Les autres voyages de la chamane. Destinations postcoloniales d’une indienne mexicaine
Ethnologue, Maîtresse de conférences

(Université Paul-Valéry Montpellier 3 - UMR SENS (Savoirs ENvironnement Sociétés))

© Magali Demanget

María Sabina, chamane1 mazatèque originaire de Huautla2 dans la Sierra Madre Oriental, au Mexique, a fait le tour du monde. Bien malgré elle sans doute. Certes, l’Indienne pauvre et analphabète, décédée dans le dénuement à plus de quatre-vingt ans en 1985, n’a guère quitté ses montagnes, excepté pour des séjours ponctuels à Oaxaca ou à Mexico. Mais son image, ses chants, les péripéties de sa vie ont franchi les frontières sous forme d’écrits, de films, de photos et de peintures. Ceux-ci ont traversé le temps, au point de tisser autour de l’image glorifiée de la chamane une trame complexe de significations et de représentations aux accents multiples, ésotériques, psychédéliques, mystiques, ethniques, politiques, sociaux, littéraires et artistiques.

María Sabina est devenue une image intensément partagée, soumise à l’érosion de sens qu’implique sa reproduction mécanique et sa mercantilisation. On la retrouve colportée aux côtés d’autres icônes représentatives d’une « sagesse éclectique » attribuée aux cultures mexicaines et latino-américaines, dont celle du Che en premier lieu3. Ces clichés de la chamane résultent d’un processus de duplication, d’épuration et de réduction à une empreinte photographique ou picturale stylisée, qui les rend alors disponibles pour des usages et des publics hétérogènes. Du faisceau de projections imaginaires que charrient ses copies standardisées se dégage une idée réduite à sa plus simple expression : celle de la résistance face à la conformité et à la rationalité du monde moderne qui participe simultanément de ce monde. Je propose dans cet article de traverser cette opposition flottante dont la chamane est profusément la pourvoyeuse, pour explorer les points de la cristallisation de ses mises en récit à portée anticoloniale4 et les registres de contestations, quand bien même « conformes » et « autorisés », qui étayent son capital symbolique de contestation.

Si María Sabina est appelée à représenter la persistance d’un monde originel, elle est bien entendu tout le contraire d’une figure intemporelle. On peut à ce titre interroger son passé, explorer les principales étapes de sa fabrication, parcourir les allers-retours entre les différents univers de référence et les enjeux qui se croisent autour de sa découverte toujours renouvelée. Pour ce faire, on reprendra certaines pistes d’analyse de l’« iconologie sociale » telle qu’elle a été redéfinie par Jean-Claude Chamboredon5, pour approcher ces formes photographiques, filmiques et littéraires devenues des symboles collectifs et nous arrêter sur les « conditions de leur fixation et de leur interprétation »6. Historiciser la figure de la chamane nous conduit dès lors à « feuilleter » rapidement les implantations successives de sens qu’elle concentre en les articulant aux principaux contextes socio-historiques qui les ont motivées, tout en identifiant les auteurs qui l’ont intégrée dans leur récit.

Comme héritière du savoir de rituels ancestraux et d’une parole « archaïque », María Sabina connaît un parcours bien particulier non seulement au Mexique, mais aussi dans ses échanges avec les États-Unis et au-delà. Ce parcours iconologique et littéraire, également touristique et politique, invite à redéfinir historiquement la notion de primitivisme et à la « reterritorialiser » en prêtant une attention soutenue aux dialogues engagés entre divers auteurs « occidentaux et extra‑occidentaux »7. Comment l’héroïsation du « primitif » a-t-elle été convertie en celle de l’exclue, de la victime mais aussi de la résistante, voire de la combattante ? Comment María Sabina est-elle amenée à figurer plusieurs ordres de temps, précolonial et postcolonial ? Quels procédés rhétoriques discursifs et iconographiques ont contribué à forger l’intensité de cette image devenue mémorable et persistante dans différentes sphères patrimoniales, politiques, touristiques ?

Une exploration romantique

Au centre d’une véritable « explosion discursive »8 survenue dès les années 1960, la « sage aux champignons sacrés »9 a tout d’abord été conduite à personnifier l’existence du mystère et à témoigner d’un ancien monde. L’histoire est bien connue10. L’« Indienne primitive », qui fait partie des « tribus les plus éloignées de notre culture »11, fut « découverte » par Gordon R. Wasson, banquier new yorkais passionné de mycologie, qui diffusa les grandes lignes de sa rencontre chamanique dans la revue Life en 1957. Il s’agissait alors, selon ses termes, de « scruter les secrets religieux les plus intimes de ce peuple reculé ! »12. Les photos du rituel, réalisées par un photographe de la New York Society13, Allan Richardson, ponctuent le récit. La transcription des oraisons en forme le point d’orgue et leur énonciation chantée se trouve matérialisée dans un disque publié à la même date14. La voix enregistrée, les paroles en mazatèque, leur traduction qui en perce l’énigme, la description de la cérémonie et les photos constituent alors autant de pièces du puzzle exposant la chamane en action. Sont ainsi établis les arguments fondateurs sur lesquels prendra appui la définition du rôle conféré à la guérisseuse mazatèque, devenue témoin et médiatrice exemplaire d’outre-monde, détentrice de secrets ancestraux15.

Alan Richardson, Huautla

Fig. 1 : Alan Richardson, Huautla, 1958

Richard Evans Schultes, Albert Hofmann, Les Plantes des Dieux, Paris, Les Éditions du Lézard, 1993, p. 153.

Rappelons que la quête de G. R. Wasson n’était pas isolée. Elle intervenait à une époque où le chamanisme était appelé à devenir un phénomène globalisé, tout en formant un point de crispation se voulant antimoderne et un lieu de repli pour des Occidentaux en quête des interstices de la mondialisation16. Il est vrai que ce mythe d’un secret archaïque enfoui dans les replis de l’Histoire et auréolé d’un sulfureux mystère n’est pas radicalement nouveau17. Le double paradigme de la dissimulation et de la découverte qui en constitue la structure s’inscrit dans l’une des orientations de la modernité littéraire débutée au XVIIIe siècle, alors que la volonté de savoir stimule une certaine économie du secret et de la révélation. La configuration de la production de ce paradigme et de sa réception, à savoir les manières de le dire ou de l’indiquer, est en tout cas historiquement conditionnée18. C’est ainsi que la narration par Gordon R. Wasson des étapes de sa découverte de María Sabina conforte l’idée de la révélation au grand jour d’une incommensurable énigme que le banquier explorateur, tel un archéologue aux prises avec l’excavation d’un antique trésor, dévoile par touches successives19.

Reconnaissons dans cette rhétorique du secret, du trésor de l’archaïsme et de la découverte, le prolongement de la fascination à l’égard du chamanisme comme inversion romantique du rationalisme des Lumières20. Cette même rhétorique fonde d’ailleurs la valeur itérative de l’entreprise de Wasson dont la quête du secret des Autres croise la découverte de l’Autre en soi grâce à l’expérience chamanique. Or la spécificité du contexte social et politique des années 1960 et 1970 a indubitablement pesé sur cette économie de la révélation par l’expérience et le témoignage. Prise dans un nouvel engrenage de diffusion, la découverte de Wasson va en tout cas rencontrer un retentissement bien particulier au Mexique. Car, comme nous allons le voir, elle se trouve indirectement intégrée, non sans une certaine anticipation, dans la crise du gouvernement mexicain des années 1970 et dans la transformation de la littérature indigéniste et anthropologique.

Aux marges de l’anthropologie

Très vite, l’article de Wasson, également publié dans la version espagnole de Life, sera supplanté par d’autres maillons scripturaires. Le sillage discursif ouvert par le mycologue se trouve en effet investi au Mexique par de nouvelles formes d’écriture, au croisement du journalisme, de la littérature et de l’anthropologie. Des auteurs aux écrits inclassables dans les genres littéraires de l’époque tels que Gutierre Tibón ou Fernando Benítez, vont notamment s’emparer de la découverte du banquier new yorkais et participer à sa diffusion au grand public21. En plus des nombreux articles consacrés à la chamane et ses champignons sacrés, Fernando Benítez publie Los Hongos Alucinantes dès 1964. Il y reprend, tout en l’enrichissant, la rhétorique primitiviste de Gordon R. Wasson en accordant une place centrale à María Sabina, qu’il rattache à d’autres chamanes, sortes de « saints et héros quasi-éteints » issus d’un « monde sauvage »22.

On remarque que les écrits sur la chamane et les champignons sacrés se développent aux marges de l’anthropologie académique mexicaine. G. R. Wasson, banquier de profession et mycologue autodidacte, sut s’allier il est vrai la contribution de divers scientifiques de renom23. Mais pour les chercheurs universitaires, la découverte de la chamane resta en quelque sorte hors champ puisqu’ils la passent sous silence. Il est vrai que dans l’article de Life, l’anthropologue français Guy Stresser-Péan était bien présent. Il n’apparaît toutefois qu’en arrière-plan sur l’une des photos de la cérémonie, à l’image de sa contribution écrite sur cette expérience cérémonielle24. De même, à l’exception d’un chapitre que Claude Lévi-Strauss25 consacre à l’entreprise épistémique (la « mycologie ») de G. R. Wasson, ce dernier, référence récurrente des écrits littéraires et journalistiques sur Huautla, est alors peu, voire pas cité dans les ouvrages d’ethnologie.

À l’époque d’ailleurs, l’événement de ce « tourisme douteux », selon les mots de l’anthropologue indigéniste Carlos Inchaustegui26, fut dans une large mesure dédaigné par la recherche académique mexicaine27. Quant aux écrits hybrides développés sur Huautla, mêlant chroniques, récit expérientiel, histoire, archéologie et anthropologie, le recadrage scientifique s’est imposé dès les années 1970. Littérature ou anthropologie ? interroge Andrés Médina28. Définitivement, selon lui, l’œuvre de Fernando Benítez reste inclassable et chaotique, en dépit de sa « prétention de faire des interprétations ethnologiques »29, tant pour son orientation idéologique que pour ses carences méthodologiques. L’anthropologue, alors à la prestigieuse École nationale d’anthropologie et d’histoire (ENAH), souligne notamment la vision romantique de l’écrivain journaliste, qui enferme les Indiens dans la condition statique du néolithique et dans une immobile perfection30. Cette dénonciation du primitivisme de l’auteur, de son idéologie nationaliste articulée à une rhétorique indigéniste, est cependant tempérée, faiblement il est vrai, lorsqu’il est fait référence à son entreprise journalistique. Il agit alors « comme un journaliste libéral, avec la saine et simple intention de dénoncer une problématique sociale où domine la corruption et l’exploitation »31.

Retenons ici plusieurs points de fuite de l’œuvre de Fernando Benítez, tels qu’ils apparaissent dans ses écrits sur les Mazatèques et sur María Sabina en particulier. Tout d’abord, celui de l’apologie manichéenne du primitivisme qui s’emboîte avec celle de R. G. Wasson et se trouve projetée sur la figure de María Sabina. Ensuite, non sans lien avec la précédente, Benítez poursuit l’exploration de l’expérience hallucinogène cérémonielle conçue comme un mode d’accès privilégié au savoir de l’Autre, ce qui ne manque pas de le discréditer aux yeux de l’anthropologie académique de l’époque. Enfin, on note une attention portée à la situation sociale héritée de la tradition littéraire indigéniste, intégrée sous une forme plus ou moins allusive au portrait du personnage, dont il retrace une vie de spiritualité néanmoins semée d’épreuves. Sur la toile de fond de la misère, se détache la sagesse ancestrale – précoloniale – de la chamane, mais aussi son statut, vertueux, de victime, « femme sans tache, immaculée », « d’une rare morale et d’une spiritualité élevée »32.

Contestation politique et innovations littéraires : l’auteur-témoin

L’aura du primitivisme que G. R. Wasson a contribué à dessiner autour de la chamane conforte son authenticité de témoin d’outre-monde. Relayée par Fernando Benítez, cette idéalisation a trouvé un écho tout particulier au Mexique dans ces années 1970, alors que la planification post-Révolution du progrès engagée avec les politiques d’intégration adressées aux minorités autochtones traversait une crise de légitimité. Le projet d’homogénéisation de la nation, qui était censé se réaliser grâce à un « métissage » des Indiens par blanchiment racial puis culturel via leur hispanisation, était alors la cible de vives critiques33. Par la suite, les anciennes visions épiques du nationalisme révolutionnaire allaient laisser place à la diffusion d’autres narrations intimes, centrées sur des figures artistiques (Frida Kahlo) et de nouveaux genres de récits littéraires (Elena Poniatowska ou Carols Monsiváis), remarque Claudio Lomnitz34. Avec eux, s’affirme une forme narrative inédite qui prend la tournure de la chronique et du témoignage pour « récupérer les voix silencieuses de dépossédés » du colonialisme interne35.

Les conditions historiques de la fabrication de María Sabina comme figure exemplaire ont fortement contribué à la fixation de son capital symbolique oppositionnel. Dans le contexte bouillonnant des années 1970, avec l’affirmation de contre-cultures globalisées, María Sabina a d’abord conduit à représenter une opposition irréductible à l’encontre des dispositions conformistes nord-Américaines, sur la toile de fond du conflit lié à la Guerre du Vietnam36. Au Mexique, le climat de contestation était aussi à son apogée : c’est en effet au même moment que la politique intégrative des minorités indiennes fut désapprouvée, en premier lieu par des mouvements sociaux dont les revendications s’appuyaient de plus en plus sur des arguments ethniques37, puis par la nouvelle génération d’anthropologues très critiques à l’égard d’une anthropologie appliquée dont l’assimilation culturelle était l’une des finalités38. Les politiques paternalistes visant à incorporer les Indiens à la nation furent alors considérées comme participant d’une « désindianisation »39. En contrepoint du projet assimilationniste et d’une anthropologie qui en servirait le programme, la découverte de Wasson a ainsi trouvé un écho positif du côté d’opposants indianistes et d’écrivains inspirés par l’anthropologie non académique, sensibles aux idées véhiculées par les mouvances néo-indiennes et New Age. Un écho qui n’a eu de cesse de s’amplifier.

Les liens tissés au Mexique entre les étudiants contestataires de plusieurs universités mexicaines et divers intellectuels mexicains, artistes, écrivains, journalistes de la presse culturelle jouèrent un rôle déterminant dans la représentation et la légitimation du mouvement étudiant40. Le massacre par l’armée de la manifestation sur la Place des Trois Cultures Tlatelolco, le 2 octobre 1968, en a constitué la tragique apogée. Vingt jours seulement après l’événement paraît un supplément de la revue culturelle Siempre!, intitulé « La culture au Mexique »41, qui fera date dans la dénonciation de la sanglante répression. Fernando Benítez, qui avait déjà publié son livre sur la découverte de María Sabina, y écrivit un article percutant : « Les jours de l’ignominie »42, condamnation sans appel de la répression commanditée par l’État et réquisitoire visant en même temps la culture mexicaine conservatrice et une société corrompue, socialement clivée. Cette époque de mouvements sociaux fut aussi celle d’une effervescence au sein de laquelle a émergé le vaste et éclectique phénomène artistique et culturel désigné comme la onda (« l’onde »). Dans ce climat de contestation sociale et d’innovations littéraires, musicales ou encore filmiques, María Sabina et ses champignons sacrés ont constitué une source d’inspiration pour un projet de résistance sociale, sur fond de conceptions néo-indiennes holistiques émergentes, d’expérimentations psychédéliques et du drame de Tlatelolco érigé en symbole de révolte43.

Cette période relève en tout cas de ces moments de crise où l’on assiste à la « cristallisation du débat esthétique et politique autour d’une question »44 et où l’engagement des artistes dans la lutte sociale s’accompagne de la prolifération de plusieurs registres de création. On comprend alors la critique d’Andrés Medina, qui dénonce l’impossibilité de situer Fernando Benítez. Ni littéraires ni anthropologiques, ses écrits auraient selon lui pour caractéristique de « constituer une sorte de littérature pamphlétaire qui simule l’essai scientifique, l’œuvre littéraire ou la plainte politique »45. Or cette position intermédiaire d’un auteur inclassable est à certains égards tout autant celle d’autres écrivains émergents de l’époque. Elle illustre l’analyse de Jean-Claude Chamboredon relative à la « conceptualisation des systèmes culturels comme configurations de places et d’emplois », qui « conduit à reconstruire la situation individuelle comme un ensemble de positions ». Le sociologue propose à ce sujet d’employer le concept de « cristallisation de statut » pour modéliser « la représentation de la position sociale comme structure de positions sur différentes dimensions »46.

Fernando Benítez s’inscrit bien dans ce processus qui conduit au mélange des genres, comme en témoignent ses multiples qualifications de journaliste, d’anthropologue, d’écrivain, d’éditeur, d’historien et de professeur47. L’occupation d’un éventail de positions n’est en outre pas propre à cet auteur. Car à cette même époque se développent des écrits qui adoptent le mode de la chronique et d’un langage de la mémoire, genre littéraire aussi appelé à tenir lieu d’historiographie et à combler le silence de l’histoire officielle qui suivit le massacre de Tlatelolco48.

On note alors une hybridation des textes, « entre le roman, le témoignage et l’enquête journalistique », qui sert l’entreprise critique des auteurs, comme c’est le cas pour l’emblématique ouvrage d’Elena Poniatowska, La Nuit de Tlatelolco. Témoignages d’histoire orale publié un an après la tragédie des étudiants. L’autrice, analyse Ana Lourdes Álvarez Romero49, travaille avec des techniques narratives grâce auxquelles le texte se construit par la « polyphonie » entendue au sens de Mikhaïl Bakhtine, concept repris plus tard par l’anthropologie qualifiée de « postmoderne »50 dans sa critique de la totalisation culturelle ou historique. Au-delà de la pluralité de voix autonomes, les « “héros” ne sont pas seulement objet de discours, mais ils deviennent les sujets dudit discours »51.

La construction discursive de María Sabina porte l’empreinte de cette période charnière, où se croise l’invention littéraire post-1968, l’écriture pour la mémoire, la contestation de l’anthropologie académique totalisante et la dénonciation politique des fractures sociales des populations marginalisées du Mexique, dont les Indiens. C’est à ce titre que la chamane est notamment impliquée, sans doute à son insu, dans la polémique des années 1970 qui remet en cause l’anthropologie en revendiquant le droit à la différence culturelle des populations indiennes. Ainsi, en 1969, la revue culturelle fondée par Benítez, Siempre !, consacre une interview à la « femme chamane la plus renommée au monde, victime de l’anthropologie et de l’irresponsabilité »52. Ladite « femme-chamane » se trouve dès lors parée des vertus de « la culture de la résistance » du Mexique profond que Guillermo Bonfil53, l’un des anthropologues engagés dans la contestation de 1970, a opposé, à l’orée des années 1990, au Mexique imaginaire des élites nationales engagées dans leur projet civilisateur. La médiatrice des « hymnes antiques » précoloniaux est alors inventée comme la concrétisation de ce Mexique invisible (pour le pouvoir officiel), peuplé par « ceux qui résistent enracinés dans des formes de vie de souche mésoaméricaine »54 en dépit du joug de la domination des classes dirigeantes.

Les temps de la parole

G. R. Wasson, avons-nous vu, a ouvert la voie au décryptage du langage de la chamane en diffusant l’enregistrement, la transcription et la traduction de ses chants. Cet intérêt se trouve relayé par plusieurs incitations, tant du côté de la nouvelle anthropologie mexicaine qui exhorte à reconsidérer le point de vue indien, que de celui de nouvelles créations littéraires hybrides qui convoquent un « je-témoin » politiquement engagé55. La considération de María Sabina comme source d’un autre savoir participe en outre d’une transformation plus générale, dans laquelle le paradigme intégrationniste se trouvera peu à peu remplacé par le paradigme multiculturel.

À contrecourant de la littérature indigéniste classique, la chamane est alors approchée dans son irréductible altérité, transmise par-delà des siècles d’« occidentalisation », voire de domination coloniale. Fernando Benítez, aux côtés des multiples auteurs qui publient leur expérience, s’y emploie en valorisant l’autre mode d’accès à ce savoir, en l’occurrence celui cérémoniel et expérientielle de la découverte par les hallucinogènes56. María Sabina, médiatrice par l’extase, est considérée comme l’ardent trait d’union d’un passé archéologique magnifié parce qu’il détient un langage souterrain, secret, mais qui résonne dans le présent comme le fidèle écho d’outre-tombe du monde préhispanique car il conduit à en faire vibrer et parler les vestiges57. Les champignons sacrés permettent ainsi de vivre dans son propre corps ce passé retrouvé. La chamane en constitue l’incarnation, actualisant une très longue mémoire étirée depuis l’origine : « Son visage expressif s’illumine en reflétant la mystérieuse lumière de cette première ivresse si loin dans le temps et toujours si vivante dans la mémoire »58.

En étant appelée à présentifier le passé (grâce aux hallucinogènes et à ses paroles rituelles indéfiniment répétées dans les écrits expérientiels), elle instaure un autre mode de relation avec ce passé alors que, comme le montre Myriam Hernandez Reyna59, s’esquisse par ailleurs un nouveau régime national d’historicité fondée sur la « mémorialisation de l’histoire ». Car l’explosion discursive centrée sur les expériences extatiques et les chants chamaniques de María Sabina intervient dans cette époque des années 1960 où la mémoire émerge à partir de processus postcoloniaux dans lesquels « il y a un intérêt à retrouver des visions ‘‘subalternes’’ du monde, des souvenirs rendus invisibles par les systèmes de production de connaissances coloniales »60.

Aux côtés des mises en récit de l’expérience extatique cérémonielle, c’est donc la chamane comme source de parole et de savoir issus du passé précolonial qui concentre les attentions. Sa parole n’est cependant pas seulement présentée comme une voix surgie du passé. Dans la perspective d’hybridation des registres déjà évoquée, les innovations qui entrent en collision avec certains canons de la littérature indigéniste sont en même temps combinés avec ses apports. On retrouve les grandes lignes de cette forme littéraire, telle qu’elle s’est notamment affirmée dans le dénommé « cycle de Chiapas »61, où les auteurs s’appuient sur des personnages précis pour recréer la réalité indienne, rendre compte des coutumes et de la vie quotidienne, tout en apportant un point de vue critique sur les inégalités sociales. Le passage que Fernando Benítez consacre à la « Vie d’une femme mazatèque »62 aborde en effet la chamane sous l’angle d’un réalisme social qui fait écho à la littérature indigéniste critique centrée sur des Indiens aux marges du développement.

De ce point de vue, la chamane n’est pas uniquement située dans l’antiquité précoloniale. Aux côtés de sa préfiguration comme hors du temps (dans le cadre cérémoniel), elle est aussi présentée dans la co-temporalité de l’auteur-témoin, qui souligne le contraste de sa situation d’indienne indigente. Ce partage du temps de l’auteur est renforcé par l’écriture dialogique où la chamane est introduite dans le texte comme interlocutrice. Dans ce procédé narratif, l’auteur se positionne comme sujet dans une situation sinon d’égalité, au moins de co-subjectivité, engagée avec les autres sujets dont il mentionne le point de vue aux côtés du sien. Cette situation d’horizontalité est cependant relative avec Benítez. Il centre en effet une large part de sa narration sur sa propre expérience, tout comme il souligne avec regret les restrictions imposées à leurs échanges par le non-partage de la langue : « Malheureusement, le fait que María Sabina parle seulement le mazatèque m’a empêché de la connaître dans toute sa richesse et sa profondeur spirituelle »63.

Du point de vue de l’indigène : la vie de la femme esprit

Amorcée avec Benítez à la suite de Wasson, la découverte de l’intimité de María Sabina trouve sa concrétisation la plus aboutie dans la transcription de son récit de vie traduit du mazatèque par Álvaro Estrada, également natif de la ville de Huautla. Initialement parue en 1977 au Mexique sous le titre La Vie de María Sabina, la sage des champignons64, l’ouvrage connaîtra ensuite un succès mondial et durable, en comptabilisant près de quatorze rééditions65. Après Wasson puis Benítez, Estrada entend agir tel un passeur qui nous permet d’accéder au point de vue de la chamane en décentrant la focalisation sur sa fonction cérémonielle. Le récit de María Sabina nous fait alors traverser le miroir de sa célébrité pour nous livrer les ressorts de son histoire personnelle. On y découvre sa vie d’indigente, ses mariages malheureux, ses deuils, son quotidien, son office de guérisseuse, son regard sur les étrangers. Sans doute, la contribution d’Álvaro Estrada anticipe-t-elle l’entrée sur scène d’une nouvelle figure, celle de l’« ethnographe indigène », que James Clifford signalera en se référant au mouvement de la négritude66. Il est vrai que sa légitimité d’auteur-passeur résida dans son appartenance à la communauté d’origine du sujet ethnographié, et plus précisément à sa communauté de langage, nous y revenons ci-dessous. Mais cette parution fut aussi le résultat d’un pacte d’écriture et d’édition favorisé par la situation d’hybridation des genres stimulée par l’horizon contestataire déjà évoqué.

Álvaro Estrada, journaliste à Mexico, tire sa légitimité éditoriale de ses contacts et de la circulation de son projet entre plusieurs mentors. Des collègues de la revue culturelle Siempre!, où il travaillait ponctuellement, lui auraient tout d’abord suggéré de recueillir la parole de la chamane en vue d’une publication. Álvaro Estrada émet spontanément des réserves, car cette entreprise lui semble éminemment difficile pour avoir été précédée des travaux de Benítez et de Wasson. Mais il s’y « autorise » finalement en admettant que María Sabina « n’avait pas été complétement comprise par ceux qui l’avaient révélée au monde »67. Cette précision, notons-le, montre à quel point son entreprise apparaît comme une réponse aux points de suspension que Benítez sème dans son approche, dont il reconnait la partialité du fait de sa non compréhension de la langue native.

Le texte, issu d’entretiens menés, enregistrés et traduits en espagnol par Estrada, fut ensuite soumis à Gordon Wasson en 1975, qui le transmit à Octavio Paz, qui à son tour proposa les retouches nécessaires. Journalisme, anthropologie, mycologie, poésie : une nouvelles fois, l’hybridation des genres est à l’œuvre, alors que ceux qui jouent le rôle de passeurs entre María Sabina et le monde travaillent de concert. Le pacte de création établi avec la chamane scelle le devenir de son image, en poursuivant le travail d’exploration entamé par le mycologue et poursuivi par le journaliste mexicain68. Elle devient la source exemplaire du langage de l’Autre employée par la suite dans diverses explorations poétiques.

Le résultat tranche avec les autres publications qui portent sur la chamane. Car dans ce cas, l’autorité du je-témoin de l’auteur-passeur découle non de son érudition scientifique ou littéraire (comme c’est le cas de ses mentors) mais du partage d’un « horizon d’altérité »69. Le procédé narratif, qui a bénéficié des retouches éditoriales d’Octavio Paz, est en outre bien différent de celui employé par Benítez. À ce sujet, Ana Lourdes Álvarez Romero70 met en perspective le contraste textuel en analysant les deux figures autoriales : Fernando Benítez, très présent dans la narration, se montre peu familier avec la culture de María Sabina et développe des interprétations ethnocentriques ; Álvaro Estrada en revanche, reste en grande partie caché dans la narration qui devient celle de María Sabina. Dans le texte, les questions d’Estrada ont été effacées pour laisser place à l’expression et au récit continu de María Sabina. Il se positionne en même temps dans les paratextes en note de bas de page comme créateur-médiateur et spécialiste de la culture, dont il commente certains concepts vernaculaires. En s’éclipsant, l’auteur-témoin propose ainsi un récit direct. María Sabina prend la place du je-témoin, telle une co-autrice associée dans une demi-position d’égalité à l’auteur qui, tout au long de l’ouvrage, garde un rôle de commentateur discret et à la fois essentiel.

Cette volonté apparente d’effacement au profit du sujet sera parachevée en 1979 avec le film María Sabina, Mujer Espíritu (María Sabina Femme Esprit) réalisé par le cinéaste Nicolás Echevarría. Le « portrait-biographie » de la curandera (« guérisseuse »), dans la lignée de ce qui fut successivement désigné comme « cinéma-vérité », « cinéma-direct » ou « cinéma-ethnographique »71, la montre à l’œuvre dans l’ordinaire de ses activités et de son office de guérisseuse. En trame de fond, une voix off masculine relate sa vie à la première personne, telle que publiée dans l’ouvrage d’Álvaro Estrada72. Comme dans la biographie, le réalisateur dissimule sa présence, afin de laisser le devant de la scène à son héroïne tout en orientant la perspective de sa célébration. Finalement, par-delà son objectivisme, ce film « poursuit l’invention (au sens d’inventio découverte) de l’individu, en ce qu’il porte les traces du social et se configure par rapport à lui »73.

Avec cette œuvre, Nicolás Echevarría a rassemblé dans un seul mouvement les pièces éparses du puzzle initialement exposé par Wasson, celles de la voix, de l’image et du texte. Il va cependant au-delà, car il réunit ces pièces en les articulant à l’intimité de la vie ordinaire de María Sabina et à son contexte socioculturel. Sa contribution, avec celle d’Álvaro Estrada, réinscrit la chamane dans le temps présent et dans le dénuement de son quotidien. Elle peut à ce titre être considérée comme une entreprise de contre-exotisation produite à rebours des réinterprétations ésotériques et néo-indiennes de la chamane. La figure de María Sabina apparaît partagée entre ces deux perspectives, celle du réalisme social reconduisant à la co-temporalité postcoloniale et celle de sa spiritualisation en lien avec l’atemporalité précoloniale. On les retrouve exprimées dans ses figurations successives telles qu’elles se sont développées en relation plus ou moins directe avec ces écrits.

Dialogue d’images et contre-exotisation

À la suite des photographies initiales d’Allan Richardson centrées sur une María Sabina officiante de cérémonie, d’autres représentations prennent le relais, en premier lieu photographiques, mais aussi filmiques ou encore picturales. Comme dans le cas de l’écrit, les photographies de la découverte de Wasson inspirèrent plusieurs auteurs, dans le cadre de la réceptivité historique aux images et de leurs hybridations explorées par Serge Gruzinski74, qu’elles soient baroques, muralistes ou post-modernes. Car si le foisonnement de leurs circulations croise de nouvelles formes de consommation, selon l’auteur les imaginaires coloniaux et ceux d’aujourd’hui pratiquent tous deux « la décontextualisation et le réemploi, la déstructuration comme la restructuration des langages »75.

Parmi les photographes mexicains qui ont relayé cette diffusion, Nacho Lopez76, employé par l’Institut National Indigéniste (INI) entre 1950 et 1981, a entre autres collaboré avec Fernando Benítez et il était ami de Guillermo Bonfil77. Comme nous le verrons, en tant que photographe indigéniste, Nacho Lopez a résolument tourné le dos au pittoresque78. Engagé dans une démarche ethnographique au service des politiques de développement, il n’était sur le principe pas question d’embellir ou de maquiller la réalité et de faire oublier le « drame authentique » des Indiens qu’il convenait de représenter dans la crudité de sa réalité sociale. On note par ailleurs avec intérêt que Nacho Lopez a participé en 1972 au film d’un auteur de science-fiction colombien, René Rebetez, La Magía, inspiré du Popol Vuh maya et censé « révéler les forces occultes des forces de l’univers »79. Il y intervient notamment dans la série ciné-photographique consacrée à María Sabina, où il offre d’autres facettes de l’officiante qui s’ajoutent à celles d’Allan Richardson. En se centrant sur la cérémonie, il suit les pas de la première diffusion médiatique de Wasson centrée sur la fonction rituelle de María Sabina, relayée par Benítez qui en fournit la réinterprétation néo-indienne.

Il y aurait beaucoup à dire sur la transformation opérée depuis les premières photos de Richardson focalisées sur la chamane en action rituelle. Leur duplication témoigne de la réitération de l’expérience cérémonielle et d’une volonté des multiples photographes de mémorialiser l’intimité solennelle des instants sacrés de la Rencontre originelle, celle qui eut lieu à l’occasion de la découverte mythifiée de Wasson. On remarque que ces représentations semblent souvent chercher à capter, certes avec des variantes, l’idée que María Sabina était une « prêtresse » ou une « sainte », selon les termes repris à Octavio Paz ou à Fernando Benítez. Les photos du rituel d’Allan Richardson, par un jeu de clair-obscur qui accentuent les ombres des visages et des corps, furent sans doute déterminantes, pour avoir saisi sur le vif un instant sacré fondateur. Comme le note Walter Benjamin, « les contraires se touchent : la plus exacte technique peut donner à ses produits une valeur magique, beaucoup plus que celle dont pourrait jouir à nos yeux une image peinte » ; une telle valeur surgit de la captation d’une « étincelle de hasard », d’un « ici et maintenant », « dans l’apparence de cette minute longtemps écoulée où niche encore l’avenir »80. Les photos du rituel, dont certaines sont devenues iconiques, mettent en œuvre le double paradigme de la dissimulation et de la découverte énoncé plus haut : le clair-obscur révèle autant qu’il dérobe, jouant des ombres et de la pénombre, des reflets du visage et des mains en mouvement. En ce sens, le photographe a capté cet « inconscient optique »81, l’éclair de l’instant qui aurait échappé à l’œil sans la ressource photographique.

Cette première fonction rituelle va être centrale dans la fabrication de l’icône María Sabina. Dans les portraits postérieurs à ceux de Richardson, María Sabina semble reprendre la pose, comme si son corps avait été marqué par l’inconscient optique des premières épreuves. Les mains levées, paumes ouvertes, elle reproduit la posture d’invocation. Cette même position est reprise sur des fresques murales, ou sur la statue érigée à l’entrée de sa ville natale, Huautla de Jimenez.

Maria Sabina

Fig. 2 : María Sabina. Photo transmise par Albert Hoffmann à John W. Allen dans les années 1980 (diffusée avec son autorisation).

Fresque du Musée Maria Sabina, Huautla de Jimenez (Mexique)

Fig. 3 : Fresque du Musée María Sabina, Huautla de Jimenez (Mexique).

Dans d’autres clichés, on retrouve l’une des postures de l’action cérémonielle figée par Allan Richardson, dans laquelle les mains de la chamane sont placées à plat sur sa poitrine. Là encore, ses épreuves ont inspiré plusieurs peintres, qui représentent la chamane dans la position de la Vierge de Guadalupe, combinant l’imaginaire baroque des images saintes aux réinterprétations néo-indianistes et nationalistes.

Allan Richardson, Huautla, 1958
Maria Sabina Virgen de Guadalupe

Fig. 4 (à gauche) : Allan Richardson, Huautla, 1958

Richard Evans Schultes, Albert Hofmann, Les Plantes des Dieux, Paris, Les Éditions du Lézard, 1993, p. 151. Voir également supra note 13.

 

Fig. 5 (à droite) : María Sabina en Vierge de Guadalupe : photo de J. R. Ruiz (2006), avec l’autorisation de José Tlatelpas.

Fresque du mur de la présidence Huautla de Jimenez

Fig. 6 : Fresque du mur de la présidence Huautla de Jimenez

Ces exemples montrent à quel point la photographie fut un élément structurant du processus de sacralisation dans lequel María Sabina a autant inspiré le regard du photographe qu’elle s’est trouvée modelée par lui. Ils illustrent les discours qui courent sur la chamane, comme incarnation du savoir d’un monde invisible, et ses multiples détours ésotériques, psychédéliques et religieux. Parmi les photos qui circulent, sur Internet notamment82, rares sont celles qui sont accompagnées du nom de leur auteur. On observe ainsi une sorte d’anonymisation des photographes, au profit de la surdétermination du sujet. Comme pour l’icône de Che Guevara, l’image semble se développer en parallèle de la personne qui l’a inspirée, elle acquiert une vie propre : « L’image existe comme un symbole qui dépasse la dimension biographique, qui n’a rien à voir avec l’homme »83. En partie libérée de ses auteurs et de la vie réelle de son sujet, elle poursuit son parcours au fil des réinterprétations picturales, modelée au gré des inspirations, projetée sur de multiples supports, devenant alors une production collective et impersonnelle. Ce détachement se prolonge dans sa représentation baroque comme Vierge de Guadalupe, « incarnation visuelle du royaume de la Nouvelle Espagne » et symbole Criollo rebaptisé Vierge brune ou Vierge des Indiens84. La chamane se fond alors dans le mythe de l’image sainte en le renversant : l’indianisation de la Vierge fait place à la sanctification de l’Indienne.

Nacho Lopez semble avoir simultanément pris le contrepied d’une telle perspective en ajoutant des éléments contradictoires à l’icône d’une María Sabina sanctifiée. Le fond de l’œuvre indigéniste du photographe a d’ailleurs été récemment intégré dans un processus d’archivage et de patrimonialisation de l’Institut National d’Anthropologie et d’Histoire (INAH), qui prolonge en quelque sorte sa volonté d’une contextualisation sociale et historique. Sa série María Sabina compose une narration photographique en noir et blanc, centrée sur la vie paysanne de l’Indienne abordée dans l’âpreté de son dénuement. On la voit sur une colline, habillée d’un huipil85 déchiré, le regard baissé vers le sol, ou aux côtés de visiteurs étrangers, frêle, comme écrasée par leur stature (Figure 7). On peut noter l’intérêt marqué du photographe pour les mains de la guérisseuse : elles ne prennent plus la pose, mais font étrangement écho à celles des images de la chamane sacralisée, tout en inversant leur propos (Figure 8). Les mains sont plaquées sur le corps non pour adopter la posture hiératique d’une sainte, mais pour se protéger. D’autre clichés sont justement focalisés sur le détail de ses mains, noueuses, croisées mais dirigées vers le bas, avec en second plan un enfant portant des fagots (Figure 9). Ces mains, dégagées de leur fonction rituelle, reconduisent à la vie de labeur et de misère de l’indienne pauvre.

Nacho Lopez, « María Sabina en un cerro. Retrato », 1970
Nacho Lopez, « María Sabina, retrato », 1980

Fig. 7 (à gauche) : Nacho Lopez, « María Sabina en un cerro. Retrato », 1970

Fig. 8 (à droite) : Nacho Lopez, « María Sabina, retrato », 1980

Nacho Lopez, « María Sabina, detalle de sus manos », 1980

Fig. 9 : Nacho Lopez, « María Sabina, detalle de sus manos », 1980

La « découverte » de Wasson a été intégrée dans un dense processus d’hybridation des registres narratifs et des contenus. Loin d’une diffusion monologique, les idéaux du primitivisme (et du « chamanisme ») ont donné lieu à un conséquent travail de réinterprétations, de détournements et d’échanges entre de multiples interlocuteurs positionnés au Mexique, aux États-Unis et au-delà. Les conditions historiques de sa réception ont été déterminantes dans la construction de María Sabina comme emblème et dans la fixation de ses significations à caractère subalterne. Cet exemple conduit à interroger sous un autre angle l’attirance pour la beauté du primitif des « modern spiritual seekers », souvent abordée depuis la perspective d’un imaginaire occidental surplombant. Il montre que ce dernier se trouve aussi traversé par d’autres imaginaires, travaillés à la fois par le passé colonial et postcolonial et par les antagonismes qui traversent leurs constructions contemporaines.

Les années 1970 ont de fait constitué au Mexique une période agitée par de violents conflits politiques et par des débats artistiques, donnant lieu à des réappropriations et des créations du passé et de la mémoire. Au prisme du souvenir encore à vif d’une époque récente marquée par une violence d’État passée sous silence, s’est ajoutée la commémoration orientée par une lecture subalterne et néo-indienne du mythe national de l’histoire (pré)coloniale. Le personnage de María Sabina catalyse la superposition de ces motifs mémoriels. D’un côté, son savoir chamanique, couplé à celui des hallucinogènes, a été mobilisé comme l’argument d’une transmission de longue durée, alors que se profilait un autre mode d’accès à l’Histoire officielle. Les idéaux du primitivisme tout d’abord projetés sur la chamane ont aussi été détournés au profit d’idées psychédéliques contre-culturelles portées par le mouvement éclectique de la onda, dans une perspective à la fois universaliste et nationaliste. Ils ont ainsi été associés au Mexique avec une volonté de reconquête du passé préhispanique jusqu’alors investi par les élites officielles. Dans ce cadre, María Sabina a été érigée comme une figure de la résistance, physiquement frêle et en même temps inébranlable, survivant à la domination coloniale. De l’autre côté, les réinterprétations de l’indigénisme critique se sont ajoutées à cette traversée souterraine de l’histoire. Centrées quant à elles sur la situation sociale des Indiens du présent, elles ont contribué à inscrire la guérisseuse dans un contexte socioéconomique contemporain. Ainsi, sur cette image sociale se croisent les idéaux du primitivisme, les fastes du néo-indianisme et le réalisme social des Indiens du présent. Dans cette combinaison, l’indienne « analphabète », victime et exclue économique de la société contemporaine issue du colonialisme, a été conçue comme détentrice d’un autre savoir, mais aussi d’un sens artistique méconnu86.

L’analyse de diverses strates discursives et iconologiques nous a conduit à déceler une certaine homologie entre les images et les développements narratifs : les représentations de la chamane sanctifiée nous ramènent à son message, à savoir les chants rituels, entendus comme la sublime expression d’une époque immémoriale et donc d’une supposée mémoire précoloniale. Elles se détachent sur l’arrière-fond social contradictoire que dessine le récit de sa vie de misère. Les parcours narratifs qui se répondent montrent que les mises en récit (iconographique, filmique, littéraire) ont participé à la construction d’une figure sous forme d’oxymore, où l’ignorance, la pauvreté et l’exclusion sont apposées à une sagesse et à une connaissance incommensurable. L’inversion contenue dans le symbole le rend alors mémorable et mobilisable dans des dispositifs de savoir travaillés par les rapports de pouvoir au fil de différents contextes postcoloniaux.

C’est ainsi que María Sabina est à présent envisagée successivement comme victime sociale, émissaire du mystère, poète et muse. On signalera notamment sa mobilisation au Mexique comme représentante de l’oralité, des langues vernaculaires et de la littérature indienne dans le cadre de revendications indianistes ethnicisées. Dans ce dialogue multilingue, non sans lien avec le pacte de création évoqué dans cet article, elle est aussi devenue l’égérie d’un art poétique vécu. Entre Mexique et États-Unis, elle inspire alors des auteurs dans le sillage des postcolonial studies. Certains sont mexicains, tels Homero Aridjisis87 investi dans la critique environnementale, et le poète mazatèque et représentant des langues indiennes Juan Gregorio Regino. D’autres sont nord-américains, comme Henry Munn et Jérôme Rothenberg88 pour le courant de l’ethno-poésie inspiré par les chants de la prêtresse. D’autres encore sont nord-afro-américains, telle Alice Walker, écoféministe et défenseuse du droit des Noirs, qui la cite dans l’un de ses poèmes89. On retrouve aussi María Sabina dans des publications postcoloniales militant en faveur des opprimés. Un article de l’écrivaine mexicaine Elena Poniatowska90, engagée dans la défense des droits des femmes, la fait par exemple figurer comme « chamane » aux côtés d’autres « héroïnes » mexicaines qui ont marqué l’Histoire en tant que poétesses, peintres ou combattantes révolutionnaires. Il est publié dans un dossier consacré à la condition féminine de la « revue haïtienne de société et de culture » Rencontre, engagée contre l’exclusion, pour le pluralisme culturel enrichissant et pour les droits des citoyens d’Haïti et du monde. Le symbole de María Sabina, sollicité pour plusieurs causes, traverse les frontières. Son personnage cumule un capital symbolique de victime à plusieurs facettes en ployant sous le poids des exclusions et des dominations. Celles-ci sont autant masculines, car il s’agissait d’une femme, que capitalistes et coloniales, car de surcroît elle était pauvre, analphabète et surtout indienne. Sa résistance, comme celle attribuée à d’autres figures d’opprimés, n’en est que plus exemplaire.

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1

Le terme de chamane, tel qu’il est employé ici, renvoie à une catégorie importée dans la terre d’origine de Maria Sabina, à présent adopté dans le cadre du tourisme chamanique aux côtés de la terminologie vernaculaire. En langue mazatèque, ces spécialistes sont également désignés comme des « Personnes de savoir » (chjota chjine) ou, en langue espagnole, comme des « guérisseurs » et « guérisseuses » (curanderos, curanderas).

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2

Il s’agit de Huautla de Jimenez, chef-lieu des hautes terres mazatèques. Situé dans l’État de Oaxaca aux alentours de 1650 mètres d’altitude, il compte une dizaine de milliers d’habitants.

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3

Benjamin Feinberg, « “A symbol of wisdom and Love?” Counter-cultural tourism and the multiple faces of María Sabina in Huautla », dans M. Baud, A. Ypeij (dir.), Cultural Tourism in Latin America. The Politics of Space and Imagery, Leiden-Boston, Cedla Latin American Studies, vol. 96, 2009, p. 103. L’auteur insiste à ce sujet sur le jumelage entre la figure du Che et celle de Maria Sabina. S’il est vrai que le Che, en tant que guerrier héroïque, ne représente pas en soi la sagesse chamanique, il fait néanmoins partie des plus célèbres images appelées à représenter les cultures mexicaines et centraméricaines.

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4

Maria Sabina, verrons-nous, est définie sous l’angle d’une irréductible extériorité à la modernité et elle se trouve ainsi intégrée dans des utopies « décoloniales » au titre de témoin originaire d’avant la Conquête espagnole. Concernant l’approche critique de la colonisation espagnole et de la période coloniale, signalons ici la spécificité des positionnements « postcoloniaux » dans le contexte latino-américain. Un ensemble d’auteurs se démarque des « post-colonial studies » anglophones en fondant leur argument sur le concept de la « colonialité ». Liée à une modernité qui aurait débuté dès la Conquête de l’Amérique, au XVIe siècle, elle serait de plus étroitement associée au legs des empires espagnol et portugais. Les travaux d’auteurs latinoaméricains se distinguent alors des études postcoloniales, en affichant dans leurs théories « décoloniales » une posture plus critique et offensive, centrée sur l’enracinement historique de longue durée de la colonialité et sur ses implications économiques, raciales et sociales contemporaines. Pour plus de détails, voir : Capucine Boidin, « Études décoloniales et postcoloniales dans les débats français », Cahiers des Amériques latines, n° 62, 2009, p. 129-140 ; Claude Bourguignon, Philippe Colin, « De l’universel au pluriversel. Enjeux et défis du paradigme décolonial », Raison présente, vol. 199, n° 3, 2016, p. 99-108.

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5

Jean-Claude Chamboredon, « Production symbolique et formes sociales. De la sociologie de l’art et de la littérature à la sociologie de la culture », Revue française de sociologie, vol. 27, n° 3, 1986, p. 526. L’auteur s’inspire notamment d’Erwin Panofsky pour proposer une sociologie des productions symboliques en analysant leur articulation avec leurs fonctions de socialisation.

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6

Jean-Claude Chamboredon, « Production symbolique et formes sociales. De la sociologie de l’art et de la littérature à la sociologie de la culture », Revue française de sociologie, vol. 27, n° 3, 1986, p. 526.

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7

Je m’appuie ici sur les travaux de Ben Etherington, Literary Primitivism, Stanford, Stanford University Press, 2018. Je m’inspire notamment des commentaires effectués sur son ouvrage par Jehanne Denogent et Nadejda Magnenat, « Décoloniser le primitivisme », Acta fabula, vol. 21, n° 2, Essais critiques, 2020 [en ligne]. Dans cette perspective, « reterritorialiser » la notion de primitivisme implique de la considérer non sous le seul angle de sa construction par des auteurs occidentaux, mais de prendre la mesure du contexte historique du pays anciennement colonisé qui l’a inspirée et du dialogue instauré avec des auteurs de ce pays.

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8

Selon les termes de Michel Foucault, Histoire de la sexualité, I, La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1994 [1976].

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9

Álvaro Estrada (propos recueillis par), Autobiographie de Maria Sabina. La Sage aux Champignon Sacrés, Paris, Le Seuil, 1979.

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10

On la retrouve relatée à l’infini sur Internet et partagée bien au-delà du Mexique, chez des personnes de la génération des années 1970 ou inspirées par cette époque.

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11

Gordon R. Wasson, « Seeking the magic mushroom », Life, vol. 49, n° 19, 13 mai 1957, p. 100-120.

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12

Gordon R. Wasson, « Chapitre II- Le champignon sacré au Mexique Contemporain », in G. R. Wasson, R. Heim (dir.), Les Champignons hallucinogènes du Mexique. Études ethnologiques, taxinomiques, biologiques, physiologiques et chimiques, Archives du Muséum National d’Histoire Naturelle, 7e série, 1958, p. 50.

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13

Ainsi présentée dans les articles qui relatent la découverte de Wasson, il s’agit vraisemblablement de l’organisation culturelle de la New-York Historical Society, qui gère l’un des plus anciens musées new-yorkais éponyme.

Notons que les photographies du même auteur sont également publiées dans l’annexe de l’ouvrage scientifique qui reprend le récit de la découverte. Voir à ce sujet la planche IV dans Gordon R. Wasson et Roger Heim (dir.), Les Champignons Hallucinogènes du Mexique. Études ethnologiques, taxinomiques, biologiques, physiologiques et chimiques, Archives du Muséum National d’Histoire Naturelle, Septième série, Paris, 1958. Remarquons avec intérêt que ces photographies sont initialement en couleur. Avec leur diffusion dans des publications ultérieures, elles passent au noir et blanc, dans le cadre du processus de modelage iconographique ici analysé.

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14

Gordon R. Wasson, Mushroom Ceremony of the Mazatec Indians of Mexico, New York, Folkways Records and Service Corp., 1957.

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15

Voir Magali Demanget, « La patrimonialisation de l’occulte. Secret et écritures en terres mazatèques (Mexique) », Mondes contemporains, n° 5, 2014, p. 29-52.

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16

Voir par exemple l’ouvrage de Andrei A. Znamenski, The Beauty of the Primitive. Shamanism and the Western Imagination, New York, Oxford University Press, 2007. L’auteur retrace les mises en récit des « modern spiritual seekers » et revient sur la beauté du primitif dans l’imaginaire occidental qui gravite autour du chamanisme.

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17

Il a en effet ses antécédents littéraires, des récits de voyages aux récents témoignages romancés. Voir notamment à ce sujet Magali Demanget, « Quand le secret devient parure. Les passeurs de chamanisme chez les Indiens mazatèques (Mexique) », in G. Ciarcia (dir.), Ethnologues et passeurs de mémoires, Paris, Karthala-MSH-M, 2011, p. 173-174.

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18

Dominique Rabaté, « Le secret et la modernité », Modernités, n° 14, 2001, p. 9-32. Voir aussi Michel Foucault, Histoire de la sexualité, I, La volonté de savoir, Paris, Gallimard, 1994 [1976].

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19

Voir Gordon R. Wasson, « El Hongo Sagrado en el México Contemporáneo », Espacios, t. XIV, n° 20, 1996 [1957]. Fernando Benitez (1964 [1969], p.18-34) cité plus avant reprend également les différentes étapes de la découverte dans ses publications mexicaines. Voir également à ce sujet Magali Demanget, « La patrimonialisation de l’occulte. Secret et écritures en terres mazatèques (Mexique) », Mondes contemporains, n° 5, 2014, p. 29-52.

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20

Nicholas Thomas, Caroline Humphrey, « Introduction », in Nicholas Thomas, Caroline Humphrey (dir.), Shamanism, History and the State, Michigan, University of Michigan Press, 1996, p. 2.

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21

Dès octobre 1957, l’écrivain italo-mexicain Gutierre Tibón fit part de la « découverte » des champignons par Wasson dans les pages éditoriales du journal Excélsior (José Augustín, La Contracultura en México. La historia y el significado de los rebeldes sin causa, los jipitecas, los punks y las bandas, Mexico, Grijalbo, 1996, p. 53). En 1964, Fernando Benitez publie Los Hongos Alucinantes, ouvrage dans lequel il reprend, tout en l’enrichissant, la rhétorique primitiviste de Gordon R. Wasson.

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22

Fernando Benitez, Los Hongos Alucinantes, Mexico, Serie Popular Era, 1969 [1964], p. 79. Le livre, structuré en trois parties, consacre la deuxième et troisième partie à Maria Sabina et à l’expérience de la rencontre hallucinogène vécue par l’auteur.

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23

R. G. Wasson, qui n’avait ni formation académique ni rattachement institutionnel, a ainsi construit sa légitimité scientifique grâce à des collaborations de recherche pluridisciplinaire. On citera aussi les linguistes de l’ILV Eunice Victoria Pike, George et Florence Cowan, mais aussi le biologiste du Museum d’Histoire Naturelle Roger Heim, ou encore les éminents anthropologues mexicanistes Roberto Weitlaner et Guy Stresser Pan qui l’accompagnèrent dans ses expéditions.

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24

Ce n’est en effet que bien après sa retraite qu’il relate son voyage avec Wasson (il est né en 1913), dans un ouvrage paru en 1990 et réédité sept ans plus tard, qui regroupe les principaux auteurs ayant participé à la découverte des champignons sacrés et de Maria Sabina. Voir Guy Stresser-Péan, « Travels with R. Gordon Wasson in Mexico, 1956-1962 », in Thomas J. Riedlinger (dir.), The Sacred Mushroom Seeker. Essays for R. Gordon Wasson, Rochester, Park Street Press, 1997 [1990], p. 231-238. Il en est de même pour l’autre anthropologue mexicain de renom, Roberto Weitlaner, qui collabora aussi aux expéditions : il est à ce sujet édifiant que son nom soit à chaque fois orthographié avec des erreurs dans les diffusions au grand public. Ainsi, dans l’article de la revue Life, l’erreur de « Waitlaner » pour la version anglophone laisse place à celle de « Weitlander » pour la version espagnole, erreur par la suite reprise dans tout l’ouvrage de Fernando déjà cité (Los Hongos Alucinantes, México, Serie Popular Era, 1969 [1964]), publié huit ans plus tard.

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25

Claude Lévi-Strauss « Les champignons dans la culture. À propos d’un livre de R. G. Wasson », in Anthropologie Structurale, Paris, Plon, 1996 [1973].

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26

Carlos Inchaustegui, « Cinco años y un programa. El centro coordinador indigenista de la Sierra Mazateca », América Indígena, vol. 26, n° 1, 1966.

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27

Et cela toutes générations confondues jusqu’à la fin des années 1990.

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28

Andrés Medina, « ¿Etnología o literatura? El caso de Benítez y sus indios », Anales de antropología, n° 11, 1974.

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29

Andrés Medina, « ¿Etnología o literatura? El caso de Benítez y sus indios », Anales de antropología, n° 11, 1974, p. 121.

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30

Andrés Medina, « ¿Etnología o literatura? El caso de Benítez y sus indios », Anales de antropología, n° 11, 1974, p. 123.

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31

Andrés Medina, « ¿Etnología o literatura? El caso de Benítez y sus indios », Anales de antropología, n° 11, 1974, p. 121.

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32

Fernando Benitez, Los Hongos Alucinantes, México, Serie Popular Era, 1969 [1964], p. 44-52.

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33

En principe fondé sur l’égalité de ses membres, le projet national s’est heurté à la question des minorités colonisées. Tout d’abord éludée après l’indépendance, elle a ensuite été envisagée comme un « problème » à résoudre grâce au progrès du métissage après la Révolution de 1910, puis identifiée comme une ressource positive dans les politiques de reconnaissance du multiculturalisme néolibéral. Pour une synthèse sur ce thème, voir par exemple Pierre Beaucage, « Un débat à plusieurs voix : les Amérindiens et la nation au Mexique », Recherches amérindiennes au Québec, vol. 25, n° 4, 1995, p. 15-30.

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34

Claudio Lomnitz, Modernidad Indiana. Nueve ensayos sobre nación y mediación en México, Mexico, Planeta (coll. « Espejo Mexicano »), 1999, p. 62.

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35

Kimberle Lopez, cité par Ana Lourdes Álvarez Romero, « El testimonio problematizado en Hasta no verte Jesús mío: convergencias y divergencias con Oscar Lewis en la reconstrucción del Otro », in Carla Fernandes (dir.), D’oublis et d’Abandons. Notes sur l’Amérique latine, Binjes, Orbis Tertius, 2017, p. 69. Concernant la notion de colonialisme interne, précisons qu’elle a été initialement développée dans les années 1960 par des sociologues mexicains, qui pointent un continuum entre la période coloniale et post-coloniale en postulant que les rapports de domination économique et politique perdurent bien après l’indépendance. Soulignons que cette notion participe des théories décoloniales déjà mentionnées et que son identification est articulée aux objectifs d’un développement grâce à la décolonisation. Voir notamment Pablo González Casanova, « Société plurale, colonialisme interne et développement », Tiers-Monde, t. 5, n° 18, 1964, p. 291-295.

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36

Eliot Weinberger, « Elogio de la droga », Semanal, n° 169, 6 septembre 1992, p. 20. Notons que dans les années 1960, l’écrivain nord-américain était notamment le traducteur des œuvres d’Octavio Paz. Il s’engagera par la suite dans l’ethnopoésie mentionnée plus avant.

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37

Dans l’État de Oaxaca, dont est originaire Maria Sabina, cette émergence date des années 1970 (Guillermo de la Peña, « Territoire et citoyenneté ethnique dans la nation globalisée », in Marie-France Prévot Scharpia, Hélène Rivière d’Arc (dir.), Les Territoires de l’État-nation en Amérique Latine, Paris, IHEAL, 2001 ; Raúl Víctor Martínez Vásquez, Movimiento Popular y Política en Oaxaca : 1968-1986, Mexico, CNCA, 1990).

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38

Voir notamment Margarita Nolascos Armas, « La antropología aplicada en México y su destino final », in Mercedes Olivera et al. (dir.), De eso que llaman antropología mexicana, México, Comité de publicaciones de Los alumnos de la ENAH, 1970, p. 66.

Retour vers la note de texte 12385

39

Voir à ce sujet Guillermo Bonfil Batalla, Lo indio desindianisado, in México Profundo. Una civilización negada, Mexico, Grijalbo, 1994 [1987], p. 73-96.

Retour vers la note de texte 12386

40

Annick Lempérière-Roussin, « Le mouvement de 1968 au Mexique », Vingtième siècle. Revue d’histoire, n° 23, 1989, p. 78.

Retour vers la note de texte 12387

41

« La Cultura en México », Siempre!, n° 349, 23 octobre 1968.

Retour vers la note de texte 12389

42

Fernando Benitez, « Los días de la ignominia », Siempre!, n° 349, 23 octobre 1968.

Retour vers la note de texte 12390

43

Citons ici Elena Poniatowska, La noche de Tlatelolco: Testimonios de historia oral publié en 1971 abordé dans les lignes qui suivent. D’autres auteurs, dont le poète Octavio Paz, établirent le parallèle entre le massacre et le sacrifice des civilisations précolombiennes. L’ouvrage Regina de Velasco Piña, 1987, reprendra ainsi le massacre de Tlatelolco dans une fiction où l’auteur pose les fondements d’un culte néo-indien mexicain, les reginistas (culte notamment abordé dans Jacques Galinier et Antoinette Molinié, Les Néo-Indiens. Une religion du IIIe millénaire, Paris, Odile Jacob, 2006). Quant à María Sabina, elle figure dans de nombreuses réinterprétations néo-indiennes et psychédéliques littéraires (dans les écrits d’auteurs identifiés à La Onda tels qu’Enrique Maroquin ou Jorge Augustin) et musicales (dans le rock mexicain par exemple, le groupe El TRI, est l’auteur du tube « María Sabina es un símbolo »).

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44

Jean-Claude Chamboredon, « Production symbolique et formes sociales. De la sociologie de l’art et de la littérature à la sociologie de la culture », Revue française de sociologie, vol. 27, n° 3, 1986, p. 515-519.

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45

Andrés Medina Hernández, « ¿Etnología o literatura? El caso de Benítez y sus indios », Anales de antropología, n° 11, 1974, p. 136.

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46

Jean-Claude Chamboredon, « Production symbolique et formes sociales. De la sociologie de l’art et de la littérature à la sociologie de la culture », Revue française de sociologie, vol. 27, n° 3, 1986, p. 519.

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47

Lucero Margarita Aguirre-Valdés, « Los huicholes, de Fernando Benítez: un relato de viaje », La colmena, n° 87, 2015, p. 25-37.

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48

Raphaële Plu-Jenvrin, « Mémoire, chronique et discours culturel dans le Mexique de l’après 1968 », Mémoire et culture en Amérique latine, América. Cahiers du CRICCAL, n° 30, 2003, p. 117-124.

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49

Ana Lourdes Álvarez Romero, « El etnógrafo: autor, mediador y empatía en La noche de Tlatelolco, Chin Chin el teporocho y Vida de María Sabina », Literatura Mexicana, vol. XXIX, n° 1, 2018, p. 107.

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50

Ou, selon les propres termes de James Clifford, de « post-anthropologique » ou de « post-littéraire » (James Clifford, « Introduction : Partial Truths », in James Clifford, George E. Marcus (dir.), Writing Culture. The Poetics and Politics of Ethnography, Berkeley, University of California Press, 1986, p. 5).

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51

Ana Lourdes Álvarez Romero, « El etnógrafo: autor, mediador y empatía en La noche de Tlatelolco, Chin Chin el teporocho y Vida de María Sabina », Literatura Mexicana, vol. XXIX, n° 1, 2018, p. 108. Comme elle le remarque, E. P. Poniatowska inaugure de nouveaux registres qui mettent en relief une gamme de subjectivités. Ils apparaissent comme un écho précurseur de ceux recommandés dix ans plus tard par James Clifford dans l’écriture ethnographique.

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52

Cité par Álvaro Estrada (propos recueillis par), Autobiographie de Maria Sabina, La Sage aux Champignon Sacrés, Paris, Le Seuil, 1979, p. 109.

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53

Guillermo Bonfil Batalla, México Profundo. Una civilización negada, Mexico, Grijalbo, 1994 [1987].

Retour vers la note de texte 12401

54

Guillermo Bonfil Batalla, México Profundo. Una civilización negada, Mexico, Grijalbo, 1994 [1987], p. 10.

Retour vers la note de texte 12402

55

Voir à ce sujet Ana Lourdes Álvarez Romero, « El etnógrafo: autor, mediador y empatía en La noche de Tlatelolco, Chin Chin el teporocho y Vida de María Sabina », Literatura Mexicana, vol. XXIX, n° 1, 2018, p. 99-124.

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56

Voir notamment sa description de la cérémonie à laquelle il participe aux côtés (entre autres) de l’anthropologue Carlos Inchaustegui (Fernando Benitez, Los Hongos Alucinantes, México, Serie Popular Era, 1969 [1964], et en particulier la partie 3 : « Delirios y extasis », p. 83-126).

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57

Magali Demanget, « Aux sources d’une communauté imaginée. Le tourisme chamanique à Huautla de Jimenez (Indiens mazatèques, Mexique) », Ethnologies, vol. 32, n° 2, 2010, p. 218.

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58

Fernando Benitez, « La santa de los hongos, vida y misterio de Marla Sabina », RUMex, XVIII, 1er septembre 1963, p. 15.

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59

Miriam Hernández Reyna, « Memoria histórica y pluralidad cultural en México: un nuevo imaginario sobre el pasado “indígena” para un futuro posible », Revista Cambios y Permanencias, vol. 8, n° 2, 2017, p. 736-768.

Retour vers la note de texte 12406

60

Miriam Hernández Reyna, « Memoria histórica y pluralidad cultural en México: un nuevo imaginario sobre el pasado “indígena” para un futuro posible », Revista Cambios y Permanencias, vol. 8, n° 2, 2017, p. 744.

Retour vers la note de texte 12408

61

Le désigné « ciclo de Chiapas » a été identifié par Joseph Sommers, « El ciclo de Chiapas: nueva corriente literaria », Cuadernos Americanos, marzo-abril 1964, p. 246-261. Il concerne la littérature indigéniste critique des années 1930-1960 composée d’ouvrages produits sur des Indiens d’ethnies situées dans l’État du Chiapas.

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62

Fernando Benitez, Los Hongos Alucinantes, México, Serie Popular Era, 1969 [1964], p. 45-56.

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63

Fernando Benitez, Los Hongos Alucinantes, México, Serie Popular Era, 1969 [1964], p. 44.

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64

Il s’agit de la traduction littérale du titre de l’ouvrage en espagnol, titrée dans l’édition française : Maria Sabina, la Sage aux Champignons Sacrés. L’attention portée au récit de vie dans la version originale a bien entendu toute son importance.

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65

Traduit de l’espagnol en anglais, français, allemand, italien…

Retour vers la note de texte 12411

66

James Clifford, « Introduction : Partial Truths », in James Clifford, George E. Marcus (dir.), Writing Culture. The Poetics and Politics of Ethnography, Berkeley, University of California Press, 1986, p. 8-9.

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67

Álvaro Estrada, « Introduction to the Life of María Sabina », in Jerome Rothenberg (dir.), María Sabina. Selections, Berkeley, University of California Press, 2003, p. 130-131.

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68

Notons que si ces travaux à l’instigation de Wasson furent réalisés avec la collaboration des linguistes de l’ILV, álvaro Estrada fut par la suite sollicité pour éclairer et compléter les points de traduction restés irrésolus (álvaro Estrada, « Introduction to the Life of María Sabina », in Jerome Rothenberg (dir.), María Sabina. Selections, Berkeley, University of California Press, 2003, p. 130-131).

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69

Ana Lourdes Álvarez Romero, « El etnógrafo: autor, mediador y empatía en La noche de Tlatelolco, Chin Chin el teporocho y Vida de María Sabina », Literatura Mexicana, vol. XXIX, n° 1, 2018, p. 122.

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70

Ana Lourdes Álvarez Romero, « El etnógrafo: autor, mediador y empatía en La noche de Tlatelolco, Chin Chin el teporocho y Vida de María Sabina », Literatura Mexicana, vol. XXIX, n° 1, 2018, p. 122.

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71

Concernant l’histoire de ces différentes terminologies et leurs implications théoriques, voir Séverine Graff, « “Cinéma-vérité” ou “cinéma direct” : hasard terminologique ou paradigme théorique ? », Décadrages, n° 18, 2011, p. 32-46.

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72

Ce choix d’une voix masculine, explique Echevarria, fut délibéré : il n’était pas question d’imiter, de faire croire que cette voix aurait pu être celle de María Sabina, mais au contraire de préserver le réalisme documentaire du film.

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73

Dario Marchiori, « Le cinéma direct : du sujet retrouvé à l’invention du subjectif », Cahier Louis-Lumière, n° 8, 2011, p. 43.

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74

Serge Gruzinski, La Guerre des images. De Christophe Collomb à « Blade Runner », Paris, Fayard, 1990.

Retour vers la note de texte 12422

75

Serge Gruzinski, La Guerre des images. De Christophe Collomb à « Blade Runner », Paris, Fayard, 1990, p. 335.

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76

Ignacio López Bocanegra (1923-1986).

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77

Voir notamment Óscar Colorado Nates, « Nacho López, entre lo documenta y lo autoral », Archivo de la etiqueta: Guillermo Bonfil, Oscar en Fotos, 7 Diciembre 2012 [en ligne]. Tout en reprenant le parcours du photographe, l’article propose un panorama de son œuvre.

Retour vers la note de texte 12425

78

Óscar Colorado Nates, « Nacho López, entre lo documenta y lo autoral », Archivo de la etiqueta: Guillermo Bonfil, Oscar en Fotos, 7 Diciembre 2012 [en ligne].

Retour vers la note de texte 12426

79

Selon les termes de l’affiche du film (René Rebetez, La Magía, Mexico, 1972).

Retour vers la note de texte 12427

80

Walter Benjamin, « Petite histoire de la photographie », Études photographiques, n° 1, 1996, p. 3 [en ligne].

Retour vers la note de texte 12428

81

Walter Benjamin, « Petite histoire de la photographie », Études photographiques, n° 1, 1996, p. 3 [en ligne].

Retour vers la note de texte 12430

83

Frédéric Maguet, « Le portrait de Che Guevara », Gradhiva, n° 11, 2010, p. 144.

Retour vers la note de texte 12429

84

Je ne fais qu’esquisser ce jeu de transpositions qui mériterait de plus amples développements. Faute de pouvoir revenir sur l’abondante littérature qui traite de cette icône nationale, citons le chapitre de Ana Cecilia Hornedo Marin, « L’invocation à la Vierge de Guadalupe et les paradoxes de la Révolution mexicaine », in Anne Creissels, Giovanna Zapperi (dir.), Subjectivités, pouvoir, image. L’histoire de l’art travaillée par les rapports coloniaux et les différences sexuelles, Toulouse, EuroPhilosophie édition, 2017 [en ligne]. L’auteur analyse les métamorphoses de la Vierge opérées à la suite de la Révolution mexicaine, en soulignant les inversions à l’œuvre dans ses représentations postrévolutionnaires. Signalons également l’ouvrage classique de Jacques Lafaye, Quetzalcóatl et Guadalupe. La formation de la conscience nationale au Mexique (1531-1813), Paris, Gallimard, 1974. L’auteur remonte aux sources de la création du mythe de la Vierge créolisée et mexicanisée par l’établissement d’une correspondance avec la déesse aztèque Tonantzin, pour montrer sa conversion en une « épiphanie patriotique » à l’Indépendance.

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85

Huilpil [terme issu du nahuatl] : vêtement traditionnel indien.

Retour vers la note de texte 12445

86

Juan Gregorio Regino, « Escritores en lenguas indígenas », in Carlos Montemayor (dir.), Situación actual y perspectivas de la Literatura en Lenguas Indígenas, Mexico, Consejo Nacional para las Culturas y las Artes, 1993, p. 119-137.

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87

Homero Aridjisis, Carne de Dios, Mexico, Alfaguara, 2003.

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88

Voir notamment Jerome Rothenberg (dir.), with texts and commentaries of Álvaro Estrada and others, Maria Sabina. Selections, Berkeley, University of California Press, 2003. L’ouvrage réunit des textes d’auteurs nord-américains, dont à titre posthume Wasson, et mexicains, dont deux auteurs mazatèques (Álvaro Estrada et le poète Juan Gregorio Regino).

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89

Bring Me the Heart of Maria Sabina. Alice Walker, Absolute Trust in the Goodness of the Earth. New Poems, New York, Random House, 2003.

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90

Elena Poniatowska, « Femmes, peintures et politique du Mexique », Rencontre. Revue haïtienne de société et de culture, n° 28-29, 2013, p. 149-155.

Aguirre Valdés Lucero Margarita, « Los huicholes, de Fernando Benítez: un relato de viaje », La colmena, n° 87, 2015, p. 25-37.

Álvarez Romero Ana Lourdes, « El etnógrafo: autor, mediador y empatía en La noche de Tlatelolco, Chin Chin el teporocho y Vida de María Sabina », Literatura Mexicana, vol. XXIX, n° 1, 2018, p. 99-124.

 

—, « El testimonio problematizado en Hasta no verte Jesús mío: convergencias y divergencias con Oscar Lewis en la reconstrucción del Otro », in Carla Fernandes (dir.), D’oublis et d’Abandons. Notes sur l’Amérique latine, Binjes, Orbis Tertius, 2017, p. 59-74. 

Aridjisis Homero, Carne de Dios, Mexico, Alfaguara, 2003. 

Augustín José, La Contracultura en México. La historia y el significado de los rebeldes sin causa, los jipitecas, los punks y las bandas, Mexico, Grijalbo, 1996. 

Beaucage Pierre, « Un débat à plusieurs voix : les Amérindiens et la nation au Mexique », Recherches amérindiennes au Québec, vol. 25, n° 4, 1995, p. 15-30.

Benítez Fernando, Los Hongos Alucinantes, México, Serie Popular Era, 1969 [1964]. 

 

—, « Los días de la ignominia », Siempre!, n° 349, 23 octobre 1968.

 

—, « La santa de los hongos, vida y misterio de Marla Sabina », RUMex, vol. XVIII, 1er septembre 1963, p. 15-20.

Benjamin Walter, « Petite histoire de la photographie », Études photographiques, no 1, 1996 [en ligne].

Boidin Capucine, « Études décoloniales et postcoloniales dans les débats français », Cahiers des Amériques latines, n° 62, 2009, p. 129-140.

Bonfil Batalla Guillermo, México Profundo. Una civilización negada, Mexico, Grijalbo, 1994 [1987]. 

Bourguignon Claude et Colin Philippe, « De l’universel au pluriversel. Enjeux et défis du paradigme décolonial », Raison présente, vol. 199, n° 3, 2016, p. 99-108.

Chamboredon Jean-Claude, « Production symbolique et formes sociales. De la sociologie de l’art et de la littérature à la sociologie de la culture », Revue française de sociologie, vol. 27, n° 3, 1986, p. 505-529.

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