Négocier la biodiversité à l'international : enjeux politiques, économiques et sociaux

Cette thèse étend le champ d’analyse de notre étude précédente sur le sujet de la biopiraterie – l’appropriation et l’exploitation commerciale non réglementée des ressources génétiques provenant de la biodiversité ou des connaissances traditionnelles associées (CTA). La biopiraterie a émergé comme problème public international après l’élaboration de la Convention sur la diversité biologique (CDB) en 1992. Elle est devenue un enjeu politique des relations Nord/Sud, marqué par la perception d’une confrontation entre les intérêts industriels des pays à économie développée et ceux des pays en développement en matière de défense de leurs ressources naturelles et des connaissances autochtones. Cet enjeu est ancré dans les normes établies par la CDB qui incitaient à la mise en valeur économique de la biodiversité afin de combattre son érosion, à travers des accords « d’accès et partage des avantages » (APA). Ainsi, les règles établies par la CDB devaient assurer l’échange équitable des ressources et des avantages économiques et non-économiques découlant de leur utilisation industrielle entre firmes et instituts de recherche du Nord et leurs partenaires du Sud. 

Notre thèse examine les configurations actuelles de ces échanges économico-scientifiques autour de la biodiversité. Nous étudions ainsi les conditions de mise en œuvre des accords APA mais également des dynamiques de production de la recherche utilisant les ressources génétiques. Cette démarche nous invite à examiner les stratégies politiques et économiques d’une grande diversité d’acteurs publics et privés (entreprises, chercheurs, élus, etc.). Il s’agit d’étudier dans quelle mesure ces acteurs façonnent les politiques et les modalités marchandes d’utilisation des ressources génétiques et des CTA. Nous interrogeons donc les méthodes de lobbying employées par des entreprises des secteurs concernés (pharmaceutique, agroalimentaire, etc.) dans les processus politiques qui encadrent l’innovation industrielle utilisant ces ressources. Enfin, nous analyserons les controverses et les formes de mobilisation autour de ces nouvelles applications scientifiques, notamment en étudiant des dynamiques de pouvoir entre les acteurs industriels et les mouvements de défense des droits des communautés locales. L’enquête de terrain se concentrera principalement sur un ensemble d’acteurs situés aux États-Unis, en Europe et au Brésil, avec une méthodologie qualitative recourant à des entretiens semi-directifs et la collecte de documents de première main. Notre premier terrain aux États-Unis nous a permis d’effectuer des enquêtes auprès d’organismes scientifiques et industriels, comme les National Institutes of Health et l’entreprise agricole Pioneer1.

 

 

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Ce travail a été réalisé dans le cadre du laboratoire d’excellence Tepsis, portant la référence ANR-11-LABX-0067 et a bénéficié d’une aide au titre du Programme Investissements d’Avenir.

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