Boston, Beacon Press, 2016 ; Sarah Abel et Marcela Sandoval-Velasco, « Crossing Disciplinary Lines : Reconciling Social and Genomic Perspectives on the Histories and Legacies of the Transatlantic Trade in Enslaved Africans », New Genetics and Society 35, n° 2, 2016, p. 149-185.
42
AncestryDNA n’interprète plus ses résultats « ethniques », en termes de groupes continentaux. Au lieu de quoi les clients reçoivent une liste de différentes « ethnicités » classées du plus fort au plus faible pourcentage.
43
Peter Wade, Degrees of Mixture, Degrees of Freedom. Genomics, Multiculturalism, and Race in Latin America, Durham et Londres, Duke University Press, 2017, p. 17.
44
Wade, p. 27.
45
Abel, « À la recherche des identités transatlantiques » ; Abel, Permanent Markers, 95, p. 101-104.
46
Ball et al., « Ethnicity Estimate White Paper ».
47
Nelson, « Bio Science ».
48
Jean-Luc Bonniol, « Penser et gérer l’hérédité des caractères discriminants dans les sociétés esclavagistes et post-esclavagistes, » Rives Nord-Méditerranéennes 24, 2006, p. 23-34 ; Wade, Degrees of Mixture, Degrees of Freedom, 2-3 ; Shay-Akil McLean, « Isolation by Distance and the Problem of the Twenty-First Century, » Human Biology 91, n° 2, 2019, p. 1-13 ; Abel, Permanent Markers, p. 10-12.
49
Ricardo Ventura Santos et Marcos Chor Maio, « Anthropology, Race, and the Dilemmas of Identity in the Age of Genomics, » História, Ciências, Saúde – Manguinhos 12, n° 2, 2005, p. 1-22 ; Nelson, « Bio Science » ; Noah Tamarkin, « Genetic Diaspora : Producing Knowledge of Genes and Jews in Rural South Africa », Cultural Anthropology 29, n° 3, 2014, p. 552-574.
50
Voir, par exemple Alondra Nelson et Jeong Won Hwang, « Roots and Revelation: Genetic Ancestry Testing and the YouTube Generation » dans Lisa Nakamura et Peter A. Chow-White (dir.), Race After the Internet, New York, Abingdon, Routledge, 2012, p. 271-290.
51
Abel, Permanent Markers.
52
Myriam Cottias, La Question noire. Histoire d’une construction coloniale, Paris, Bayard, 2007.
53
Voir « Racial Integrity Laws (1924-1930) » sur le site d’Encyclopedia Virginia, déposé le 17 février 2009, modifié pour la dernière fois le 4 novembre 2015, mis en accès le 14 mai 2020.
54
Blay, « White Supremacist Would Be Black » ; Yaba Blay, (1)ne Drop : Shifting the Lens on Race, Philadelphia, BLACKprint Press, 2013.
55
Abu El-Haj, The Genealogical Science ; Roth et Ivemark, « Genetic Option » ; Abel, Permanent Markers, p. 114-146.
56
Dans leur étude datée de 2018, qui porte sur la prise en compte des données génétiques dans les identités raciales et ethniques chez les Américains de différentes origines raciales, Roth et Ivemark font part de cas d’Américains blancs qui tiennent compte d’une identité raciale différente après s’être vu attribuer un pourcentage d’ancestralité amérindienne ou africaine dans leur ADN. Les auteurs notent que plusieurs de ces personnes ont gardé le secret sur ce changement d’identité car elles n'étaient pas sûres que ces revendications identitaires seraient bien vues, notamment par les communautés auxquelles elles disaient appartenir. Voir aussi : Natasha Golbeck et Wendy D. Roth, « Aboriginal Claims : DNA Ancestry Testing and Changing Concepts of Indigeneity, » dans Susanne Berthier-Foglar, Sheila Collingwood-Whittick et Sandrine Tolazzi (dir.), Biomapping Indigenous Peoples : Towards an Understanding of the Issues, Amsterdam, Rodopi, 2012, p. 415-432.
57
De ce point de vue-là, mes recherches font écho aux découvertes de Ricardo Ventura Santos et al., « Color, Race, and Genomic Ancestry in Brazil ; Dialogues between Anthropology and Genetics, » Current Anthropology 50, n° 6, 2009, p. 787-819.
58
Sarah Abel, « Rethinking the “Prejudice of Mark” : Concepts of Race, Ancestry, and Genetics among Brazilian DNA Test-Takers, » ODEERE 5, n° 10, 2020, 186-221, https://doi.org/10.22481/odeere.v5i10.7181; Abel, Permanent Markers, p. 119-128.
59
Thomas E. Skidmore, Black into White : Race and Nationality in Brazilian Thought, édition poche, Durham et Londres, Duke University Press, 1993 ; France Winddance Twine, Racism in a Racial Democracy : The Maintenance of White Supremacy in Brazil, New Brunswick, Rutgers University Press, 1998.
60
« Craig Cobb on Trisha Show - FULL »,Stormfront, 16 octobre 2013.
61
Cobb, « Craig Cobb’s Ancestry.Com DNA Results » . « Octavon » est un terme ancien qui désigne une personne ayant un huitième de sang noir.
62
Panofsky et Donovan, « Genetic Ancestry Testing among White Nationalists. »
63
Panofsky et Donovan, 667. Des affirmations proches, sur le côté « idéologique » des études sur l’ancestralité génétique qui démontrent que la race n’a aucun fondement biologique, ont été notées par Ricardo Ventura Santos et Marcos Chor Maio dans leur analyse du site web suprémaciste blanc européen Legion Europa. Voir Santos ety Maio, « Anthropology, Race, and the Dilemmas of Identity in the Age of Genomics. »
64
https://www.gedmatch.com/, mis en accès le 23 janvier 2020.
65
Panofsky et Donovan, « Genetic Ancestry Testing among White Nationalists, » p. 670.
66
Voir also Stănescu, « “White Power Milk” : Milk, Dietary Racism, and the “Alt-Right”. »
67
Panofsky et Donovan, « Genetic Ancestry Testing among White Nationalists, » p. 672.
68
Abel, Permanent Markers, p. 104-105 ; p. 161-63.
69
Reardon et TallBear, « Your DNA Is Our History, » S234.
70
TallBear, Native American DNA, 59 ; Elizabeth Watt et Emma Kowal, « What’s at Stake? Determining Indigeneity in the Era of DIY DNA, » New Genetics and Society, 2019, p. 9-10.
71
Darryl Leroux, « “We’ve Been Here for 2,000 Years” : White Settlers, Native American DNA and the Phenomenon of Indigenization, » Social Studies of Science 48, n° 1, 2018, 87.
72
Arthur Kemp, Four Flags : The Indigenous People of Great Britain : DNA, History and the Right to Existence of the Native Inhabitants of the British Isles, Kindle, Ostara, 2012 ; Catherine J. Frieman et Daniela Hofmann, « Present Pasts in the Archaeology of Genetics, Identity, and Migration in Europe : A Critical Essay, » World Archaeology 51, n° 4, 2019, p. 528-45.
73
Catherine Nash, Genetic Geographies : The Trouble with Ancestry, Minneapolis et Londres, University of Minnesota Press, 2015, p. 174.
74
Michael Kent, « The Importance of Being Uros : Indigenous Identity Politics in the Genomic Age, » Social Studies of Science 43, n° 4, 2013, p. 534-56 ; Ann-Elise Lewallen, « “Clamoring Blood” : The Materiality of Belonging in Modern Ainu Identity», Critical Asian Studies 48, n° 1, 2016, p. 50-76 ; Paul Brodwin, «“Bioethics in Action” and Human Population Genetics Research », Culture, Medicine and Psychiatry 29, 2005, p. 145-178.
75
Michael Kent et Peter Wade, « Genetics against Race : Science, Politics and Affirmative Action in Brazil », Social Studies of Science 45, n° 6, 2015,p. 816-838, https://doi.org/10.1177/0306312715610217; Abel, Permanent Markers, p. 31-31 ; p. 52-53.
76
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77
Charles N. Rotimi, « Genetic Ancestry Tracing and the African Identity : A Double-Edged Sword ? », The American Journal of Human Genetics 86, 2003, p. 661-673.
78
Jenny Reardon, « The Democratic, Anti-Racist Genome ? Technoscience at the Limits of Liberalism », Science as Culture 21, n° 1, 2012, p. 36.
79
Panofsky et Donovan, « Genetic Ancestry Testing among White Nationalists, » p. 675-676.
80
Wade, Degrees of Mixture, Degrees of Freedom ; McLean, « Isolation by Distance and the Problem of the Twenty-First Century ».
81
Carol C. Mukhopadhyay et Yolanda T. Moses, « Reestablishing “Race” in Anthropological Discourse », American Anthropologist 99, n° 3, 1997, p. 526.
82
Nancy Leys Stepan, The Hour of Eugenics : Race, Gender, and Nation in Latin America, Ithaca et Londres, Cornell University Press, 1991 ; Mónica G. Moreno Figueroa, « Distributed Intensities : Whiteness, Mestizaje and the Logics of Mexican Racism, » Ethnicities 10, n° 3, 2010, p. 387-401, https://doi.org/10.1177/1468796810372305.
83
Panofsky et Donovan, « Genetic Ancestry Testing among White Nationalists, » p. 676.
84
Eduardo Bonilla-Silva, « Rethinking Racism: Toward a Structural Interpretation », American Sociological Review 62, n° 3, 1997, p. 465-80.
85
Ce travail a été réalisé dans le cadre du laboratoire d’excellence Tepsis, portant la référence ANR-11-LABX-0067 et a bénéficié d’une aide au titre du Programme Investissements d’Avenir.
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